Balkans
Campagne électorale en armes
Deux ans et demi après l'instauration du protectorat international sur le Kosovo, les électeurs doivent élire le premier parlement de la province, le 17 novembre prochain. Les Serbes menacent toujours de boycotter la consultation, tandis que les violences se multiplient côté albanais.
Dans la nuit du 15 au 16 octobre, une bombe a entièrement détruit le siège de la Ligue démocratique du Kosovo (LDK), la formation d'Ibrahim Rugova, dans la petite ville de Suva Reka, au sud du Kosovo. L'attentat n'a pas été revendiqué, mais il a signalé que la campagne pour les élections législatives du 17 novembre était bien lancée. Quelques jours auparavant, une dépêche, immédiatement démentie, annonçait qu'Ibrahim Rugova se retirait de la vie politique : on ignore encore s'il s'agit d'une erreur de communication, d'une mauvaise plaisanterie, ou d'un acte de malveillance politique.
Près de vingt-cinq formations politiques s'apprêtent à briguer les suffrages d'environ un million d'électeurs. Dans le camp albanais, tous les programmes sont à peu près identiques, et peuvent se résumer en un seul mot : l'indépendance. On observera cependant avec attention les scores de la LDK, donnée grande favorite, et du Parti démocratique du Kosovo (PDK) d'Ashim Thaçi, qui regroupe les anciens cadres de l'UCK. Lors des élections municipales d'octobre 2000, l'échec cinglant du PDK, écrasé par la LDK, avait probablement persuadé certains militants de choisir une stratégie de la confrontation pour retrouver un crédit politique, en «exportant» la question du Kosovo vers le sud de la Serbie et la Macédoine, où des guérillas séparatistes albanaises se sont développées depuis le printemps. La «troisième force», l'Alliance pour l'avenir du Kosovo (AAK), créée par un ancien commandant de l'UCK entré en dissidence, Ramush Haradinaj, a peu de chances de venir troubler le face-à-face entre la LDK et le PDK.
Les inquiétudes de la MINUK
La Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) ne cache pas son inquiétude de voir les violences se généraliser avant le scrutin. En effet, les radicaux du PDK ont a priori tout à perdre de ses élections, qui devraient confirmer la suprématie de la LDK. A titre préventif, les effectifs des troupes de l'OTAN dans la petite province ont été portés de 38000 à 40000 hommes.
La grande inconnue tient cependant toujours à l'attitude des Serbes, des Roms et des autres minorités nationales du Kosovo qui avaient largement boycotté le scrutin municipal de l'an dernier. Le nouveau gouvernement démocrate a poussé à l'inscription des Serbes sur les listes électorales, qu'il s'agisse de ceux qui survivent dans les enclaves du Kosovo ou des déplacés installés en Serbie. Environ 170 000 d'entre eux se sont inscrits, et les autorités de Belgrade pourraient être tentées de se contenter de cette démonstration de force, prouvant l'importance de la communauté serbe au Kosovo, sans prendre part aux élections. La DOS, la coalition majoritaire de Belgrade, a ajourné à plusieurs reprises une réunion qui devait décider de la participation des Serbes, signe que la question est loin de faire l'unanimité au sein de la classe politique serbe.
La porte-parole de la MINUK, Susan Manuel, a rappelé que «les Serbes sont inquiets face aux revendications indépendantistes des leaders albanais, mais le statut final du Kosovo ne sera pas décidé par le parlement car une telle démarche contredirait la résolution 1244 des Nations Unies. Le statut final devra être déterminé par le seul Conseil de sécurité de l'ONU». Mais cette assurance donnée aux Serbes a, justement, tout pour déplaire aux Albanais, qui pourraient se demander quelles seront les réelles compétences du futur parlement. Le statut de protectorat international du Kosovo devrait se prolonger, même s'il suscite l'hostilité des Albanais aussi bien que des Serbes. Dans l'immédiat, les préoccupations internationales consistent à éviter qu'un éventuel boycott serbe et une vague de violences dans le camp albanais n'ôtent toute légitimité au scrutin.
Près de vingt-cinq formations politiques s'apprêtent à briguer les suffrages d'environ un million d'électeurs. Dans le camp albanais, tous les programmes sont à peu près identiques, et peuvent se résumer en un seul mot : l'indépendance. On observera cependant avec attention les scores de la LDK, donnée grande favorite, et du Parti démocratique du Kosovo (PDK) d'Ashim Thaçi, qui regroupe les anciens cadres de l'UCK. Lors des élections municipales d'octobre 2000, l'échec cinglant du PDK, écrasé par la LDK, avait probablement persuadé certains militants de choisir une stratégie de la confrontation pour retrouver un crédit politique, en «exportant» la question du Kosovo vers le sud de la Serbie et la Macédoine, où des guérillas séparatistes albanaises se sont développées depuis le printemps. La «troisième force», l'Alliance pour l'avenir du Kosovo (AAK), créée par un ancien commandant de l'UCK entré en dissidence, Ramush Haradinaj, a peu de chances de venir troubler le face-à-face entre la LDK et le PDK.
Les inquiétudes de la MINUK
La Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) ne cache pas son inquiétude de voir les violences se généraliser avant le scrutin. En effet, les radicaux du PDK ont a priori tout à perdre de ses élections, qui devraient confirmer la suprématie de la LDK. A titre préventif, les effectifs des troupes de l'OTAN dans la petite province ont été portés de 38000 à 40000 hommes.
La grande inconnue tient cependant toujours à l'attitude des Serbes, des Roms et des autres minorités nationales du Kosovo qui avaient largement boycotté le scrutin municipal de l'an dernier. Le nouveau gouvernement démocrate a poussé à l'inscription des Serbes sur les listes électorales, qu'il s'agisse de ceux qui survivent dans les enclaves du Kosovo ou des déplacés installés en Serbie. Environ 170 000 d'entre eux se sont inscrits, et les autorités de Belgrade pourraient être tentées de se contenter de cette démonstration de force, prouvant l'importance de la communauté serbe au Kosovo, sans prendre part aux élections. La DOS, la coalition majoritaire de Belgrade, a ajourné à plusieurs reprises une réunion qui devait décider de la participation des Serbes, signe que la question est loin de faire l'unanimité au sein de la classe politique serbe.
La porte-parole de la MINUK, Susan Manuel, a rappelé que «les Serbes sont inquiets face aux revendications indépendantistes des leaders albanais, mais le statut final du Kosovo ne sera pas décidé par le parlement car une telle démarche contredirait la résolution 1244 des Nations Unies. Le statut final devra être déterminé par le seul Conseil de sécurité de l'ONU». Mais cette assurance donnée aux Serbes a, justement, tout pour déplaire aux Albanais, qui pourraient se demander quelles seront les réelles compétences du futur parlement. Le statut de protectorat international du Kosovo devrait se prolonger, même s'il suscite l'hostilité des Albanais aussi bien que des Serbes. Dans l'immédiat, les préoccupations internationales consistent à éviter qu'un éventuel boycott serbe et une vague de violences dans le camp albanais n'ôtent toute légitimité au scrutin.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 20/10/2001