Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Pakistan

La colère de la rue

Situation tendue dans les grandes villes du Pakistan: au moins trois personnes ont été tuées par la police au cours d'affrontements. Les partis radicaux islamistes avaient appelé à une journée de manifestation et de grève nationale pour protester contre les frappes américaines et le soutien d'Islamabad à Washington.
C'est devenu un rituel: chaque vendredi, depuis le début des frappes américaines en Afghanistan le 7 octobre dernier, des centaines de Pakistanais descendent dans la rue pour dire leur colère et manifester leur désaccord avec la décision du président Musharraf de rallier la cause américaine.

Mais ce vendredi qui est aussi le «jour d'Iqbal», anniversaire du poète national, philosophe et figure de l'indépendance du Pakistan, les partis radicaux islamistes, regroupés dans la coalition «Conseil de défense pour l'Afghanistan et le Pakistan», avaient appelé à un mouvement de grève nationale. Cette journée a été le théâtre de très violents affrontements entre manifestants et force de l'ordre. Bilan: trois manifestants ont été tués dans la région de Dera Ghazi Khan, dans le centre du pays, a annoncé la police.

L'incident s'est produit lorsque environ 5000 militants du parti islamiste radical Jamia Ulema-Islam ont bloqué l'autoroute de l'Indus et une voie de chemin de fer, à quelque 500 km au sud-ouest d'Islamabad. Le trafic de trains a été interrompu, quelque 500 manifestants se sont assis sur les rails pour en empêcher la circulation. Selon l'AFP, la police a alors ouvert le feu sur des manifestants armés qui, à leur tour ont riposté, blessant quatre policiers.

Eviter l'embrasement coûte que coûte

Par ailleurs, la police a procédé à de nombreuses interpellations: 250 à Peshawar, dans le nord-ouest, 150 à Karachi dans le sud, 70 à Lahore et une cinquantaine à Rawalpindi. A Peshawar, la police a utilisé des grenades lacrymogènes et a chargé à la matraque des manifestants qui lui jetaient des pierres. Cette journée avait été placée sous haute surveillance. Plus de 550 activistes de différents partis religieux avaient été appréhendés en prévision de ces manifestations afin d'éviter les troubles qui risquaient de survenir après les prières du vendredi après-midi.

Le président Musharraf, qui doit faire face la contestation grandissante de la rue pakistanaise, poursuivait sa tournée à New York, après une étape en Turquie, en Iran, en France et en Grande-Bretagne. Il avait annoncé que les forces de sécurité de son pays étaient déterminées à empêcher tout désordre. «Nous emploierons tous les moyens requis pour que le Pakistan reste pacifique, stable et sûr», avait-il déclaré dans une mise en garde à toute tentative de déstabilisation.

Pièce maîtresse dans l'offensive des occidentaux en Afghanistan, le président Musharraf, réaffirme son engagement aux côtés de la coalition anti-terroriste. Après avoir longtemps soutenu les Taliban, il vient de prendre ses distances avec eux. Dernier geste en date: la fermeture à Karachi du consulat d'Afghanistan.

Le président Musharraf a d'ores et déjà précisé ses conditions pour un futur gouvernement à Kaboul. Il préconise l'absence de membres de l'Alliance du Nord (la résistance afghane d'ethnie tadjik), les Pachtounes étant majoritaires au Pakistan et en Afghanistan. Ancien paria devenu aujourd'hui l'allié des occidentaux, le dirigeant pakistanais a de nouveau exprimé le souhait que cette guerre en Afghanistan soit «rapidement» menée, afin de garder le contrôle de la situation et d'éviter tout embrasement.



par Sylvie  Berruet

Article publié le 09/11/2001