Union africaine
Profession : architecte
Nommé, l'année dernière à Lusaka, secrétaire général de l'OUA, l'Ivoirien Amara Essy est l'homme par qui l'Union africaine doit advenir, dans les meilleures conditions possibles. En prélude au sommet de Durban, il affirme sa foi dans l'Union africaine, en évoquant les difficultés de sa tâche.
MFI : Quels sont les grands défis auxquels doit faire face l'Union africaine ?
Amara Essy : D'abord l'Union africaine doit être crédible. Le grand défi, c'est le lancement. Il faut d'abord lancer l'Union au sommet de Durban, puis mettre en place les structures - six structures sur dix sept prévues sont prêtes. La période de transition (depuis le sommet de l'OUA à Lusaka en 2001) se terminant à Durban, on parlera ensuite de période intérimaire. On va aussi élire dix commissaires, dont un président et un vice- président… et un comité travaille sur le problème des ressources afin de faire face aux nouvelles dépenses et éviter que l'Union africaine ne puisse fonctionner, faute de moyens adéquats.
MFI : Si l'on fait un bref bilan de l'OUA, quels sont à votre avis ses succès et ses échecs, et pourquoi ?
A. E. : L'OUA a été créée à l'époque pour pouvoir décoloniser toute l'Afrique et combattre et éradiquer l'apartheid, ce qui a été fait. L'économie a aussi été un des gros dossiers. Mais compte tenu du fait qu'on n'a pas pu mener ensemble tous ces combats, le volet économique reste encore en retrait. C'est à présent le volet le plus important, bien qu'il y ait eu le plan de Lagos et le Traité d'Abuja (pour la création d'une Communauté économique africaine en 34 ans), mais tout cela est resté lettre morte. Heureusement qu'au niveau régional il y a eu quand même des progrès, comme par exemple dans le cadre de la CEDEAO en Afrique de l'ouest, ou de la SADC en Afrique australe.
MFI : Que va apporter à l'Afrique l'Union africaine, de plus que l'OUA ? Et que faut-il pour assurer son succès ?
A. E. : Je pense que l'idée de l'Union africaine est en réalité un vieux rêve qui a précédé l'OUA et remonte même à 1800, à Haïti. Le président ghanéen Kwame Nkrumah avait lui même évoqué l'idée des États-Unis d'Afrique (idée reprise par le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi). Il fallait d'abord consolider les indépendances avant d'envisager une plus grande union africaine. Il s'agit de voir à présent comment formuler cette Union africaine. Je pense qu'il faut aller plus vite sur le plan d'une intégration plus poussée et mieux adaptée. Il faut donc plus de moyens, plus de structures adaptées, plus d'hommes engagés vraiment en faveur de l'unité africaine. Je regrette de voir encore des micro-nationalismes au sein de l'OUA. Il faut que les gens y croient… car c'est une nécessité et il n'y a pas d'autre alternative que l'Union africaine.
MFI : Quels seront les dossiers chauds du sommet de Durban ?
A. E. : On parlera bien sûr des conflits et des tentatives pour les régler, comme celui de Madagascar ou les négociations de Sun City sur la RDC, mais on traitera aussi du NEPAD et de la conférence sur la paix et la sécurité en Afrique proposée par le président nigérian Olusegun Obasanjo. A propos du NEPAD, si ont attend un apport de l'extérieur, il existe aussi une prise de conscience africaine, impliquant les meilleurs cerveaux africains, tous ces diplômés de grandes écoles - et n'oubliez pas que l'Afrique est un continent très riche. Il faut aussi y associer la société civile. J'ai d'ailleurs organisé une conférence sur ce thème à Addis Abeba, car la société civile constitue un frein à tous les dérapages politiques et une garantie pour la bonne gouvernance.
MFI : Serez-vous candidat au sein de l'UA pour poursuivre la tâche qui vous a été confiée l'année dernière à Lusaka ?
A. E. : Je n'ai pas de commentaire sur ce sujet. En fait, je ne me suis même pas préoccupé de la question… Je fais ce que je dois faire, les chefs d' État décideront. Il n'a pas été facile pour moi d'accomplir tout ceci. C'est un travail d'architecte et de pompier en même temps, et les conflits sont partout… D'autre part, il y a un problème qui nous a handicapé, c'est la question du terrorisme. Il a fallu mobiliser la communauté internationale pour montrer que l'Afrique n'est pas un continent terroriste, mais un continent victime du terrorisme. Nous avons adopté pas mal de résolutions contre le terrorisme et même un code de conduite de « bon voisinage » et un texte sur la prévention du terrorisme. Tout cela a demandé beaucoup d'énergie. Et on ne peut pas réaliser une réforme de l'OUA si l'on n'a pas des relations avec les institutions internationales, ce qui m'a obligé à d'intenses contacts.
Propos recueillis par Marie Joannidis
Amara Essy : D'abord l'Union africaine doit être crédible. Le grand défi, c'est le lancement. Il faut d'abord lancer l'Union au sommet de Durban, puis mettre en place les structures - six structures sur dix sept prévues sont prêtes. La période de transition (depuis le sommet de l'OUA à Lusaka en 2001) se terminant à Durban, on parlera ensuite de période intérimaire. On va aussi élire dix commissaires, dont un président et un vice- président… et un comité travaille sur le problème des ressources afin de faire face aux nouvelles dépenses et éviter que l'Union africaine ne puisse fonctionner, faute de moyens adéquats.
MFI : Si l'on fait un bref bilan de l'OUA, quels sont à votre avis ses succès et ses échecs, et pourquoi ?
A. E. : L'OUA a été créée à l'époque pour pouvoir décoloniser toute l'Afrique et combattre et éradiquer l'apartheid, ce qui a été fait. L'économie a aussi été un des gros dossiers. Mais compte tenu du fait qu'on n'a pas pu mener ensemble tous ces combats, le volet économique reste encore en retrait. C'est à présent le volet le plus important, bien qu'il y ait eu le plan de Lagos et le Traité d'Abuja (pour la création d'une Communauté économique africaine en 34 ans), mais tout cela est resté lettre morte. Heureusement qu'au niveau régional il y a eu quand même des progrès, comme par exemple dans le cadre de la CEDEAO en Afrique de l'ouest, ou de la SADC en Afrique australe.
MFI : Que va apporter à l'Afrique l'Union africaine, de plus que l'OUA ? Et que faut-il pour assurer son succès ?
A. E. : Je pense que l'idée de l'Union africaine est en réalité un vieux rêve qui a précédé l'OUA et remonte même à 1800, à Haïti. Le président ghanéen Kwame Nkrumah avait lui même évoqué l'idée des États-Unis d'Afrique (idée reprise par le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi). Il fallait d'abord consolider les indépendances avant d'envisager une plus grande union africaine. Il s'agit de voir à présent comment formuler cette Union africaine. Je pense qu'il faut aller plus vite sur le plan d'une intégration plus poussée et mieux adaptée. Il faut donc plus de moyens, plus de structures adaptées, plus d'hommes engagés vraiment en faveur de l'unité africaine. Je regrette de voir encore des micro-nationalismes au sein de l'OUA. Il faut que les gens y croient… car c'est une nécessité et il n'y a pas d'autre alternative que l'Union africaine.
MFI : Quels seront les dossiers chauds du sommet de Durban ?
A. E. : On parlera bien sûr des conflits et des tentatives pour les régler, comme celui de Madagascar ou les négociations de Sun City sur la RDC, mais on traitera aussi du NEPAD et de la conférence sur la paix et la sécurité en Afrique proposée par le président nigérian Olusegun Obasanjo. A propos du NEPAD, si ont attend un apport de l'extérieur, il existe aussi une prise de conscience africaine, impliquant les meilleurs cerveaux africains, tous ces diplômés de grandes écoles - et n'oubliez pas que l'Afrique est un continent très riche. Il faut aussi y associer la société civile. J'ai d'ailleurs organisé une conférence sur ce thème à Addis Abeba, car la société civile constitue un frein à tous les dérapages politiques et une garantie pour la bonne gouvernance.
MFI : Serez-vous candidat au sein de l'UA pour poursuivre la tâche qui vous a été confiée l'année dernière à Lusaka ?
A. E. : Je n'ai pas de commentaire sur ce sujet. En fait, je ne me suis même pas préoccupé de la question… Je fais ce que je dois faire, les chefs d' État décideront. Il n'a pas été facile pour moi d'accomplir tout ceci. C'est un travail d'architecte et de pompier en même temps, et les conflits sont partout… D'autre part, il y a un problème qui nous a handicapé, c'est la question du terrorisme. Il a fallu mobiliser la communauté internationale pour montrer que l'Afrique n'est pas un continent terroriste, mais un continent victime du terrorisme. Nous avons adopté pas mal de résolutions contre le terrorisme et même un code de conduite de « bon voisinage » et un texte sur la prévention du terrorisme. Tout cela a demandé beaucoup d'énergie. Et on ne peut pas réaliser une réforme de l'OUA si l'on n'a pas des relations avec les institutions internationales, ce qui m'a obligé à d'intenses contacts.
Propos recueillis par Marie Joannidis
Article publié le 22/05/2002