Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Proche-Orient

Palestiniens et Américains campent sur leurs positions

Le séjour à Washington de la délégation palestinienne, venue rencontrer les principaux responsables américains, était considéré comme une étape importante dans la relance des négociations de paix sur le conflit au Proche-Orient. Il était surtout l’un des plus importants contacts entre Palestiniens et Américains depuis le discours, le 24 juin dernier, du président Bush dans lequel il avait ouvertement désavoué le président Arafat et appelé à la mise en place d’une nouvelle direction palestinienne qui ne soit pas «compromise dans le terrorisme». Mais ces discussions n’ont fait que confirmer le fossé qui séparent les deux parties, notamment sur la création d’un Etat palestinien et sur l’avenir du président Arafat.
Avant même le début des discussions, le dialogue entre Palestiniens et Américains semblait voué à l’échec. Alors que l’administration américaine conditionne notamment la création d’un Etat palestinien à la mise à l’écart du président Arafat, Saëb Erakat, le chef de la délégation palestinienne, a affirmé, peu après son arrivée à Washington, que «la seule alternative à Arafat était le chaos». Le principal négociateur palestinien, qui était accompagné des ministres de l’Intérieur et de l’Economie, a d’ailleurs réitéré sa position à la suite des entretiens jeudi soir avec le secrétaire d’Etat Colin Powell. Il a en effet clairement indiqué qu’en se rendant à Washington, il n’était pas venu se poser en concurrent du président de l’Autorité palestinienne. Il a en outre affirmé que sa délégation était «pleinement mandatée» par le président Arafat et qu’elle n’était «pas composée de francs tireurs», comme le souhaitaient pourtant vivement les autorités américaines. «Nous voulons, a ainsi insisté Saëb Erakat, que l’on respecte le choix démocratique du peuple palestinien». «Le président Arafat a été en effet élu par le peuple palestinien», n’a-t-il eu de cesse de marteler, s’opposant ainsi fermement et ouvertement à la position du président Bush.

Colin Powell, qui est intervenu que très brièvement à l’issue de ses discussions avec la délégation palestinienne, a pris soin d’éviter de faire une quelconque allusion au président Arafat. Mais un porte-parole du département d’Etat, Philip Reeker, a toutefois laissé entendre que le chef de l’Autorité palestinienne était toujours dans le collimateur de Washington qui maintient sa ferme volonté d’avoir pour interlocuteurs d’autres responsables palestiniens. Il a en effet réaffirmé qu’il existe aujourd’hui «un mouvement au sein de la communauté palestinienne pour une nouvelle direction qui soit capable de préparer le peuple et les institutions palestiniennes pour un Etat». Cette position américaine a cependant été vivement désavouée par les Palestiniens qui y voient une ingérence dans leurs affaires internes. Saëb Erakat a ainsi souligné que «les Palestiniens n’avaient pas besoin que quiconque leur dicte les réformes à entreprendre». «Nous avons besoin de jalons, d’un mécanisme de mise en œuvre et d’échéances», a-t-il notamment insisté en rappelant que le président Bush avait lui-même affirmé à maintes reprises que l’objectif à terme était la création d’un Etat palestinien. Le négociateur palestinien a en outre vivement souhaité que l’administration américaine cesse de «faire de la gestion de crise» pour «se concentrer sur la solution» qu’est la création de l’Etat palestinien.

Situation critique sur le plan humanitaire

Si, sur les plans politique et sécuritaire, les discussions entre Américains et Palestiniens se sont déroulées dans un climat tendu, elles semblent avoir été en revanche beaucoup moins crispées sur la question de la situation humanitaire dans les territoires occupés que les Palestiniens jugent «catastrophique», notamment sur le plan sanitaire. Ces derniers se sont d’ailleurs félicités du fait que Colin Powell soit «très conscient» de la gravité de la situation. Le secrétaire d’Etat américain a en effet affirmé s’être entretenu de la question avec Kofi Annan, le secrétaire général des Nations unies qui doit dépêché dans quelques heures un envoyé personnel chargé d’évaluer la crise humanitaire dans les territoires occupés où 800 000 Palestiniens sont soumis à de sévères restrictions israéliennes.

L’Agence américaine chargée de l’aide international (USAID) a par ailleurs publié en début de semaine un rapport alarmant sur la malnutrition des enfants palestiniens qui s’est très sérieusement aggravée depuis le déclenchement de l’Intifada il y a 22 mois. Selon ce rapport, près d’un quart des enfants palestiniens de moins de cinq ans souffrent aujourd’hui de malnutrition chronique ou aggravée. L’Agence américaine rejette largement la responsabilité de cette crise sur l’Etat hébreu qui soumet, selon elle, depuis plusieurs mois la population palestinienne à un bouclage draconien.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 09/08/2002