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Afghanistan

L'ONU propose une force multinationale

Le représentant spécial de Kofi Annan pour l'Afghanistan, Lakhdar Brahimi, a soumis au conseil de sécurité un plan en cinq étapes visant à établir l'établissement d'un nouveau gouvernement largement représentatif en Afghanistan. Il déconseille l'envoi de casques bleus de l'ONU et privilégie la constitution d'une force multinationale.
De notre correspondant à New York (Nations Unies)

L'ONU s'est laissée dépasser par les événements. Alors que les diplomates ébauchaient encore mille et un plans pour l'avenir de l'Afghanistan, l'Alliance du Nord est entrée dans Kaboul, instaurant une situation de fait qu'il sera difficile de renverser. Plusieurs membres du conseil de sécurité ont exprimé la crainte d'un scénario identique à celui de 1992, où les différentes factions s'étaient mené une guerre sanglante dont la ville porte toujours les stigmates. Alors que l'ONU est réunie en assemblée générale, pour deux jours encore, le représentant spécial de Kofi Annan en Afghanistan, Lakhdar Brahimi, a exposé son plan de gouvernement transitoire, ébauché au retour de plusieurs tournées dans la région.

Il propose la mise en place d'un gouvernement de transition installé pour deux ans et soutenu par une force multinationale. Selon Lakhdar Brahimi, il faut réunir «aussi rapidement qu'il est humainement possible» les différents groupes ethniques, religieux et régionaux qui constituent la société afghane. Mais selon ses propositions, l'engagement de l'ONU serait minimum. Il a présenté un plan en cinq étapes. Dans un premier temps, un meeting serait organisé dans un lieu non déterminé par l'ONU avec l'Alliance du nord, puis les autres tendances de la société afghane et les différents pays partis au processus de paix. Cette réunion permettrait d'adopter un agenda pour une transition politique.

Dans un deuxième temps, un conseil provisoire serait mis en place «autour d'une autorité symbolisant l'unité nationale». On devine que l'ONU pense à l'ex-roi Zaher Shah. Il serait entouré de représentants de tous les groupes ethniques, religieux et régionaux, avec autant que possible des femmes et des personnes extérieures au conflit armé. Troisièmement, ce conseil provisoire formerait une administration transitoire, pour deux ans maximum, avec un «programme d'action». Cette administration serait quasi exclusivement afghane, car selon Lakhdar Brahimi, «le parachutage massif d'experts internationaux pourrait écraser l'administration transitoire naissante et interférer avec l'édification d'un pouvoir local». Il ne faut donc pas s'attendre à des missions similaires à celles que l'ONU a envoyé au Kosovo ou à Timor.

«Ce n'est pas un rôle pour les casques bleus»

Les questions de sécurité devraient également être réglées par le Conseil provisoire. Dans un quatrième temps, un parlement local, une loya jirga, serait convoquée d'urgence pour approuver ce processus, et autoriser la rédaction d'une constitution. Enfin cinquièmement, après la phase transitoire, une seconde loya jirga serait convoquée pour approuver la constitution et finalement créer, un gouvernement.

Voilà pour le volet politique. Concernant la sécurité, Lakhdar Brahimi a déconseillé l'envoi de casques bleus, dont il connait bien les limites pour les avoir étudiées et en avoir fait un rapport. Selon lui, «il faudrait plusieurs mois au secrétaire général pour obtenir des Etats membres les troupes nécessaires à une dissuasion militaire crédible, puis pour déployer ces troupes». Rappelant que les forces de maintien de la paix de l'ONU se sont avérées plus éfficaces quand elles sont déployées pour faire respecter une solution politique déjà existante que quand elles sont déployées pour servir de substitut à un accord, le représentant de Kofi Annan estime que «toute force de sécurité constituée d'Afghans, de personnel international, ou les deux, qui serait établie en l'absence d'un accord de cessez le feu crédible, ou en l'absence d'un règlement politique, pourrait rapidement se trouver dans une situation de combat. Cela n'est pas un rôle pour les casques bleus».

La meilleure solution selon lui est l'établissement d'une force entièrement afghane. Il faudrait qu'elle soit «crédible, robuste, et largement soutenue par la population afghane». Mais l'établissement d'une telle force prendrait probablement trop de temps, reconnaît le représentant de l'ONU. Il envisage donc la deuxième solution : l'envoi d'une force multinationale, bien armée, et bien entrainée. Elle devrait être «prête à se défendre et à défendre son mandat» pour assurer la sécurité dans les grandes villes. Mais Lakhdar Brahimi n'a pas répondu à la question essentielle : quels pays pourront contribuer à une telle force ? En attendant une réponse, celle du conseil de sécurité, l'adjoint de Lakhdar Brahimi, Francesc Vendrell, doit se rendre à Kaboul dans les plus brefs délais.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 14/11/2001