Monnaie unique européenne
Faux euros: le danger vient de l’Est
Selon Europol, les mafias albanaises du Kosovo et de Macédoine s’apprêtent, début janvier, à «inonder les marchés» avec de faux billets en euros «de bonne qualité». La menace inquiète autant les autorités européennes que les consommateurs. Ceux-ci n’ont aucun recours s’ils récupèrent un faux.
Officiellement, les billets en euros sont les plus sûrs du monde, puisqu’ils comportent pas moins de 63 points de sécurité. Certes. Le problème, explique le commissaire Alain Defer, patron de l'Office central de répression du faux monnayage (OCRFM), c’est que «avec les faux billets, nous sommes dans le domaine de l’illusion. Autrement dit, ce qui importe au faussaire, ce ne sont pas les multiples points de contrôle que seules les banques et la police sont en mesure de vérifier. Ce qui lui importe, c’est la capacité de ses billets à tromper monsieur tout le monde».
Or, voici que la menace se précise. Selon le Financial Times, Europol a déjà repéré dans les Balkans des faux billets de 100 et 200 euros. Willie Bruggeman, directeur adjoint de l’agence policière européenne, précise que, grâce à ses informateurs qui ont pu les voir, ces coupures sont «de bonne qualité». Le danger vient de plusieurs pays d’Europe de l’Est, mais surtout de Macédoine et du Kosovo, deux territoires où les mafias albanaises sont particulièrement actives. La monnaie de référence y était jusqu’ici le deutschmark. Bien que n’appartenant pas à l’Union européenne, ils ont l’intention d’adopter l’euro comme monnaie officielle.
Willie Bruggeman reconnaît que la lutte contre les faussaires est difficile. Il pense que des arrestations auront lieu au début de l’an prochain. Il admet toutefois que si Europol a récemment conclu des accords avec les polices de quelques pays d'Europe de l'Est, ce n’est pas le cas de la Macédoine et du Kosovo. Et le fait que ni l’une ni l’autre ne soient membres de l’UE «rend plus compliqué le démantèlement des réseaux de contrefaçon». D’où les craintes du haut fonctionnaire européen, qui sonnent comme un avertissement : «la menace est imminente (...) les faussaires pourraient inonder les marchés avec la fausse monnaie en janvier».
«Le premier faux, ce sera le 1er janvier à midi»
Voilà donc les consommateurs et les commerçants prévenus. Malgré l’imposant dispositif de surveillance policière, en dépit des appels à l’«eurovigilance» lancés par le ministre français de l’Economie Laurent Fabius, l’irruption de faux billets est quasi certaine dès la mise en circulation de l’euro. Quand le premier apparaîtra-t-il ? «Le 1er janvier à midi», pronostique Ricardo Cases-Ayala, chef du service contrefaçon d'Interpol, sur le ton de la boutade résignée. Il rappelle que lors de l’introduction aux États-Unis du nouveau billet de 100 dollars, le 1er janvier 1996, «le premier faux était présenté dès la mi-journée à la caisse d'un fast-food, dans le Midwest».
«Il y aura beaucoup de contrefaçons durant la première année car il faut 18 mois aux gens pour s'habituer à une nouvelle monnaie», assure le Britannique Jeff Stuart, ancien président de Harrison and Sons, un important imprimeur privé de billets de banque. Difficulté supplémentaire : même les vrais euros présenteront entre eux de légères différences. «Le grand secret de l'uniformisation, selon Jeff Stuart, est d'utiliser un seul fabricant tant pour le papier que pour l'encre. Malheureusement, nous avons pour l'euro quatre fabricants de papier, deux fabricants d'encre, cinq fabricants d'hologrammes et quinze imprimeurs différents. Il ne pourra pas ne pas y avoir des variations entre leurs productions. L'aspect et le toucher du papier seront légèrement différent».
Résultat: de l’eurovigilance, on pourrait passer très vite à l’euroméfiance. Les pouvoirs publics ont beau tenter de rassurer, rien ne court plus vite que les informations ou les rumeurs ayant trait à la monnaie. Le numismate Michel Prieur se souvient de la découverte de faux billets de 500 FF, il y a quelques années. Plus personne n’acceptait ces coupures, même les vraies authentifiées au détecteur. «Pour l’euro, la rumeur sur les faux se propagera très rapidement et très violemment. En effet, elle correspond typiquement aux bases des rumeurs exprimant un discours non conventionnel sur un sujet que l'on ne peut pas exprimer publiquement. Le fait de transmettre une information jugée confidentielle et importante donne un statut d'initié à celui qui la communique».
Quel recours a-t-on si l’on hérite d’un faux billet ? Aucun. Si on le présente à une banque, de bonne foi ou non, il est saisi sans remboursement ni dédommagement. Si on tente de s’en débarrasser auprès d’un commerçant, on prend le risque de voir l’affaire s’envenimer, les ennuis pouvant aller d’un simple refus soupçonneux jusqu’à des poursuites pénales pour recel de contrefaçon. Conclusion : pas de panique, mais de la prudence.
Or, voici que la menace se précise. Selon le Financial Times, Europol a déjà repéré dans les Balkans des faux billets de 100 et 200 euros. Willie Bruggeman, directeur adjoint de l’agence policière européenne, précise que, grâce à ses informateurs qui ont pu les voir, ces coupures sont «de bonne qualité». Le danger vient de plusieurs pays d’Europe de l’Est, mais surtout de Macédoine et du Kosovo, deux territoires où les mafias albanaises sont particulièrement actives. La monnaie de référence y était jusqu’ici le deutschmark. Bien que n’appartenant pas à l’Union européenne, ils ont l’intention d’adopter l’euro comme monnaie officielle.
Willie Bruggeman reconnaît que la lutte contre les faussaires est difficile. Il pense que des arrestations auront lieu au début de l’an prochain. Il admet toutefois que si Europol a récemment conclu des accords avec les polices de quelques pays d'Europe de l'Est, ce n’est pas le cas de la Macédoine et du Kosovo. Et le fait que ni l’une ni l’autre ne soient membres de l’UE «rend plus compliqué le démantèlement des réseaux de contrefaçon». D’où les craintes du haut fonctionnaire européen, qui sonnent comme un avertissement : «la menace est imminente (...) les faussaires pourraient inonder les marchés avec la fausse monnaie en janvier».
«Le premier faux, ce sera le 1er janvier à midi»
Voilà donc les consommateurs et les commerçants prévenus. Malgré l’imposant dispositif de surveillance policière, en dépit des appels à l’«eurovigilance» lancés par le ministre français de l’Economie Laurent Fabius, l’irruption de faux billets est quasi certaine dès la mise en circulation de l’euro. Quand le premier apparaîtra-t-il ? «Le 1er janvier à midi», pronostique Ricardo Cases-Ayala, chef du service contrefaçon d'Interpol, sur le ton de la boutade résignée. Il rappelle que lors de l’introduction aux États-Unis du nouveau billet de 100 dollars, le 1er janvier 1996, «le premier faux était présenté dès la mi-journée à la caisse d'un fast-food, dans le Midwest».
«Il y aura beaucoup de contrefaçons durant la première année car il faut 18 mois aux gens pour s'habituer à une nouvelle monnaie», assure le Britannique Jeff Stuart, ancien président de Harrison and Sons, un important imprimeur privé de billets de banque. Difficulté supplémentaire : même les vrais euros présenteront entre eux de légères différences. «Le grand secret de l'uniformisation, selon Jeff Stuart, est d'utiliser un seul fabricant tant pour le papier que pour l'encre. Malheureusement, nous avons pour l'euro quatre fabricants de papier, deux fabricants d'encre, cinq fabricants d'hologrammes et quinze imprimeurs différents. Il ne pourra pas ne pas y avoir des variations entre leurs productions. L'aspect et le toucher du papier seront légèrement différent».
Résultat: de l’eurovigilance, on pourrait passer très vite à l’euroméfiance. Les pouvoirs publics ont beau tenter de rassurer, rien ne court plus vite que les informations ou les rumeurs ayant trait à la monnaie. Le numismate Michel Prieur se souvient de la découverte de faux billets de 500 FF, il y a quelques années. Plus personne n’acceptait ces coupures, même les vraies authentifiées au détecteur. «Pour l’euro, la rumeur sur les faux se propagera très rapidement et très violemment. En effet, elle correspond typiquement aux bases des rumeurs exprimant un discours non conventionnel sur un sujet que l'on ne peut pas exprimer publiquement. Le fait de transmettre une information jugée confidentielle et importante donne un statut d'initié à celui qui la communique».
Quel recours a-t-on si l’on hérite d’un faux billet ? Aucun. Si on le présente à une banque, de bonne foi ou non, il est saisi sans remboursement ni dédommagement. Si on tente de s’en débarrasser auprès d’un commerçant, on prend le risque de voir l’affaire s’envenimer, les ennuis pouvant aller d’un simple refus soupçonneux jusqu’à des poursuites pénales pour recel de contrefaçon. Conclusion : pas de panique, mais de la prudence.
par Philippe Quillerier-Lesieur
Article publié le 18/12/2001