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Zimbabwe

L’opposition traquée

Dimanche soir, au terme de deux journées de vote, de longues files d’électeurs attendaient toujours à Harare, la capitale. A la demande du Mouvement démocratique pour le changement (MDC), la Cour suprême a permis la prolongation des opérations de vote pendant la journée de lundi.
De notre envoyée spéciale

Lundi matin, les bureaux de vote ont ouvert, sans pour autant opérer. Face à cette confusion, Morgan Tsvangirai, le grand rival du président sortant Robert Mugabe, s’est montré très pessimiste. Alors qu’il soufflait, la veille, les 50 bougies d’un gâteau d’anniversaire en forme de palais présidentiel, le président du MDC a évoqué «sa grande déception» vis-à-vis d’une «élection mort-née». Visiblement ému, Morgan Tsvangirai a ouvertement parlé des menaces de mort qui planent sur lui. «Ils pourraient m’arrêter et pire, me tuer, a-t-il déclaré, mais ils ne détruiront jamais la volonté du peuple de recouvrer son pouvoir». II a appelé ses troupes à «ne pas répondre aux provocations» des autorités, et n’a pas voulu faire de commentaires sur l’arrestation, quelques heures plus tôt, au sud-ouest du pays, du secrétaire général de son parti Welshman Ncube.

Nouvelle manipulation de Robert Mugabe dans la guerre psychologique déclarée à l’opposition ? Quelques minutes après la conférence de presse de Morgan Tsvangirai, les électeurs étaient de nouveau autorisés à voter… Le discours de vaincu formulé par le chef de l’opposition semble avoir sonné le glas des espoirs du MDC, avant même que les opérations de dépouillement des voix aient commencé. La raison en paraît toute simple : la peur.

Tsvangirai risque la condamnation à mort

Inculpé pour haute trahison deux semaines avant le scrutin, en raison d’un prétendu complot en vue d’assassiner Robert Mugabe, Morgan Tsvangirai risque la condamnation à mort. Il craint désormais pour sa vie. Il a quitté son domicile et s’est installé dimanche au dernier étage d’un grand hôtel de la capitale.

De son côté, le Réseau soutien électoral du Zimbabwe (ZESN), n’a cessé de déploré les violences et les intimidations du parti au pouvoir, recensées à travers le pays. Sur les 16.000 observateurs formés par ce collectif d’organisations non-gouvernementales nationales (ONG), seulement 400 ont été accrédités par les autorités. Les autres ont été tenus à une distance respectueuse des bureaux de vote -les 100 mètres prévus par le code électoral.

«Les listes électorales sont complètement frauduleuses, a déploré Reginald Machaba-Hove, le président du ZESN. Elles n’ont pas été publiées et ont pu être modifiées au gré du gouvernement jusqu’à la veille des élections». Déjà, dimanche, des chiffres contradictoires étaient annoncés par le MDC et l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF), le parti au pouvoir. Alors que le MDC estime l’électorat urbain à 3,4 millions d’électeurs et celui des zones rurales à 2,2 millions, un équilibre qui penche en sa faveur, le pouvoir a annoncé exactement l’inverse, 2,2 millions dans les villes et 3,4 millions dans les campagnes.



par Sabine  Cessou

Article publié le 11/03/2002