Monnaie unique européenne
Cent mille supplétifs pour éviter le bogue
Afin d'amortir le choc du passage à l'euro, le 1er janvier 2002, les banques et les hypermarchés vont recruter temporairement des dizaines de milliers de personnes chargées d'aider les consommateurs.
«Je ne veux pas que nos caissières et les guichetiers des banques soient les boucs émissaires des ratages de l'euro», déclarait voilà quelques mois Michel-Edouard Leclerc. Le plus médiatique des patrons d'hypermarchés se répandait dans la presse, stigmatisant l'insouciance des pouvoirs publics face à l'impréparation de l'économie française et le manque d'information des consommateurs. Il demandait que l'euro soit décrété «grande cause nationale» et que les hommes politiques développent un «discours de nature à créer, sinon l'enthousiasme, du moins l'adhésion à la monnaie unique». Dans le cas contraire, disait-il, le passage à l'euro pourrait se «transformer en une crise majeure».
Aujourd'hui, lui et ses collègues de la grande distribution concèdent que, globalement, des progrès ont été faits en matière de communication officielle. Mais c'est sur le terrain que tout va se jouer. Début janvier, l'irruption de l'euro dans les porte-monnaie de 300 millions d'Européens pourrait engendrer quelques désordres. Dans les têtes, d'abord, à cause du choc psychologique et des problèmes de conversion (1 euro = 6,55957 FF). Devant les caisses et les guichets, ensuite. Confusion, erreurs, incompréhension, méfiance, lenteurs et contestations risquent de ne pas déchaîner une ferveur populaire déjà peu débordante. Avec des conséquences néfastes sur le chiffre d'affaires.
«Il faut éviter les discussions en caisses»
Pour limiter les risques et les files d'attente, les établissement financiers et la grande distribution, deux secteurs qui vont se trouver en première ligne, ont donc décidé d'embaucher prochainement des «ambassadeurs de l'euro». C'est l'appellation choisie par les hypermarchés Casino. Ces 1300 diplomates temporaires, placés «derrière les caisses», seront chargés d'avertir les clients que la monnaie sera rendue en euros, de détecter les problèmes, de répondre aux réticents, et le cas échéant de résoudre les litiges. «Notre problème est d'éviter les discussions en caisses», s'inquiète Jérôme Bédier, président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD). Craignant que les clients soient insensibles au charme ludique du changement de monnaie, il prévient: «Il faut que les Français eux aussi jouent le jeu, et non que les caissières les forment à l'euro».
Chez Carrefour, quelque 5 000 employés vont épauler le personnel des caisses. Un tiers d'entre eux viendront du siège du groupe, un tiers des magasins, les autres étant embauchés sous contrat à durée déterminée (CDD) ou contrat étudiant. Afin de sentir pleinement le vent de l'histoire, «des personnes du siège sont volontaires pour vivre dans les magasins cet événement extraordinaire», commente Régis de Courtilloles, l'un des responsables euro de la société. Chez Auchan, on les appelle déjà les «gilets bleus», en référence à la couleur du drapeau européen. Au total, le secteur de la grande distribution s'apprête à recruter 50 000 personnes.
Dans la banque, on n'est pas en reste. Ainsi, le groupe BNP Paribas a réuni, samedi 17 novembre à Paris, les
5 000 étudiants qu'il a embauchés. Baptisés «euro angels» (anges de l'euro), ils auront pour mission de «décrocher l'euro», selon l'offre d'emploi qui, dans une allégorie céleste, affiche un croissant de lune barré horizontalement. Plus simple, la RATP (transports parisiens) a lancé sa campagne «un coup de pouce pour l'euro». C'est à ses guichets qu'auront lieu les toutes premières transactions en euros, certaines lignes de RER ouvrant à 5h00 du matin. La régie prévoit la mobilisation de 1 200 stagiaires ou volontaires pour aider les voyageurs à effectuer leurs premiers paiements. A La Poste, où l'on accueille de nombreuses personnes âgées, jugées «plus fragiles», ce sont 3 000 jeunes intérimaires qu'on va recruter, sans compter les quelque 1 000 retraités volontaires qui reprendront du service.
La mise en place de ces dispositifs exceptionnels devraient éviter que le passage à l'euro ne tourne au cauchemar. Toutefois, le ministre de l'Economie Laurent Fabius reconnaît lui même qu'«il reste des difficultés». Seuls 9% des Français savent que c'est le 17 février que le franc va disparaître, a-t-il déclaré la semaine dernière à l'Assemblée nationale. «Et 48% d'entre eux croient encore qu'on peut payer par chèque en francs après le 1er janvier». Pour l'information et la préparation, a-t-il dit, «il faut donc forcer l'allure».
Aujourd'hui, lui et ses collègues de la grande distribution concèdent que, globalement, des progrès ont été faits en matière de communication officielle. Mais c'est sur le terrain que tout va se jouer. Début janvier, l'irruption de l'euro dans les porte-monnaie de 300 millions d'Européens pourrait engendrer quelques désordres. Dans les têtes, d'abord, à cause du choc psychologique et des problèmes de conversion (1 euro = 6,55957 FF). Devant les caisses et les guichets, ensuite. Confusion, erreurs, incompréhension, méfiance, lenteurs et contestations risquent de ne pas déchaîner une ferveur populaire déjà peu débordante. Avec des conséquences néfastes sur le chiffre d'affaires.
«Il faut éviter les discussions en caisses»
Pour limiter les risques et les files d'attente, les établissement financiers et la grande distribution, deux secteurs qui vont se trouver en première ligne, ont donc décidé d'embaucher prochainement des «ambassadeurs de l'euro». C'est l'appellation choisie par les hypermarchés Casino. Ces 1300 diplomates temporaires, placés «derrière les caisses», seront chargés d'avertir les clients que la monnaie sera rendue en euros, de détecter les problèmes, de répondre aux réticents, et le cas échéant de résoudre les litiges. «Notre problème est d'éviter les discussions en caisses», s'inquiète Jérôme Bédier, président de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD). Craignant que les clients soient insensibles au charme ludique du changement de monnaie, il prévient: «Il faut que les Français eux aussi jouent le jeu, et non que les caissières les forment à l'euro».
Chez Carrefour, quelque 5 000 employés vont épauler le personnel des caisses. Un tiers d'entre eux viendront du siège du groupe, un tiers des magasins, les autres étant embauchés sous contrat à durée déterminée (CDD) ou contrat étudiant. Afin de sentir pleinement le vent de l'histoire, «des personnes du siège sont volontaires pour vivre dans les magasins cet événement extraordinaire», commente Régis de Courtilloles, l'un des responsables euro de la société. Chez Auchan, on les appelle déjà les «gilets bleus», en référence à la couleur du drapeau européen. Au total, le secteur de la grande distribution s'apprête à recruter 50 000 personnes.
Dans la banque, on n'est pas en reste. Ainsi, le groupe BNP Paribas a réuni, samedi 17 novembre à Paris, les
5 000 étudiants qu'il a embauchés. Baptisés «euro angels» (anges de l'euro), ils auront pour mission de «décrocher l'euro», selon l'offre d'emploi qui, dans une allégorie céleste, affiche un croissant de lune barré horizontalement. Plus simple, la RATP (transports parisiens) a lancé sa campagne «un coup de pouce pour l'euro». C'est à ses guichets qu'auront lieu les toutes premières transactions en euros, certaines lignes de RER ouvrant à 5h00 du matin. La régie prévoit la mobilisation de 1 200 stagiaires ou volontaires pour aider les voyageurs à effectuer leurs premiers paiements. A La Poste, où l'on accueille de nombreuses personnes âgées, jugées «plus fragiles», ce sont 3 000 jeunes intérimaires qu'on va recruter, sans compter les quelque 1 000 retraités volontaires qui reprendront du service.
La mise en place de ces dispositifs exceptionnels devraient éviter que le passage à l'euro ne tourne au cauchemar. Toutefois, le ministre de l'Economie Laurent Fabius reconnaît lui même qu'«il reste des difficultés». Seuls 9% des Français savent que c'est le 17 février que le franc va disparaître, a-t-il déclaré la semaine dernière à l'Assemblée nationale. «Et 48% d'entre eux croient encore qu'on peut payer par chèque en francs après le 1er janvier». Pour l'information et la préparation, a-t-il dit, «il faut donc forcer l'allure».
par Philippe Quillerier-Lesieur
Article publié le 19/11/2001