Logiciels
Brevets logiciels : les associations montent au créneau
La Commission européenne envisage d’établir, comme les Etats-Unis, la brevetabilité sur les logiciels en Europe. Ce projet de directive soulève l'inquiétude de nombreuses associations.
Les grandes manoeuvres autour des brevets logiciels ont de quoi inquiéter les acteurs de l’industrie européenne. Depuis deux ans, la Commission européenne propose de remettre en cause la non brevetabilité des logiciels. Elle vient d’en publier l’avant-projet. Il ressort de ce document qu’aucune limite claire ne sera dorénavant imposée pour les brevets sur les programmes d’ordinateur.
Si l'on en croit la Commission européenne, cette future directive est un bon compromis. En réalité, ce projet de directive qui résulte d’une négociation entre différents pays, n’échappe pas aux contradictions. Selon cette proposition, on ne peut pas breveter un logiciel en tant que tel, mais le texte introduit dans ses commentaires des ambiguïtés comme l’explique François Leveque, professeur de droit et économie à l’école des Mines de Paris: «dans les commentaires, il est dit que l’on pourra exclure les méthodes commerciales liées à la technique. Résultat : on peut déposer un brevet sur une méthode commerciale avec un volet technique.» Ils subsistent beaucoup d’autres ambiguïtés. Le document dit que toute idée «implémentée via ordinateur» en soi «appartient au champ de la technologie» est ainsi une invention brevetable. Un algorithme n’est pas brevetable en soi, mais le devient s’il prend la forme d’«une séquence d’actions exécutées sur un appareil tel qu’un ordinateur».
Avec ce texte, la Commission signerait également la fin de la spécificité européenne dans le droit des logiciels. Car contrairement aux Etats-Unis, les logiciels en Europe sont juridiquement protégés par le droit d’auteur, en tant qu’œuvre littéraire par la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. Le droit d’auteur est devenu ainsi le droit commun des logiciels. Quelle différence entre droit d’auteur et brevet ? Le droit d’auteur s’occupe d’un programme en particulier. Le brevet, beaucoup plus restrictif, s’applique à une méthode ou à une fonctionnalité dans un programme ou dans l’interface. Il existe, par exemple, aux Etats-Unis des brevets sur des méthodes très simples comme un algorithme de compression, le clignotement d’un curseur ou bien encore sur une méthode de fenêtrage.
La résistance s'organise
Pour Eurolinux, un collectif européen qui regroupe des acteurs du shareware, le brevet est un moyen d’empêcher l’innovation et la concurrence. Dans son communiqué, Eurolinux met en cause également «la neutralité de la Commission». Elle lui reproche d’avoir fait participé à la rédaction de la directive un membre de la BSA (Business Solftware Alliance), un groupe d’intérêt de sociétés américaines sous le contrôle de Microsoft, qui pratique le lobboying agressif contre les entreprises européennes.
Même constat de la part de Christian Pierret, ministre délégué à l'Industrie, aux PME, au Commerce, à l'Artisanat et à la Consommation. Pour lui, il s’agit avant tout, avec cette directive, de freiner l’effort d’innovation : «Le gouvernement français souhaite écarter tout projet qui aurait des conséquences négatives pour l'innovation, pour l’interopérabilité et les logiciels libres, et pour l’ensemble des acteurs (éditeurs, intégrateurs, utilisateurs), notamment les PME.»
Reste que les brevets logiciels ouvrent la porte à de nouveaux modèles d’affaires. En effet, le brevet est un titre pour revendiquer un droit de propriété. C’est aujourd’hui une véritable monnaie d’échange (via le «cross licensing») qui représente un avantage concurrentiel. Des pays comme les Etats-Unis et le Japon ont pris le leadership, et l’Europe ne doit pas rester à la traîne, avancent les spécialistes en propriété industrielle. Un débat fort complexe qui va continuer de mobiliser dans les prochains mois les acteurs du logiciel en Europe.
Si l'on en croit la Commission européenne, cette future directive est un bon compromis. En réalité, ce projet de directive qui résulte d’une négociation entre différents pays, n’échappe pas aux contradictions. Selon cette proposition, on ne peut pas breveter un logiciel en tant que tel, mais le texte introduit dans ses commentaires des ambiguïtés comme l’explique François Leveque, professeur de droit et économie à l’école des Mines de Paris: «dans les commentaires, il est dit que l’on pourra exclure les méthodes commerciales liées à la technique. Résultat : on peut déposer un brevet sur une méthode commerciale avec un volet technique.» Ils subsistent beaucoup d’autres ambiguïtés. Le document dit que toute idée «implémentée via ordinateur» en soi «appartient au champ de la technologie» est ainsi une invention brevetable. Un algorithme n’est pas brevetable en soi, mais le devient s’il prend la forme d’«une séquence d’actions exécutées sur un appareil tel qu’un ordinateur».
Avec ce texte, la Commission signerait également la fin de la spécificité européenne dans le droit des logiciels. Car contrairement aux Etats-Unis, les logiciels en Europe sont juridiquement protégés par le droit d’auteur, en tant qu’œuvre littéraire par la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. Le droit d’auteur est devenu ainsi le droit commun des logiciels. Quelle différence entre droit d’auteur et brevet ? Le droit d’auteur s’occupe d’un programme en particulier. Le brevet, beaucoup plus restrictif, s’applique à une méthode ou à une fonctionnalité dans un programme ou dans l’interface. Il existe, par exemple, aux Etats-Unis des brevets sur des méthodes très simples comme un algorithme de compression, le clignotement d’un curseur ou bien encore sur une méthode de fenêtrage.
La résistance s'organise
Pour Eurolinux, un collectif européen qui regroupe des acteurs du shareware, le brevet est un moyen d’empêcher l’innovation et la concurrence. Dans son communiqué, Eurolinux met en cause également «la neutralité de la Commission». Elle lui reproche d’avoir fait participé à la rédaction de la directive un membre de la BSA (Business Solftware Alliance), un groupe d’intérêt de sociétés américaines sous le contrôle de Microsoft, qui pratique le lobboying agressif contre les entreprises européennes.
Même constat de la part de Christian Pierret, ministre délégué à l'Industrie, aux PME, au Commerce, à l'Artisanat et à la Consommation. Pour lui, il s’agit avant tout, avec cette directive, de freiner l’effort d’innovation : «Le gouvernement français souhaite écarter tout projet qui aurait des conséquences négatives pour l'innovation, pour l’interopérabilité et les logiciels libres, et pour l’ensemble des acteurs (éditeurs, intégrateurs, utilisateurs), notamment les PME.»
Reste que les brevets logiciels ouvrent la porte à de nouveaux modèles d’affaires. En effet, le brevet est un titre pour revendiquer un droit de propriété. C’est aujourd’hui une véritable monnaie d’échange (via le «cross licensing») qui représente un avantage concurrentiel. Des pays comme les Etats-Unis et le Japon ont pris le leadership, et l’Europe ne doit pas rester à la traîne, avancent les spécialistes en propriété industrielle. Un débat fort complexe qui va continuer de mobiliser dans les prochains mois les acteurs du logiciel en Europe.
par Myriam Berber
Article publié le 08/03/2002 Dernière mise à jour le 09/03/2005 à 17:33 TU