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Proche-Orient

Mitzna : la relève du parti travailliste

Le maire de Haïfa, Amram Mitzna, s’est porté candidat à la direction du parti travailliste. Cet ancien général, «colombe» notoire, défie l’actuel ministre de la Défense Benyamin Ben Eliezer.
Benyamin Ben Eliezer, le ministre de la Défense d’Ariel Sharon qui est aussi le président du parti travailliste, se préparait à affronter ce dernier lors des élections anticipées dont Sharon laisse planer la menace, alors que l’échéance normale est en octobre 2003. A cette fin, il commençait à prendre ses distances avec une politique à laquelle il est pourtant étroitement associé. Il avait réussi à évincer ses principaux rivaux en battant le président de la Knesset Avraham Burg à la direction du parti, aux tendances pacifistes. L’analyse du général Ben Eliezer était simple : les Israéliens veulent de la sécurité, il faut donc concurrencer Ariel Sharon sur son propre terrain en exerçant une poigne de fer contre les Palestiniens.

Faute de concurrence –celle de l’ancien syndicaliste Haïm Ramon ne le menaçait pas vraiment et Shimon Peres, le ministre des Affaires étrangères, étant largement marginalisé– Ben Eliezer régnait sans partage à la tête du parti travailliste et pouvait donc se consacrer à sa prochaine bataille : devenir Premier ministre à la place d’Ariel Sharon. Au terme d’innombrables crises et de psychodrames dont la politique israélienne a le secret, Ben Eliezer et Peres ont constamment réussi à contrer ceux des travaillistes qui demandent le retrait d’un gouvernement où ils servent de faire-valoir à la politique menée par Sharon.

L’espoir renaît dans le camp de la paix

Pourtant, les premiers signaux inquiétants sont là : le départ sans bruit de nombreux adhérents du parti travailliste, et, plus visible, la démission fracassante de la Knesset la semaine dernière de Shlomo Ben Ami, l’ancien ministre des Affaires étrangères d’Ehoud Barak qui ne cachait pas sa volonté de refonder le parti travailliste et d’en prendre la tête.

Mais l’initiative surprise, ce mardi, du maire de Haïfa leur a coupé l’herbe sous les pieds. Amram Mitzna, général de réserve, s’est ouvertement posé en successeur de Ben Eliezer sur une base politique résolument opposée : reprise sans condition des négociations avec les Palestiniens ou, à défaut, séparation unilatérale restituant aux Palestiniens 95 % de la Cisjordanie, retrait complet de Gaza et partage de Jérusalem-Est. Il a de même condamné le bombardement par un F-16 d’un immeuble de Gaza dans lequel le chef militaire du Hamas avait trouvé la mort, ainsi qu’une quinzaine de civils dont neuf enfants. Certes, l’opinion israélienne ne semble pas réceptive actuellement à ce genre de message, mais Mitzna a immédiatement reçu le soutien d’influentes personnalités travaillistes et sa popularité à l’intérieur du parti dépasse celle de son actuel président. Surtout, le camp de la paix veut croire que la déclaration de candidature de Mitzna va provoquer un électrochoc dans une opinion publique troublée, en attente d’une alternative à la politique de Sharon.

Quant aux dirigeants travaillistes hostiles à Ben Eliezer, ils espèrent que Mitzna amène avec lui de nouveaux adhérents par milliers, inversant une situation dans laquelle l’actuel ministre de la Défense bénéficie encore du soutien d’une majorité de l’appareil du parti. Certes, Amram Mitzna a contre lui un handicap majeur : il n’a jamais exercé de responsabilité gouvernementale. Il objecte que depuis neuf ans, il dirige avec succès l’une des plus grandes villes du pays, dans laquelle réside une importante communauté arabe.

En revanche, ce général de 57 ans bénéficie d’une réelle expérience militaire, ayant notamment commandé la région centre, qui comprend la Cisjordanie, lors de la première Intifada. Et surtout, en pleine guerre du Liban en 1982, cet officier israélien n’avait pas craint de s’opposer à la stratégie de son ministre de tutelle, un certain Ariel Sharon.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 14/08/2002