Timor-oriental
Xanana Gusmão : de la guérilla vers le sommet de l’Etat
Le 14 avril prochain, près de 600,000 Timorais sont appelés aux urnes pour élire leur Président de la République. Face à Gusmão, le héros de la guerre d’indépendance, un seul prétendant : Francisco Xavier do Amaral. Lancée depuis 10 jours, et marquée par quelques polémiques partisanes, la campagne électorale se déroule toutefois dans un grand calme.
De notre correspondant au Timor oriental
Le Timor-Oriental s’apprête à élire son premier Président de la République. Son premier ? Non ! La constitution du pays, proclamée il y a moins d’une semaine, l’énonce dès son second alinéa. Le Timor-Oriental est devenu indépendant le 28 novembre 1975. Or, entre ce jour-là et l’invasion indonésienne, 9 jours plus tard, le Timor oriental a eu un éphémère Président de la République : Francisco Xavier do Amaral. Celui-là même qui présente aujourd’hui sa candidature à l’élection présidentielle face au célèbre Xanana Gusmão.
Xanana Gusmão, l’homme de la résistance, le symbole de la lutte armée s’est déclaré au mois d’août dernier, après avoir beaucoup hésité : «Les anciens guérilleros font de mauvais hommes politiques affirmait-il, je suis conscient de ne pas être la personne la plus qualifiée pour ce poste». Il se disait fatigué après 25 années de lutte, dont sept passées en prison. A 55 ans, il soutenait vouloir jardiner, se consacrer à la photographie, et offrir son temps à sa femme et à son jeune fils. Mais après avoir porté les espoirs de son peuple durant tant d’années, «Xanana» ainsi que tout le monde l’appelle ici, ne voulait pas, ne pouvait pas le décevoir.
«Quand les gens mouraient, Amaral n’était pas là !»
Xavier do Amaral n’a pas la notoriété du héros de la lutte pour l’indépendance, son nom n’est pas tracé à la peinture noire sur les murs du pays, il n’en reste pas moins un homme politique de premier plan. Il entend par conséquent démentir la rumeur prétendant qu’il ne se présente que pour servir d’adversaire à Xanana Gusmão, et de gage à cette démocratie naissante. Vice-président de l’Assemblée constituante élue en août dernier, fondateur dès 1975 d’un parti politique, l’Association sociale démocratique timoraise, qu’il dirige toujours, le premier président du Timor indépendant, âgé de 65 ans, a plus d’expérience politique que son adversaire. Toutefois, son rôle trouble durant l’occupation indonésienne et son exil contraint ou délibéré à Djakarta durant toute cette période, s’ils lui sont aujourd’hui pardonnés, n’ont pas été oubliés. «Quand les gens mouraient, quand il fallait se battre, il n’était pas là !» résume Marcelina, une timoraise âgée de 30 ans.
Aujourd’hui, on veut effacer le souvenir de cette guerre, de ces dissensions voire de ces trahisons. Les mots «réconciliation» et «unité nationale» sont ceux qui dominent la campagne électorale. Pas de grand programme ou de thèmes électoraux précis, «de toute façon nous expliquent les état-majors des candidats, la constitution récemment proclamée ne confère au président que des pouvoirs limités». En clair ce sont l’Assemblée et le gouvernement qui en est issu qui choisiront, et conduiront la politique du pays.
Avec 54 membres sur 88 à l’Assemblée, le parti Fretilin domine largement cette vie politique timoraise, or il ne soutient officiellement aucun des deux candidats. Ce soutien aurait dû être normalement dévolu à Xanana Gusmão, qui se présente sans étiquette, mais des tractations compliquées, de vieilles querelles, sont venues jeter un trouble sur cette entente. En résulte une situation un peu surprenante qui pourrait voir certains membres du Fretilin appeler à voter Amaral.
Les deux principaux intéressés, quant à eux, se respectent, et chacun qualifie la campagne de « saine ». A l’heure actuelle, celle-ci se caractérise de part et d’autre par une classique tournée nationale. Une campagne d’autant plus calme que, victime d’une pneumonie, Xavier do Amaral est en convalescence après une hospitalisation. Ici, pas d’affiches dans les rues ou de spots publicitaires, le plus gros travail de communication est en fait celui effectué par la Commission électorale indépendante –le pays est toujours sous tutelle onusienne- afin d’expliquer aux habitants les enjeux du scrutin et les inciter à se rendre aux urnes. Car dans sa grande majorité, la population timoraise largement rurale, partiellement analphabète et peu informée, est loin des joutes partisanes qui peuvent agiter Dili, la capitale, ou entretenir les conversations de son important microcosme occidental. Vivre en paix dans ce pays enfin libre, voilà la véritable aspiration du peuple timorais. Un peuple qui selon toute vraisemblance devrait confier les clefs du sommet de l’Etat à celui qui jamais n’a cessé de lutter pour lui : Xanana.
Le Timor-Oriental s’apprête à élire son premier Président de la République. Son premier ? Non ! La constitution du pays, proclamée il y a moins d’une semaine, l’énonce dès son second alinéa. Le Timor-Oriental est devenu indépendant le 28 novembre 1975. Or, entre ce jour-là et l’invasion indonésienne, 9 jours plus tard, le Timor oriental a eu un éphémère Président de la République : Francisco Xavier do Amaral. Celui-là même qui présente aujourd’hui sa candidature à l’élection présidentielle face au célèbre Xanana Gusmão.
Xanana Gusmão, l’homme de la résistance, le symbole de la lutte armée s’est déclaré au mois d’août dernier, après avoir beaucoup hésité : «Les anciens guérilleros font de mauvais hommes politiques affirmait-il, je suis conscient de ne pas être la personne la plus qualifiée pour ce poste». Il se disait fatigué après 25 années de lutte, dont sept passées en prison. A 55 ans, il soutenait vouloir jardiner, se consacrer à la photographie, et offrir son temps à sa femme et à son jeune fils. Mais après avoir porté les espoirs de son peuple durant tant d’années, «Xanana» ainsi que tout le monde l’appelle ici, ne voulait pas, ne pouvait pas le décevoir.
«Quand les gens mouraient, Amaral n’était pas là !»
Xavier do Amaral n’a pas la notoriété du héros de la lutte pour l’indépendance, son nom n’est pas tracé à la peinture noire sur les murs du pays, il n’en reste pas moins un homme politique de premier plan. Il entend par conséquent démentir la rumeur prétendant qu’il ne se présente que pour servir d’adversaire à Xanana Gusmão, et de gage à cette démocratie naissante. Vice-président de l’Assemblée constituante élue en août dernier, fondateur dès 1975 d’un parti politique, l’Association sociale démocratique timoraise, qu’il dirige toujours, le premier président du Timor indépendant, âgé de 65 ans, a plus d’expérience politique que son adversaire. Toutefois, son rôle trouble durant l’occupation indonésienne et son exil contraint ou délibéré à Djakarta durant toute cette période, s’ils lui sont aujourd’hui pardonnés, n’ont pas été oubliés. «Quand les gens mouraient, quand il fallait se battre, il n’était pas là !» résume Marcelina, une timoraise âgée de 30 ans.
Aujourd’hui, on veut effacer le souvenir de cette guerre, de ces dissensions voire de ces trahisons. Les mots «réconciliation» et «unité nationale» sont ceux qui dominent la campagne électorale. Pas de grand programme ou de thèmes électoraux précis, «de toute façon nous expliquent les état-majors des candidats, la constitution récemment proclamée ne confère au président que des pouvoirs limités». En clair ce sont l’Assemblée et le gouvernement qui en est issu qui choisiront, et conduiront la politique du pays.
Avec 54 membres sur 88 à l’Assemblée, le parti Fretilin domine largement cette vie politique timoraise, or il ne soutient officiellement aucun des deux candidats. Ce soutien aurait dû être normalement dévolu à Xanana Gusmão, qui se présente sans étiquette, mais des tractations compliquées, de vieilles querelles, sont venues jeter un trouble sur cette entente. En résulte une situation un peu surprenante qui pourrait voir certains membres du Fretilin appeler à voter Amaral.
Les deux principaux intéressés, quant à eux, se respectent, et chacun qualifie la campagne de « saine ». A l’heure actuelle, celle-ci se caractérise de part et d’autre par une classique tournée nationale. Une campagne d’autant plus calme que, victime d’une pneumonie, Xavier do Amaral est en convalescence après une hospitalisation. Ici, pas d’affiches dans les rues ou de spots publicitaires, le plus gros travail de communication est en fait celui effectué par la Commission électorale indépendante –le pays est toujours sous tutelle onusienne- afin d’expliquer aux habitants les enjeux du scrutin et les inciter à se rendre aux urnes. Car dans sa grande majorité, la population timoraise largement rurale, partiellement analphabète et peu informée, est loin des joutes partisanes qui peuvent agiter Dili, la capitale, ou entretenir les conversations de son important microcosme occidental. Vivre en paix dans ce pays enfin libre, voilà la véritable aspiration du peuple timorais. Un peuple qui selon toute vraisemblance devrait confier les clefs du sommet de l’Etat à celui qui jamais n’a cessé de lutter pour lui : Xanana.
par Cyril Bousquet
Article publié le 01/04/2002