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Union africaine

L’adieu à l’OUA

Lundi à Durban, en Afrique du sud, les dirigeants africains font leurs adieux à l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) qui s’est battue depuis 1963 pour la décolonisation et le rassemblement politique du continent. Le lendemain, ils accueilleront la nouvelle Union africaine dont le chef d’Etat sud africain Thabo Mbeki sera le premier président en exercice.
De notre envoyée spéciale à Durban

«Au-delà des célébrations, l’Union africaine symbolise le passage à une nouvelle ère où les problèmes économiques seront au centre des débats afin que l’Afrique puisse s’accrocher au train de la mondialisation», nous confie un ministre des Affaires étrangères d’Afrique centrale. «L’OUA était une maison vieille de près de 40 ans qui avait besoin de ravalement», ajoute-t-il.

Le règlement pacifique des conflits, tout comme le NEPAD, le Nouveau partenariat pour le développement économique de l’Afrique, seront de toute façon au menu des deux sommets qui examineront surtout l’état d’avancement des organes de l’Union africaine.

A l’instar de l’Union européenne, une Commission africaine remplacera le secrétariat général de l’OUA. Mais selon plusieurs sources ministérielles, le sommet devrait prolonger d’un an, pendant une «période intérimaire», les tâches de l’actuel secrétaire général, l’Ivoirien Amara Essy même s’il ne garde pas le même titre.

«L’Union entrera de toute façon en vigueur ici à Durban même s’il faut poursuivre l’élaboration et la mise en place des nouvelles institutions», explique un expert de l’OUA. Les ministres des Affaires étrangères des quelque 53 membres de l’OUA ont d’ailleurs préparé les ordres du jour des deux réunions, alors que les chefs d’État commençaient déjà à arriver en cette fin de semaine, le secrétaire général de l’ONU Kofi Annan, qui est ghanéen, étant également attendu comme le veut la tradition.

Habitué des sommets de l’OUA, le président de l’Autorité palestinienne Yasser Arafat a dû décliner l’invitation de l’organisation panafricaine car les Israéliens ont refusé de s’engager à autoriser son retour, précisent des membres de l’OLP présents à Durban.

Selon toutes les indications, le siège de Madagascar restera vide même si le nouveau président Marc Ravalomana, resté seul après le départ de son rival Didier Ratisrka du pays, a déjà été reconnu par plusieurs pays occidentaux en commençant par les États-Unis.

«Après tout il est venu à la tête de l’État à la suite d’un coup de force même s’il ne fait aucun doute qu’il est désormais le président malgache», soulignent en privé plusieurs délégués. Pour eux, il s’agissait de rester fidèle aux principes adoptés par l’OUA qui condamne les coups de force, et pousser Marc Ravalomana à plus d’ouverture pour éviter des représailles entre Malgaches, «ce à quoi il s’est engagé», précise l’un d’eux.

Le président du Zimbabwe Robert Mugabe, dont la politique à l’égard des fermiers blancs et la répression envers son opposition politique est critiquée par le communauté internationale, est en revanche attendu à Durban.

«On peut critiquer la méthode mais pas le fond du problème qui est qu’une minorité de fermiers blancs détient la majorité des meilleures terres et que la Grande-Bretagne n’a pas tenu ses promesses faites au moment de l’indépendance de financer les indemnisations des fermiers blancs acceptant de vendre», souligne un responsable africain pour qui Mugabe reste un combattant de la liberté.

La popularité du chef d’État zimbabwéen est aussi grande parmi le petit peuple sud-africain qu’on peut côtoyer, y compris plusieurs chauffeurs de taxi, d’autant plus que les observateurs sud-africains n’avaient rien trouvé à redire au déroulement du processus électoral dans ce pays.

Réunions en marge du sommet

L’Afrique du Sud, qui a aussi un problème de distribution de terres entre Blancs et Noirs depuis la chute du régime d’apartheid, s’est longtemps refusée à condamner Mugabe. Mais le président Thabo Mbeki, tout comme son homologue nigérian Olusegun Obasanjo, ont fini par céder aux pressions internationales, en se prononçant pour la suspension du Zimbabwe du Commonwealth.

Parmi les vedettes du sommet figure bien sûr le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, qui a tout fait pour pousser à la création des Etats-Unis d’Afrique et qui s’est finalement rabattu sur l'idée de créer une Union africaine, ne ménageant pas ses pétrodollars pour persuader les réticents qui ne voyaient pas pourquoi remplacer l’OUA, qui avait fait ses preuves malgré de nombreuses faiblesses, par une nouvelle institution.

«Tout le monde est d’accord pour lancer l’Union africaine mais il faut aller vite pour régler les conflits… Nous allons essayer d’améliorer les textes pour rendre l’Union plus forte», souligne le chef de la diplomatie libyenne Ali Triki.

Des contacts sont engagés en marge des réunions entre Rwandais et représentants de la RDC afin d’organiser en marge du sommet une rencontre entre les dirigeants des deux pays, Paul Kagame et Joseph Kabila pour essayer de régler le conflit dans cette région des Grands Lacs…

Ali Triki estime aussi que les pouvoirs du président de l’Union doivent être renforcés et qu’on ne pourra pas faire grand chose si on maintient la règle de la majorité des deux tiers. Il se prononce aussi pour la formation rapide d’une force de sécurité africaine, indiquant que la Libye a déjà pris des contacts dans ce sens avec plusieurs pays africains dont l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Ethiopie et le Nigeria.

Concernant le NEPAD qui a fait ce dimanche l’objet d’une réunion séparée du comité de mise en œuvre, il affirme que «l’Afrique n’a rien eu au dernier sommet du G8 à Kananaskis (au Canada)» mais que c’est aux Africains d’assumer le développement du continent. Il cite à ce propos des initiatives de la Libye avec le Nigeria pour l’aide médicale en Afrique et la reconstruction de la Sierra Leone.

Prélude à l’arrivée du «Guide de la révolution», les Libyens sont arrivés en nombre dans une ville dont les abords de la conférence et l’intérieur du Centre de conférence internationale (CCI) ainsi que les grands hôtels où logent les délégués sont quadrillés par un impressionnant service d’ordre, de policiers, de membres des services de sécurité et de militaires sud-africains blancs et noirs.

«Tout a changé depuis le 11 septembre – jour des attaques terroristes contre les Etats-Unis», nous expliquent-ils l’air sérieux.

A écouter également :
Ahmadou ould Abdallah Président de la Coalition Mondiale pour l'Afrique (Invité de Pierre Ganz, le 08/07/2002).



par Marie  Joannidis

Article publié le 08/07/2002