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Timor-oriental

Le nouveau combat de Xanana Gusmão

Avec près de 83% de voix, Xanana Gusmão a été élu sans surprise Président du Timor-oriental. Un quasi plébiscite qui lui donne la légitimité dont il avait besoin pour mener à bien le quinquennat qui s’ouvre devant lui.
De notre correspondant à Dili

«Si je suis élu, je serais votre bouche, je serais vos oreilles» lançait Xanana Gusmão durant ses meetings de campagne électorale. Le candidat parcourait alors le pays en rappelant notamment que le Président, selon la nouvelle constitution est: «le symbole et le garant de l’indépendance nationale, de l’unité de l’Etat et du fonctionnement des institutions démocratiques». «Laissons tomber le symbole» clamait Gusmão, «je veux être votre garantie».

Plus qu’une improbable soif de pouvoir, c’est la volonté de servir son peuple qui le porte aujourd’hui au sommet de l’Etat. Le papa d’un petit garçon de 3 ans, à 55 ans, aurait bien volontiers déposé les armes. Le sens du devoir fut le plus fort. A commencer par le devoir de bâtir un Etat démocratique.

Son programme, il le résumait ainsi il y a quelques jours: «Avant tout, les gens doivent avoir les clefs pour comprendre ce qu’est la démocratie. C’est difficile. Cela doit nécessairement passer, au niveau individuel, par une phase d’éducation culturelle et sociale. La liberté, la tolérance, le respect mutuel sont également nécessaires au bon fonctionnement de cette démocratie. Ces valeurs devraient pouvoir apporter la stabilité dans notre pays, et ensuite nous pourrons nous développer». Un développement économique qui passe par l’ouverture. A l’ère de la mondialisation, Gusmão espère attirer au Timor des entreprises étrangères. Celles-ci apporteront ainsi des capitaux, mais aussi des compétences qui font toujours autant défaut dans le pays.

Xanana Gusmão incarne l’Etat naissant

Toutefois, dans ses nouvelles fonctions, il sait que son rôle sera limité. Les commandes du pouvoirs sont détenues par l’Assemblée élue en août dernier et par le gouvernement qui en est issu. Deux institutions dominées par le parti Fretilin. Entre les dirigeants de ce parti et Xanana Gusmão, les dissensions sont notoires. A preuve, ce mercredi, jour de la victoire de Gusmão, le Premier Ministre Mari Alkatiri, membre du Fretilin, entame son discours par : «Certains ne vont pas me croire…» avant d’adresser ses félicitations au vainqueur. Le terme de «cohabitation» est évoqué, le chef du gouvernement le rejette, assurant qu’il fera tout son possible pour «cimenter l’unité démocratique», en travaillant de concert avec Xanana Gusmão. Il n’empêche, grâce à sa large victoire, le nouveau Président, élu sans étiquette, dispose d’une légitimité, qu’il lui était essentielle d’obtenir dans un tel contexte.

Plus que le garant de l’unité nationale, plus que le chef des armées, Xanana Gusmão est ce leader dont avait incontestablement besoin l’Etat naissant du Timor-oriental. Un Etat inévitablement fragile auquel il apporte sans conteste son charisme, ses convictions, et la force de son investissement passé.

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par Cyril  Bousquet

Article publié le 18/04/2002