Proche-Orient
Bethléem en guerre
Le Quai d'Orsay a protesté jeudi auprès de l'ambassadeur d'Israël contre les tirs répétés de chars israéliens sur l'hôpital de la Sainte famille de Bethléem et la «situation intolérable» faite aux familles palestiniennes. La ville natale du Christ est en état de guerre, comme a pu le constater sur place notre envoyée spéciale Anne Corpet.
De notre envoyée spéciale
A l'entrée de Bethléem, quatre tanks et un blindé léger de l'armée israélienne filtrent le passageà Le poste de contrôle de la police palestinienne a disparu. Depuis une semaine, c'est Tsahal qui impose sa loi sur cette localité pourtant officiellement placée sous autorité palestinienne.
A l'intérieur de la ville, les rues sont désertes... La route principale est devenue un secteur à éviter. Un char israélien stationne devant l'hotel Paradise désormais occupé par l'armée, et fait feu à la mitrailleuse sur toute personne qui approche trop prèsà Les façades des boutiques alentours sont totalement dévastées : rideaux de fer arrachés, murs détruits ou noirs de fumée. Des lampadaires gisent tordus au milieu de la chaussée. Tapi derrière un muret, Walid Al Srour, qui possède un magasin d'électricité se lamente «J'ai des choses à récupérer dans mon magasin, mais je ne peux pas m'approcher» dit il en montrant le char de Tsahal.. Dans la seule matinée de jeudi, deux personnes ont été tuées à proximité.
Au sud de la ville, dans une petite maison, quelques femmes pleurent autour d'un cercueil. Essa Al Ali avait 55 ans. Une balle l'a atteint mercredi soir alors qu'il circulait en voiture. C'est le quatrième chrétien tué à Bethléem depuis l'arrivée des chars de Tsahal dans la localité. Une image du Christ et un chapelet ont été placés entre ses mains. Le corps est recouvert du drapeau Palestinien et d'un bouquet d'oeillets. «Avant il y avait quelques dissensions entre chrétiens et musulmans à Béthléem» explique le prêtre catholique venu bénir le corps. Et il explique : «Les habitants majoritairement chrétiens de Beit Jala accueillaient contraints et forcés les combattants palestiniens qui tiraient sur la colonie de Gilo située juste en face. Mais depuis une semaine, le deuil a uni les deux communautés». Lentement, le convoi funéraire se met en route vers l'église sainte Catherine, qui jouxte celle de la Nativité. Sur la grand place, il croise une autre procession, qui se dirige elle vers la mosquée.. On enterre un policier de la force 17, la garde de Yasser Arafat, tué le matin même. Un instant, les chants chrétiens se mêlent aux appels du muezzin. Des hommes cagoulés de noir, tirent quelques rafales au fusil automatique vers le ciel «Par pitié, je ne veux pas de votre vengeance», implore la femme du chrétien. Au loin, on entend des échanges de tirs.
Un orphelinat entre deux feux
L'hôpital de la Sainte famille se situe en contrebas de la place de la Nativité. Il abrite une maternité, une crèche et un orphelinat. Dans la ruelle qui longe l'établissement, des Palestiniens en armes tirent quelques rafales en direction des chars israéliens situés un peu plus loin. La riposte ne se fait pas attendre : un obus tombe à proximité.
«Nous sommes coincés entre deux feux», explique s£ur Elisabeth, qui s'occupe des soixante enfants de l'orphelinat. Et elle raconte : «Hier soir, les tirs n'ont pas cessé. Plusieurs obus israéliens sont tombés juste devant l'établissement. Heureusement, personne n'a été blessé». Tous les soirs depuis une semaine, les lits des enfants sont tirés dans le couloir principal de l'orphelinat. «Là, les murs sont bien épais», précise S£ur Elisabeth. Mais elle ajoute «Le bruit est tout de même terrifiant. Les enfants sont effrayés. Ils sont sans cesse réveillés par les tirs. Nous sommes tous bien fatigués».
Au volant de son taxi qui nous ramène vers l'entrée de la ville, Walid rigole : «Je suis le roi de la route ! Depuis une semaine, il n'y a plus d'embouteillages à Béthleem». De fait, aucun véhicule ou presque ne prend plus le risque de circuler. «Le problème, explique Walid, c'est que la physionomie de la ville évolue sans arrêt. Un secteur calme peut soudain s'embraser. Mais moi, je connais tous les combattants, et je me tiens au courantà» Walid nous dépose à une centaine de mètres du poste israélien. «Désolé, je ne peux pas aller plus loin», sourit-il. De l'autre côté du barrage, les Israéliens circulent sans contrainteà Un embouteillage se forme à l'entrée de Jérusalem. Les tirs de Bethléem sont loin, très loin.
A l'entrée de Bethléem, quatre tanks et un blindé léger de l'armée israélienne filtrent le passageà Le poste de contrôle de la police palestinienne a disparu. Depuis une semaine, c'est Tsahal qui impose sa loi sur cette localité pourtant officiellement placée sous autorité palestinienne.
A l'intérieur de la ville, les rues sont désertes... La route principale est devenue un secteur à éviter. Un char israélien stationne devant l'hotel Paradise désormais occupé par l'armée, et fait feu à la mitrailleuse sur toute personne qui approche trop prèsà Les façades des boutiques alentours sont totalement dévastées : rideaux de fer arrachés, murs détruits ou noirs de fumée. Des lampadaires gisent tordus au milieu de la chaussée. Tapi derrière un muret, Walid Al Srour, qui possède un magasin d'électricité se lamente «J'ai des choses à récupérer dans mon magasin, mais je ne peux pas m'approcher» dit il en montrant le char de Tsahal.. Dans la seule matinée de jeudi, deux personnes ont été tuées à proximité.
Au sud de la ville, dans une petite maison, quelques femmes pleurent autour d'un cercueil. Essa Al Ali avait 55 ans. Une balle l'a atteint mercredi soir alors qu'il circulait en voiture. C'est le quatrième chrétien tué à Bethléem depuis l'arrivée des chars de Tsahal dans la localité. Une image du Christ et un chapelet ont été placés entre ses mains. Le corps est recouvert du drapeau Palestinien et d'un bouquet d'oeillets. «Avant il y avait quelques dissensions entre chrétiens et musulmans à Béthléem» explique le prêtre catholique venu bénir le corps. Et il explique : «Les habitants majoritairement chrétiens de Beit Jala accueillaient contraints et forcés les combattants palestiniens qui tiraient sur la colonie de Gilo située juste en face. Mais depuis une semaine, le deuil a uni les deux communautés». Lentement, le convoi funéraire se met en route vers l'église sainte Catherine, qui jouxte celle de la Nativité. Sur la grand place, il croise une autre procession, qui se dirige elle vers la mosquée.. On enterre un policier de la force 17, la garde de Yasser Arafat, tué le matin même. Un instant, les chants chrétiens se mêlent aux appels du muezzin. Des hommes cagoulés de noir, tirent quelques rafales au fusil automatique vers le ciel «Par pitié, je ne veux pas de votre vengeance», implore la femme du chrétien. Au loin, on entend des échanges de tirs.
Un orphelinat entre deux feux
L'hôpital de la Sainte famille se situe en contrebas de la place de la Nativité. Il abrite une maternité, une crèche et un orphelinat. Dans la ruelle qui longe l'établissement, des Palestiniens en armes tirent quelques rafales en direction des chars israéliens situés un peu plus loin. La riposte ne se fait pas attendre : un obus tombe à proximité.
«Nous sommes coincés entre deux feux», explique s£ur Elisabeth, qui s'occupe des soixante enfants de l'orphelinat. Et elle raconte : «Hier soir, les tirs n'ont pas cessé. Plusieurs obus israéliens sont tombés juste devant l'établissement. Heureusement, personne n'a été blessé». Tous les soirs depuis une semaine, les lits des enfants sont tirés dans le couloir principal de l'orphelinat. «Là, les murs sont bien épais», précise S£ur Elisabeth. Mais elle ajoute «Le bruit est tout de même terrifiant. Les enfants sont effrayés. Ils sont sans cesse réveillés par les tirs. Nous sommes tous bien fatigués».
Au volant de son taxi qui nous ramène vers l'entrée de la ville, Walid rigole : «Je suis le roi de la route ! Depuis une semaine, il n'y a plus d'embouteillages à Béthleem». De fait, aucun véhicule ou presque ne prend plus le risque de circuler. «Le problème, explique Walid, c'est que la physionomie de la ville évolue sans arrêt. Un secteur calme peut soudain s'embraser. Mais moi, je connais tous les combattants, et je me tiens au courantà» Walid nous dépose à une centaine de mètres du poste israélien. «Désolé, je ne peux pas aller plus loin», sourit-il. De l'autre côté du barrage, les Israéliens circulent sans contrainteà Un embouteillage se forme à l'entrée de Jérusalem. Les tirs de Bethléem sont loin, très loin.
par Anne Corpet
Article publié le 25/10/2001