Etats-Unis
Parfum de scandale à la Maison Blanche
La faillite spectaculaire d'Enron risque d'éclabousser l'administration Bush. Le géant du courtage en énergie était le plus généreux donateur de la campagne électorale du président Américain et de certains de ses proches collaborateurs. Plusieurs enquêtes ont été ouvertes pour déterminer si Enron a fait l'objet de favoritisme.
De notre correspondant à New York
Ce pourrait bien être la fin de la trêve politique ouverte par les attentats du 11 septembre. Tous les éléments sont en tous les cas réunis pour un scandale classique : argent, pouvoir, fraude et politique. Des documents qui disparaissent. Des appels à l'aide. Des puissants qui font fortune et des employés qui perdent tout. Enron était le numéro un mondial du courtage en énergie. Subitement, en décembre dernier, il déclare sa banqueroute, laissant sur le carreau des milliers d'employés incrédules. La plus grave faillite que le pays ait jamais connu. Alors que le groupe s'effondre, des dirigeants vendent pour près de un milliard de dollars d'actions de la compagnie, tout en empêchant leurs employés d'en faire autant. Des milliers d'entre eux perdent les économies d'une vie et même leur épargne retraite.
Or, Enron n'est pas n'importe quelle compagnie. C'est le principal contributeur à la campagne de George W. Bush. Kenneth Lay, le PDG d'Enron, est un proche des Bush depuis des années. Avant de soutenir Bush fils, il a financé le père. Au cours de la dernière campagne présidentielle, il lui est même arrivé de prêter son jet privé à Bush junior. En 1999 déjà, les médias s'étaient penchés sur les relation de Bush, alors gouverneur du Texas, avec Enron : les usines texanes du groupe avaient été exemptées d'une nouvelle loi anti-pollution. Mais alors que l'affaire Enron continue de faire des remous, les liens du groupe avec l'administration Bush deviennent plus apparents. Et la question se pose : les responsables d'Enron ont-ils bénéficié d'un traitement de faveur ?
Cheney a rencontré six fois les responsables d’Enron
En octobre dernier, alors que la faillite menaçait, le président d'Enron, Lawrence «Greg» Whalley, a appelé six à huit fois le sous-secrétaire au trésor Peter Fisher pour le convaincre de faire patienter les banques créancières du groupe. En vain, selon l'administration Bush. Le patron d'Enron, Kenneth Lay, a également rencontré par deux fois George Bush l'an dernier, mais sans lui parler des difficultés de son groupe, selon la Maison Blanche. Lay a également contacté le secrétaire au Commerce Don Evans, le secrétaire du Trésor Paul O'Neill et le président de la Fed Alan Greenspan, sans leur demander leur aide affirme-t-il. La Maison blanche de son côté assure que ces appels sont intervenus alors que l'affaire Enron était déjà connue du public. Mieux. Le vice-président Dick Cheney a rencontré l'année dernière à six reprises des responsables d'Enron, alors qu'il préparait la réforme de la politique énergétique du pays. Il devra s'en expliquer. Même un des plus proches conseillers de Bush, Karl Rove, a détenu pour près de 100 000 dollars de stocks d'Enron.
La faillite du mastodonte a révélé des pratiques comptables suspectes, voire des escroqueries. Logiquement, le ministère de la justice a ouvert une enquête criminelle. Et là surprise : le ministre de la justice John Ashcroft s'en démarque aussitôt. Lui aussi a reçu des milliers de dollars d'Enron lors de sa campagne pour les sénatoriales en 2000 et ne veut donc pas être suspecté de parti-pris. Autre élément pour le moins curieux, le cabinet Arthur Andersen, qui était chargé de mener un audit indépendant du groupe, a avoué avoir détruit de nombreux éléments du dossier Enron. La question de savoir si le cabinet avait «couvert» les dissimulations comptables d'Enron était déjà posée.
Outre le département de la justice, la Securities and Exchange Commission (Commission des Opérations en bourse, le gendarme de Wall Street) mène sa propre enquête. Quatre commissions parlementaires se sont également saisies du dossier, avec dans l'idée de traquer les possibles conflits d'intérêt entre l'administration et les financiers et même si des dizaines de parlementaires ont eux aussi reçu des financements de Enron. Kenneth Lay «a soutenu ma candidature», a reconnu George W. Bush, «mais cette administration va pleinement enquêter sur des problèmes comme la faillite d'Enron pour s'assurer qu'on tire les leçons du passé et que les travailleurs soient protégés». Il peut être sûr que les médias américains, qui évoquent avec délice les souvenirs de l'ère Clinton, vont s'en assurer.
Ce pourrait bien être la fin de la trêve politique ouverte par les attentats du 11 septembre. Tous les éléments sont en tous les cas réunis pour un scandale classique : argent, pouvoir, fraude et politique. Des documents qui disparaissent. Des appels à l'aide. Des puissants qui font fortune et des employés qui perdent tout. Enron était le numéro un mondial du courtage en énergie. Subitement, en décembre dernier, il déclare sa banqueroute, laissant sur le carreau des milliers d'employés incrédules. La plus grave faillite que le pays ait jamais connu. Alors que le groupe s'effondre, des dirigeants vendent pour près de un milliard de dollars d'actions de la compagnie, tout en empêchant leurs employés d'en faire autant. Des milliers d'entre eux perdent les économies d'une vie et même leur épargne retraite.
Or, Enron n'est pas n'importe quelle compagnie. C'est le principal contributeur à la campagne de George W. Bush. Kenneth Lay, le PDG d'Enron, est un proche des Bush depuis des années. Avant de soutenir Bush fils, il a financé le père. Au cours de la dernière campagne présidentielle, il lui est même arrivé de prêter son jet privé à Bush junior. En 1999 déjà, les médias s'étaient penchés sur les relation de Bush, alors gouverneur du Texas, avec Enron : les usines texanes du groupe avaient été exemptées d'une nouvelle loi anti-pollution. Mais alors que l'affaire Enron continue de faire des remous, les liens du groupe avec l'administration Bush deviennent plus apparents. Et la question se pose : les responsables d'Enron ont-ils bénéficié d'un traitement de faveur ?
Cheney a rencontré six fois les responsables d’Enron
En octobre dernier, alors que la faillite menaçait, le président d'Enron, Lawrence «Greg» Whalley, a appelé six à huit fois le sous-secrétaire au trésor Peter Fisher pour le convaincre de faire patienter les banques créancières du groupe. En vain, selon l'administration Bush. Le patron d'Enron, Kenneth Lay, a également rencontré par deux fois George Bush l'an dernier, mais sans lui parler des difficultés de son groupe, selon la Maison Blanche. Lay a également contacté le secrétaire au Commerce Don Evans, le secrétaire du Trésor Paul O'Neill et le président de la Fed Alan Greenspan, sans leur demander leur aide affirme-t-il. La Maison blanche de son côté assure que ces appels sont intervenus alors que l'affaire Enron était déjà connue du public. Mieux. Le vice-président Dick Cheney a rencontré l'année dernière à six reprises des responsables d'Enron, alors qu'il préparait la réforme de la politique énergétique du pays. Il devra s'en expliquer. Même un des plus proches conseillers de Bush, Karl Rove, a détenu pour près de 100 000 dollars de stocks d'Enron.
La faillite du mastodonte a révélé des pratiques comptables suspectes, voire des escroqueries. Logiquement, le ministère de la justice a ouvert une enquête criminelle. Et là surprise : le ministre de la justice John Ashcroft s'en démarque aussitôt. Lui aussi a reçu des milliers de dollars d'Enron lors de sa campagne pour les sénatoriales en 2000 et ne veut donc pas être suspecté de parti-pris. Autre élément pour le moins curieux, le cabinet Arthur Andersen, qui était chargé de mener un audit indépendant du groupe, a avoué avoir détruit de nombreux éléments du dossier Enron. La question de savoir si le cabinet avait «couvert» les dissimulations comptables d'Enron était déjà posée.
Outre le département de la justice, la Securities and Exchange Commission (Commission des Opérations en bourse, le gendarme de Wall Street) mène sa propre enquête. Quatre commissions parlementaires se sont également saisies du dossier, avec dans l'idée de traquer les possibles conflits d'intérêt entre l'administration et les financiers et même si des dizaines de parlementaires ont eux aussi reçu des financements de Enron. Kenneth Lay «a soutenu ma candidature», a reconnu George W. Bush, «mais cette administration va pleinement enquêter sur des problèmes comme la faillite d'Enron pour s'assurer qu'on tire les leçons du passé et que les travailleurs soient protégés». Il peut être sûr que les médias américains, qui évoquent avec délice les souvenirs de l'ère Clinton, vont s'en assurer.
par Philippe Bolopion
Article publié le 12/01/2002