Balkans
Elections test au Monténégro
Les élections municipales vont prendre l’aspect d’un référendum pour ou contre l’accord d’Union avec la Serbie qui a été conclu sur les décombre de la défunte République fédérale de Yougoslavie.
Les électeurs monténégrins sont convoqués ce mercredi à des élections municipales qui prennent valeur de premier test en grandeur réelle sur la nouvelle «Union de Serbie et du Monténégro», censée remplacer la Yougoslavie, depuis l’accord conclu à Belgrade en mars dernier.
Le précédent scrutin de ce type, en 1998, avait été marqué par un triomphe du Parti démocratique des socialistes (DPS) du Président Milo Djukanovic, qui avait raflé la plupart des mairies des grandes villes du pays, cantonnant le Parti socialiste populaire (SNP) à ses bastions pro-serbes traditionnels du nord du pays.
Cette année, la situation est bien différente, et l’on s’attend à un effondrement du «bloc monténégrin», centré autour du DPS. La coalition «Pour la Yougoslavie» se prépare à faire main basse sur le littoral et la plupart des municipalités détenues par le DPS. La bataille sera particulièrement âpre dans le port de Bar et à Niksic, la seconde ville du pays, réputée donner à la virgule près l’étiage national des forces politiques. Seuls les indépendantistes convaincus de l’Alliance libérale du Monténégro (LSCG), pourraient troubler la victoire annoncée du SNP en emportant la majorité absolue dans leur fief de Cetinje, l’ancienne capitale royale, et en marquant des points sur la côte. Les Libéraux veulent ainsi surclasser le DPS dans la vieille ville de Kotor.
Un scrutin observé avec attention à Belgrade
Les contours du scénario catastrophe sont bien connus pour les proches de Milo Djukanovic : raz-de-marée pour le SNP et avancée des Libéraux, qui ferait payer au prix fort la signature de l’accord de Belgrade. À Cetinje, lors de leur dernier meeting de campagne, les Libéraux ont encore clamé que cet accord était «une trahison des intérêts monténégrins», et cet argument pourrait toucher la frange la plus indépendantiste de l’électorat normalement fidèle à Milo Djukanovic. De son côté, la principale formation pro-yougoslave, le SNP, répète que l’accord «enterre l’idée d’indépendance» et justifie donc la validité de son programme.
Dans cette hypothèse, le DPS ne serait sûr de l’emporter que dans deux petites communes du nord du pays, Rozaje et Plav, majoritairement peuplées de Slaves musulmans. Un tel scénario signifierait une quasi-disparition du DPS de la scène politique monténégrine. Seule consolation : la mairie de la capitale, Podgorica, acquise au DSP, n’est pas en jeu, puisque des élections municipales anticipées avaient été organisées en juin 2000.
Malgré des sondages catastrophiques pour le DPS, les experts de chaque camp restent prudents. «Le niveau d’abstention que révèlent les enquêtes d’opinion est plus élevé que dans n’importe quelles élections du passé. C’est pourquoi la question de savoir qui réussira le mieux à mobiliser ses propres électeurs est plus importante que les programmes politiques. Dans ce contexte, l’accord de Belgrade pourrait avoir de fortes conséquences –comme motif d’abstention pour les électeurs du bloc monténégrin», explique l’analyste Srdjan Darmanovic. L’abstention pourrait aussi toucher l’autre camp, nombre d’électeurs pro-serbes ne pardonnant pas au SNP, allié à la nouvelle majorité serbe au sein du gouvernement fédéral yougoslave, de s’être rallié à la coopération avec le Tribunal international de La Haye.
Au bout du compte, la situation ne manque pas d’être paradoxale : le SNP comme le DPS ont approuvé l’accord de Belgrade, qui jouit du soutien d’une nette majorité de la population, selon toutes les enquêtes d’opinion. Pourtant, chacun de ces deux partis se trouve placé en porte-à-faux par rapport à son propre électorat. Le DPS est accusé d’avoir «trahi» son objectif indépendantiste, tandis que le SNP doit défendre comme «moindre mal» une Union qui n’est un ersatz de la Yougoslavie, quand son électorat aurait souhaité un Etat unitaire beaucoup plus centralisé.
Le résultat des élections municipales risque de déterminer la donne politique monténégrine des prochains mois. Milo Djukanovic ne dispose plus de majorité parlementaire depuis un an et une nouvelle coalition gouvernementale devra être formée au lendemain des élections. Deux options sont possibles : une alliance avec les Libéraux, qui redresserait la barre vers l’objectif de l’indépendance, ou bien une entente avec au moins l’un des petits partis pro-serbe, le Parti populaire de Dragan Soc, qui signifierait un abandon de la politique souverainiste. Si aucun accord n’est possible, des élections législatives anticipées deviendront inévitables. On se doute que le résultat des élections de mercredi sera suivi avec attention à Belgrade, car de l’issue du scrutin pourrait dépendre la viabilité de l’Union de Serbie et du Monténégro, portée sur les fonts baptismaux par la médiation européenne.
Le précédent scrutin de ce type, en 1998, avait été marqué par un triomphe du Parti démocratique des socialistes (DPS) du Président Milo Djukanovic, qui avait raflé la plupart des mairies des grandes villes du pays, cantonnant le Parti socialiste populaire (SNP) à ses bastions pro-serbes traditionnels du nord du pays.
Cette année, la situation est bien différente, et l’on s’attend à un effondrement du «bloc monténégrin», centré autour du DPS. La coalition «Pour la Yougoslavie» se prépare à faire main basse sur le littoral et la plupart des municipalités détenues par le DPS. La bataille sera particulièrement âpre dans le port de Bar et à Niksic, la seconde ville du pays, réputée donner à la virgule près l’étiage national des forces politiques. Seuls les indépendantistes convaincus de l’Alliance libérale du Monténégro (LSCG), pourraient troubler la victoire annoncée du SNP en emportant la majorité absolue dans leur fief de Cetinje, l’ancienne capitale royale, et en marquant des points sur la côte. Les Libéraux veulent ainsi surclasser le DPS dans la vieille ville de Kotor.
Un scrutin observé avec attention à Belgrade
Les contours du scénario catastrophe sont bien connus pour les proches de Milo Djukanovic : raz-de-marée pour le SNP et avancée des Libéraux, qui ferait payer au prix fort la signature de l’accord de Belgrade. À Cetinje, lors de leur dernier meeting de campagne, les Libéraux ont encore clamé que cet accord était «une trahison des intérêts monténégrins», et cet argument pourrait toucher la frange la plus indépendantiste de l’électorat normalement fidèle à Milo Djukanovic. De son côté, la principale formation pro-yougoslave, le SNP, répète que l’accord «enterre l’idée d’indépendance» et justifie donc la validité de son programme.
Dans cette hypothèse, le DPS ne serait sûr de l’emporter que dans deux petites communes du nord du pays, Rozaje et Plav, majoritairement peuplées de Slaves musulmans. Un tel scénario signifierait une quasi-disparition du DPS de la scène politique monténégrine. Seule consolation : la mairie de la capitale, Podgorica, acquise au DSP, n’est pas en jeu, puisque des élections municipales anticipées avaient été organisées en juin 2000.
Malgré des sondages catastrophiques pour le DPS, les experts de chaque camp restent prudents. «Le niveau d’abstention que révèlent les enquêtes d’opinion est plus élevé que dans n’importe quelles élections du passé. C’est pourquoi la question de savoir qui réussira le mieux à mobiliser ses propres électeurs est plus importante que les programmes politiques. Dans ce contexte, l’accord de Belgrade pourrait avoir de fortes conséquences –comme motif d’abstention pour les électeurs du bloc monténégrin», explique l’analyste Srdjan Darmanovic. L’abstention pourrait aussi toucher l’autre camp, nombre d’électeurs pro-serbes ne pardonnant pas au SNP, allié à la nouvelle majorité serbe au sein du gouvernement fédéral yougoslave, de s’être rallié à la coopération avec le Tribunal international de La Haye.
Au bout du compte, la situation ne manque pas d’être paradoxale : le SNP comme le DPS ont approuvé l’accord de Belgrade, qui jouit du soutien d’une nette majorité de la population, selon toutes les enquêtes d’opinion. Pourtant, chacun de ces deux partis se trouve placé en porte-à-faux par rapport à son propre électorat. Le DPS est accusé d’avoir «trahi» son objectif indépendantiste, tandis que le SNP doit défendre comme «moindre mal» une Union qui n’est un ersatz de la Yougoslavie, quand son électorat aurait souhaité un Etat unitaire beaucoup plus centralisé.
Le résultat des élections municipales risque de déterminer la donne politique monténégrine des prochains mois. Milo Djukanovic ne dispose plus de majorité parlementaire depuis un an et une nouvelle coalition gouvernementale devra être formée au lendemain des élections. Deux options sont possibles : une alliance avec les Libéraux, qui redresserait la barre vers l’objectif de l’indépendance, ou bien une entente avec au moins l’un des petits partis pro-serbe, le Parti populaire de Dragan Soc, qui signifierait un abandon de la politique souverainiste. Si aucun accord n’est possible, des élections législatives anticipées deviendront inévitables. On se doute que le résultat des élections de mercredi sera suivi avec attention à Belgrade, car de l’issue du scrutin pourrait dépendre la viabilité de l’Union de Serbie et du Monténégro, portée sur les fonts baptismaux par la médiation européenne.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 14/05/2002