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Balkans

Macédoine : moisson accomplie pour l'OTAN

Aujourd'hui la mission de l'OTAN s'achève officiellement sur place mais une nouvelle mission internationale devrait prendre le relais au moment où les premières réformes constitutionnelles sont adoptées donnant plus de droits à la minorité albanaise.
De notre correspondant dans les Balkans

«Un accord de paix a été signé au mois d'août. Personne de sensé ne peut vouloir le remettre en cause. Ce serait faire le choix de la guerre». Responsable des relations internationales du Parlement macédonien, l'Albanais Liman Avdiu se veut optimiste, alors que l'Assemblée de la République vient de ratifier, mardi, les modifications constitutionnelles censées donner plus de droits à la communauté albanaise, 25% des deux millions d'habitants du pays. La langue albanaise sera désormais la seconde langue officielle du pays, et le préambule de la Constitution définira la Macédoine comme un «Etat citoyen», et non plus comme l'Etat-nation des seuls Slaves macédoniens.

Parallèlement au processus politique, la guérilla albanaise a accepté de restituer une partie de son stock d'armement, sous le contrôle de 3500 soldats de l'OTAN. L'opération «Moisson essentielle» de l'Alliance atlantique doit s'achever aujourd'hui, avec un bilan officiellement satisfaisant. Les guérilleros ont restitué un peu plus de 3000 armes. L'opinion et les autorités macédoniennes jugent ce chiffre dérisoire, mais pourraient pourtant s'en accommoder si une nouvelle mission internationale prenait le relais. 120 «vérificateurs» de l'Union européenne et de l'OSCE, épaulés par 700 soldats de l'OTAN, pourraient se déployer rapidement en Macédoine. Alors que les dirigeants macédoniens ont longtemps multiplié les critiques envers toute intervention occidentale, c'est désormais le président de la République, Boris Trajkovski, qui réclame l'arrivée de nouvelles troupes de l'OTAN.

Jusqu'au dernier moment, un groupe de députés macédoniens a tenté de s'opposer aux amendements constitutionnels, qui n'ont été votés que par 61 voix, soit moins que la majorité qualifiée des deux tiers. Les opposants aux réformes réclament toujours la tenue d'un référendum, une revendication que le Macédonien Branko juge «irréaliste» : «On ne peut pas convoquer un référendum alors que le pays compte près de 100000 déplacés. Nos dirigeants ont signé un texte de compromis, il faut l'accepter. La seule urgence, c'est de terminer la guerre». Liman Avdiu ne pense pas autrement : «les nationalistes macédoniens font de la surenchère démagogique en réclamant ce référendum, mais s'ils obtenaient gain de cause, le processus de paix serait suspendu».

L'inquiétude des villageois

La Macédoine est pourtant encore bien loin de la paix. «J'habitais dans le village de Matejce, près de Kumanovo», explique Liman Avdiu. «Ma maison a été détruite, et un barrage de la police m'empêche toujours de rentrer dans mon village». Pour les milliers de déplacés albanais ou macédoniens, l'heure du retour n'a pas encore sonné, et la peur règne toujours dans les zones qui ont été affectées par les combats du printemps et de l'été. «Nous avons perdu toute confiance dans la police», ajoute Liman Avdiu. «Comment envisager que des policiers viennent patrouiller près des villages qu'ils ont eux-mêmes détruits?»

Du point de vue macédonien, le discours est inverse, et beaucoup doutent de la réalité de l'accord de paix, quand 10 à 15% du territoire national se trouvent toujours sous le contrôle exclusif de la guérilla. Les modérés de l'un et l'autre camp ne s'accordent que pour souhaiter la prolongation d'une forte présence internationale.

Ecouter également:
François Léotard, envoyé spécial de l'Union européenne en Macédoine, interrogé par Pierre Ganz



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 26/09/2001