Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Entreprises

La précarité guette les PDG

La mésaventure de Jean-Marie Messier, son départ précipité de la direction de Vivendi Universal pour cause de mauvais résultats, est un phénomène en augmentation rapide parmi les hauts dirigeants. La «durée de vie» moyenne d’un PDG à la tête de sa compagnie est en chute libre.
Le turnover, le rythme des arrivées et des départs, des PDG des grandes entreprises a augmenté de 53% entre 1995 et 2001. Et, pendant cette période, les départs de hauts responsables liés aux faibles résultats financiers obtenus sous leur direction ont explosé de 130%. Une enquête réalisée par le cabinet de conseil Booz Allen Hamilton auprès de 2500 grandes entreprises cotées en bourse a ainsi calculé la durée de vie d’un PDG à la tête d’une entreprise: elle est passée de 9,5 ans en 1995 à 7,3 ans en 2001. Cette précarité accrue aux postes de direction est à mettre au compte, selon cette enquête, de «l’impatience croissante des actionnaires» qui n’hésitent plus, lorsque les retours sur investissement ne correspondent pas à leurs attentes, à sanctionner les dirigeants.

Charles Lucier, vice-président de Booz Allen Hamilton compare désormais un PDG à un athlète professionnel de haut niveau: des gens relativement jeunes, très bien rémunérés dont la carrière s’achève dès que le niveau de leurs performances n’atteint plus le maximum. Et, en dépit des idées généralement admises, alors que les Etats-Unis apparaissent comme le bastion d’un capitalisme basé sur la performance, les PDG européens sont actuellement davantage exposés à être démis pour résultats insuffisants que leurs collègues d’outre-Atlantique. La valse des fauteuils de direction augmente deux fois plus vite en Europe qu’aux Etats-Unis et les «licenciements» pour mauvais résultats concernent plus d’un départ sur trois en Europe contre seulement 22% en Amérique du Nord.

Place aux jeunes

Le remplacement précipité d’un dirigeant par un autre, qui touchait, chaque année, 6% des 2500 plus grandes entreprises en 1995, en concerne désormais plus de 11% par an. Cela entraine, par la force des choses, un certain rajeunissement des cadres. On devient PDG de plus en plus tôt: aux Etats-Unis l’âge moyen d’accession aux responsabilités majeures dans l’entreprise est passé d’un peu plus de 50 ans en 1995 à moins de 49 ans en 2001. En Europe, on devenait PDG à plus de 52 ans en 1995 contre 49 ans en 2001. Seule exception, l’Asie où l’âge d’arrivée à la tête d’une grande entreprise est en recul de 57 ans à plus de 60 ans pendant la même période.

Mais le risque de se faire éjecter sans ménagement de la direction d’un groupe n’est pas également partagé dans tous les secteurs d’activités. Le lien est très net entre les accidents de carrière et les résultats boursiers. C’est pourquoi les démissions plus ou moins volontaires sont plus nombreuses dans le secteur des télécommunications, de l’énergie et beaucoup moins dans les entreprises de matériaux et les services financiers. On peut rester plus de dix ans à la tête d’un groupe financier tandis que la moyenne est de quatre ans seulement à la direction d’une entreprise de télécommunications. Les dirigeants sont plus jeunes dans ces activités risquées: 45 ans dans le secteur des technologies de l’information contre plus de 53 ans en moyenne dans les entreprises de matériaux.

A lire aussi :
Vivendi : les copains par dessus bord
(l'Edito économique, Norbert Navarro, 3 juillet 2002)


Jean-Marie Messier : grandeur et décadence des stars
(l'Edito économique, Norbert Navarro, 2 juillet 2002)



par Francine  Quentin

Article publié le 02/07/2002