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France : législatives 2002

Une campagne terne et morose

Les 9 et 16 juin, les Français sont appelés à élire leurs députés pour cinq ans. Après une campagne qui n'a suscité que très peu d’intérêt chez les électeurs, les Français vont devoir dire s’ils veulent ou non doter Jacques Chirac d’une majorité à l’Assemblée nationale.
Après l’élection présidentielle qui a vu la réélection de Jacques Chirac, le 5 mai dernier avec 82% des suffrages, les élections législatives du 9 et 16 juin prochains font figure de troisième tour. Les Français vont devoir élire leur députés qui ont pour principale fonction de voter, avec les sénateurs, les textes de lois. L’Assemblée nationale s’emploie aussi à informer les citoyens via les commissions d’enquêtes et à contrôler les dépenses publiques par le biais de missions d’évaluation. Les 577 parlementaires sont élus au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable. Le nombre de députés correspondant à celui des circonscriptions dans lesquelles ils sont élus (555 en France métropolitaine et 22 outre-mer) et dont le dernier découpage remonte à 1986. La majorité absolue au Palais-Bourbon étant de 289 sièges.

Le scrutin est uninominal majoritaire à deux tours. Un député peut être élu dès le premier tour s’il obtient la majorité absolue des suffrages exprimés. Au second tour, la majorité relative suffit. Peuvent alors se maintenir les deux candidats arrivés en tête et ceux qui ont rassemblé un nombre de voix au moins égal à 12,5% du nombre d’électeurs inscrits. En cas d’égalité parfaite entre deux candidats, le plus âgé est élu député. Aujourd’hui, les leçons du 21 avril dernier (date du premier tour de l’élection présidentielle), où seize candidats s’étaient alignés pour la course à l’Elysée, ne semblent pas avoir été tirés puisque 8 456 candidats se présentent, le dimanche 9 juin, date du premier tour des législatives, dans 577 circonscriptions, soit quinze candidats en moyenne par circonscription. Le risque est donc grand d’assister à un éparpillement des voix rendant difficile de parvenir aux 12,5% des inscrits. Sur les 8 456 prétendants à la députation, la parité hommes/femmes a rarement été atteinte. Plus de 3 250 femmes se présentent mais rares sont les partis qui ont atteint cette équilibre des candidatures pourtant requise par la loi du 6 juin 2000, ce qui leur vaudra des sanctions financières.

Nouvelle cohabitation ?

A droite, le nouveau gouvernement, lancé dans la campagne dont l’issue déterminera son sort, a cherché à accréditer l’idée qu’il était en place pour longtemps afin de convaincre les électeurs de voter pour lui et d’éviter ainsi une nouvelle cohabitation. La droite traditionnelle, réunie autour de Jacques Chirac au sein de l’Union pour la majorité présidentielle (UMP), redoute pourtant une démobilisation de son électorat et les effets d’une dispersion des voix du fait de la multiplication du nombre des candidats. Pour tenter d’y remédier, le président français est même intervenu, à deux reprises, directement dans le débat, lors d’un déplacement à Châteauroux et lors d’une intervention télévisée, pour réclamer aux Français une «majorité claire» et «cohérente».

La gauche, déboussolée par l’élimination au premier tour de la présidentielle de son candidat, l’ex-Premier ministre Lionel Jospin, a peiné à convaincre ses électeurs du bien-fondé d’un retour de la cohabitation, maintes fois décriée entre un président de droite et un Premier ministre de gauche. Elle a été, durant toute la campagne dans une position inconfortable puisqu’elle a du défendre un système qu’elle a elle-même vivement critiquée lorsqu’elle était au pouvoir. La tâche a été à ce point délicate et difficile, qu’elle a préféré utiliser l’argument selon lequel une victoire de la droite lui donnerait un pouvoir quasi absolu pour appliquer une politique antisociale. D’autre part, la gauche doit assumer la fait d’avoir fait voter la réduction du mandat présidentiel de sept à cinq ans pour faire coïncider le mandat du président avec celui des députés, mais aussi l’inversion du calendrier électoral qui aurait pu, selon elle, aboutir à un vote plus cohérent qui aurait permis de mettre fin à la cohabitation qui a empoisonné la vie politique française à trois reprises (1986-1988, 1993-1995, 1997-2000).

Quant au Front national (FN), il pourrait bien jouer le rôle d’arbitre dès dimanche soir. En effet, les candidats d’extrême droite pourraient, dans bon nombre de circonscriptions, nuire à la gauche comme à la droite. Aux dernières élections législatives de 1997, ils avaient participé à 75 triangulaires (droite-gauche-extrême droite). Bien que le mode de scrutin majoritaire à deux tours lui soit a priori défavorable, le FN espère pourtant provoquer un séisme politique comme au premier tour de la présidentielle qui avait vu l’élimination de Lionel Jospin et la qualification de Jean-Marie Le Pen. Ainsi le parti d’extrême droite pourrait bien se maintenir dans 250 à 300 circonscriptions.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 08/06/2002