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Union africaine

La décennie perdue des années 80

En juin 1991, après une décennie «perdue» sur le plan économique, les dirigeants africains réunis au sommet de l'OUA à Abuja au Nigeria signaient un traité instituant une Communauté économique africaine à l'horizon de 2025. Dix ans après, talonnés par une mondialisation qui risquait de laisser l'Afrique à la traîne, ils décidaient de prendre leur destin en main en lançant, au sommet de l'OUA à Lusaka, un nouveau partenariat pour le développement économique du continent, connu sous son sigle anglais de NEPAD. Ce projet sera au centre des discussions du premier sommet de l'Union africaine.
Le problème de la dette et de la chute des cours des matières premières devait dominer sur la scène africaine les années 80 sans recevoir pour autant de solution, malgré le sommet extraordinaire de Lagos consacré aux problèmes économiques du continent en 1980 et malgré la réunion extraordinaire sur la dette en 1987 à Addis Abeba. L'aide privée à l'Afrique ne cessait de diminuer alors que l'aide publique n'avait ni l'élan ni les résultats escomptés. La sécheresse dans la Corne de l'Afrique et d'autres régions du continent, aggravée par les nombreux conflits attisés par la rivalité Est-Ouest, menaçait la survie même de millions d'Africains, faisant de l'autosuffisance alimentaire une priorité.

Les espoirs déçus de l'après-guerre froide

La chute du mur de Berlin en 1989, marquant la fin de la guerre froide et l'éclatement du bloc soviétique, avait suscité une énorme expectative en Afrique qui espérait recueillir les «dividendes de la paix» pour alléger le fardeau de sa dette et recevoir une aide accrue au développement. Ces espoirs furent vite déçus, en raison de la multiplication des conflits locaux et de la désaffection des bailleurs de fonds, tournés vers l'Asie et l'Amérique latine, pour qui l'Afrique n'avait plus la même importance géostratégique. Les Américains étaient notamment échaudés par leur expérience malheureuse en Somalie et les Français par leur mise en accusation à propos du génocide au Rwanda. L'impact de la démocratisation des années 90 sur le développement a d'autre part été loin de répondre aux espérances.
Le milieu des années 90 devait toutefois marquer un tournant : dévaluation du franc CFA dans les pays de la Zone Franc, qui rendait leurs exportations plus compétitives, voyage en Afrique du président américain Bill Clinton et nouvelle initiative pour les pays pauvres très endettes (PPTE, HIPC en anglais). Parallèlement les réserves pétrolières de l'Afrique, notamment dans le Golfe de Guinée, ne manquaient pas de susciter un intérêt renouvelé des pays riches, principaux consommateurs d'énergie, entraînant de nouveaux apports de capitaux privés.

Sommet du millénaire et Nepad

La mondialisation devait aussi démontrer l'interdépendance entre riches et pauvres, ne serait-ce que pour endiguer l'immigration clandestine devenue une des principales préoccupations du monde développé. Le sommet du millénaire à l'Onu en 2000 devait consacrer cette nouvelle préoccupation de la communauté internationale envers l'Afrique, avec le lancement d'une décennie de lutte contre la pauvreté, avouant par là l'échec des précédentes stratégies de développement. Répondant à ce message, les chefs d'État africains, conscients de l'énorme retard qu'avait pris leur continent, ont décidé en 2001 d’élaborer eux-mêmes un plan de développement basé sur une dynamique et des efforts internes, et un partenariat avec les bailleurs de fonds, destiné à remplacer l'ancienne relation donneurs-bénéficiaires d'aide.
Le président sud-africain Thabo Mbeki, chantre de la «Renaissance Africaine» avait lancé le Plan du Millénium (MAP, Millenium African Plan) avec le nigérian Olusegun Obasanjo et l'algérien Abdelaziz Bouteflika, prônant la bonne gouvernance politique et économique, et soulignant l'importance du secteur privé. L'Égypte fut ensuite cooptée pour se joindre aux trois autres. De son côté, le chef d'État sénégalais Abdoulaye Wade proposait le plan Omega, qui insistait par ailleurs sur l'importance de l'aide au développement et des infrastructures.

La fusion des deux plans a été réalisée avec l'aide de la CEA (Commission économique des Nations-Unies pour l'Afrique) pour aboutir à la Nouvelle Initiative Africaine, adoptée par le Sommet de Lusaka. Celle-ci a été présentée au sommet du G8, à Gênes en Italie, en juillet 2001. La nouvelle initiative a changé de nom pour s'appeler désormais le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique dont l’acronyme anglais fut retenu comme sigle unique : Nepad pour New Partnership for African Development.
A partir de Gênes, chaque pays du G8 a désigné une personnalité pour assurer le contact permanent avec les pays africains, les sherpas, afin de préparer une réponse adéquate des pays riches au sommet du G8 à Kananaskis au Canada en juin 2002. De leur côté, les Africains ont préparé une série de projets régionaux et continentaux pour les présenter aussi bien aux pays du G8 qu'au secteur privé africain et international.



par Marie  Joannidis

Article publié le 21/05/2002