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Union africaine

Les grands dossiers

La bonne gouvernance politique et économique sera au cœur des débats du premier sommet de la nouvelle Union africaine, en juillet à Durban, en Afrique du Sud, avec la recherche du rétablissement de la paix, notamment en RDC et dans plusieurs autres régions du continent.
Les Africains ont eux-mêmes fondé sur ce principe de bonne gouvernance leur nouvelle initiative pour relancer l’économie du continent, dans le cadre du Nepad. Mais ils auront plus de mal à parler politique malgré des progrès réels pour mettre fin à certains conflits. « Les causes de blocage sont multiples et vont de l’obsession sécuritaire du Rwanda concernant la RDC à l’obstination des protagonistes malgaches ou du président zimbabwéen Robert Mugabe, en passant par le raidissement de la Guinée concernant le conflit au Sierra Leone et au Liberia », souligne un observateur diplomatique averti. Les conflits régionaux ou internes seront de toute façon au menu du sommet tout comme les questions liées au Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique, tels que la dette, l’aide publique au développement et le renforcement du secteur privé, sans oublier la lutte contre le sida.

Des conflits en passe d’être résolus

L’Union africaine pourra se féliciter de la fin du conflit entre l’Ethiopie et l’Erythrée, même si des problèmes subsistent après la délimitation de la frontière par la Commission frontalière internationale siégeant à la Haye à la mi-avril. Parrainés par l’OUA, les accords de paix d’Alger signés en 2000 ont permis le déploiement, le long de la frontière de près de 1 000 km entre les deux voisins, de quelque 4 200 casques bleus dans le cadre de la Mission des Nations unies pour l’Ethiopie et l’Erythrée (MINUEE). Cette guerre de deux ans, qui a fait plus de 70 000 victimes, avait commencé en 1998 autour de la ville frontalière de Badme, dont l’appartenance suscite toujours des litiges.
Le conflit dans l’archipel des Comores, provoqué par la sécession de l’île d’Anjouan, a été réglé en février 2001 par un accord de réconciliation nationale sous l’égide de l’OUA et de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Une constitution, établissant la nouvelle Union des Comores et adoptée fin 2001, donne à chaque île une large autonomie. Des élections présidentielles organisées à la mi-avril ont été émaillées par des incidents épars. Le conflit du Burundi a, quant à lui, été pratiquement résolu grâce, notamment, aux efforts de l’ancien chef d’Etat sud-africain Nelson Mandela, soutenu par l’OUA.
Les responsables réunis à Durban pourront se réjouir de la fin de la guerre civile en Angola. Mais la paix s’est faite à la suite de la mort au combat, en février 2002, du chef historique de la rébellion armée de l’Unita, Jonas Savimbi, et la victoire militaire des forces gouvernementales. Des années d’efforts de l’OUA et de l’Onu n’avaient pas réussi à mettre fin à ce conflit qui a fait des dizaines de milliers de morts et plus de 4 millions de déplacés, soit le tiers de la population angolaise.
De même, la guerre sanglante au Sierra Leone a officiellement pris fin en janvier dernier grâce aux efforts de plusieurs protagonistes, en premier lieu les Britanniques, qui ont envoyé des troupes pour protéger le gouvernement, et les soldats de l’Onu ainsi que la Cedeao qui a fait pression sur les rebelles du RUF et leurs alliés du Liberia. La campagne internationale contre les diamants « sales » d’Angola et du Sierra Leone a aussi porté ses fruits, assortie à des sanctions de l’Onu contre le Liberia.

et d’autres toujours en attente d’une solution

D’autres conflits attendent toujours une solution malgré les efforts entrepris par l’OUA et la communauté internationale et seront parmi les dossiers chauds du sommet.
Le médiateur nommé par l’organisation panafricaine pour favoriser le dialogue inter-congolais en RDC, l’ancien chef d’Etat du Botswana Ketumile Masire, appuyé notamment par le président sud-africain Thabo Mbeki, a de la peine à persuader le Rwanda et ses alliés congolais du RCD d’accepter un règlement d’ensemble. Mbeki est considéré comme un allié du Rwanda lâché peu à peu par la communauté internationale, à l’exception toutefois de la Britannique Clare Short, ministre de la Coopération, qui continue à soutenir Kigali. L’Angola et le Zimbabwe restent des protagonistes importants aux côtés de Joseph Kabila. Une solution partielle a été obtenue en avril avec l’accord de partage du pouvoir conclu entre le président Joseph Kabila et Jean-Pierre Bemba, chef des rebelles du MLC soutenus par l’Ouganda. Les forces de ces deux parties contrôlent plus de 70 % du territoire national.
Autre sujet délicat, celui du Zimbabwe, avec la réélection contestée à la présidence de Robert Mugabe, accusé par ses opposants de violences politiques. Thabo Mbeki se trouve dans une situation délicate. Après être resté longtemps discret sur les violences au Zimbabwe voisin, condamnées par la communauté internationale, il a fini par réagir en même temps que le président nigérian Obasanjo. Ces deux chefs d’Etat ainsi que le Premier ministre australien, constituant une troïka du Commonwealth, ont décidé de suspendre pour un an le Zimbabwe de cette organisation.

Sentiments contradictoires

Les hésitations africaines concernant Mugabe reflètent des sentiments contradictoires entre, d’une part, un attachement affiché à la démocratie et à la bonne gouvernance génératrices d’aide au développement et, d’autre part, la volonté de s’affranchir de la tutelle des bailleurs de fonds qui sont, pour certains, les anciens colonisateurs du continent. Mugabe a constamment utilisé la fibre anti-colonialiste pour justifier les violences contre les fermiers blancs qui continuent à détenir la plus grande part des terres productives de son pays. Il a utilisé le même argument pour rejeter par la suite les accusations de fraudes électorales dénoncées avec vigueur par les observateurs étrangers mais minimisées par certains de leurs collègues africains, y compris sud-africains. Des pays comme l’Afrique du Sud redoutent, estiment les observateurs, une contagion démagogique car le problème des terres détenues par les fermiers blancs constitue un sujet potentiellement explosif.
L’OUA avec l’aide du président sénégalais Abdoulaye Wade a aussi tenté de démêler l’imbroglio issu des élections présidentielles malgaches où le président sortant Didier Ratsiraka et son rival Marc Ravalomanana ont tous deux affirmé avoir gagné le scrutin de décembre dernier.
Malgré l’attention accordée par le sommet à ces dossiers politiques, une bonne partie des débats portera sans doute sur les questions économiques vitales pour l’avenir du continent, surtout le rôle de l’Union africaine dans la mise en oeuvre des projets du Nepad. Sachant toutefois que développement économique, paix et bonne gouvernance politique vont de pair.



par Marie  Joannidis

Article publié le 29/05/2002