Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Afghanistan

Khatami apporte son soutien à Karzaï

Après plusieurs reports, le président iranien se rend finalement à Kaboul pour apporter son soutien au gouvernement de Hamid Karzaï et sceller des relations stratégiques entre les deux pays.
De notre correspondant à Téhéran

Accompagné de plusieurs de ses ministres, Mohammad Khatami a été chaleureusement accueilli par Hamid Karzaï, mais aussi le ministre de la Défense, Mohammad Qassim Fahim, le ministre des Affaires étrangères, Abdullah Abdullah, et Ismaïl Khan, le puissant gouverneur de Hérat, province de l'ouest de l'Afghanistan frontalière de l'Iran. «Cette visite est destinée à apporter le soutien de l'Iran à la reconstruction, à la stabilité et à la sécurité de l'Afghanistan», a affirmé le président Khatami, qui a passé au total seize heures dans la capitale afghane. C’est la première fois depuis quarante ans qu’un chef d’Etat iranien se rend en Afghanistan. Ce qui montre l’importance de cette visite, qualifiée d’historique par la presse iranienne mais aussi par les responsables afghans.
Pourtant, la visite du président Khatami intervient tardivement et après plusieurs reports. En effet, le président pakistanais Pervez Musharaf, dont le pays soutenait pourtant le régime des Taliban, s’est rendu immédiatement à Kaboul après la prise des fonctions du nouveau gouvernement. Mais le président iranien n’a pas profité de l’occasion, même si l’Iran a été le principal soutien des forces de l’Alliance du Nord depuis de nombreuses années. De même, en juin dernier, au moment de l’ouverture de la Loya Jorga (l’assemblée des sages afghans), le président iranien a reporté sa visite pour éviter de rencontrer l’ancien roi Zaher Shah, qui rentrait au même moment en Afghanistan. Il ne fallait pas légitimer le retour d’un ancien monarque.
En tout cas, malgré l’opposition de certains milieux conservateurs, qui accusent Hamid Karzaï d’être pro-américain, le président Khatami a apporté un soutien remarqué au nouveau pouvoir afghan. «Nous n'avons pas l'intention d'interférer dans le travail de ce pays et aucun pays ne devrait accepter l'ingérence d'autres pays dans les affaires de l'Afghanistan, a affirmé le président Khatami. La stabilité et la paix sont très importantes, la stabilité de l'Afghanistan est la stabilité de notre pays», a-t-il ajouté en souhaitant un renforcement du gouvernement central afghan. Surtout, il a semblé accepter la présence des troupes américaines en Afghanistan. «La présence (de troupes) d'autres gouvernements n'est justifiable que s'ils coopèrent avec le gouvernement afghan pour la reconstruction. Sinon, il n'y a pas de justification à leur présence ici», a-t-il souligné.
Une prise de position qui a visiblement satisfait Hamid Karzaï, qui a tenu à minimiser les rivalités entre l’Iran et les États-Unis à propos de l’Afghanistan. «Les deux pays, l'Iran et l'Amérique, sont des amis de l'Afghanistan. Ils ont aidé le peuple d'Afghanistan et nous ont aidés à nous libérer des mains des terroristes…Nous pouvons les aider à devenir amis et ouvrir la voie pour de meilleures relations entre eux. Nous n'hésiterons pas à faire quoi que ce soit qui puisse aider», a conclu Hamid Karzaï. En effet, l’Iran et les États-Unis ont collaboré indirectement pour permettre la chute des Taliban. De même, malgré les accusations américaines, l’Iran a livré de nombreux membres d’Al Qaïda qui avaient tenté de fuir l’Afghanistan via l’Iran.

«Nous avons annoncé que, d'aucune manière, l'Iran ne serait utilisé par des groupes terroristes qui ont été en Afghanistan… Dès que nous avons connaissance de la présence de gens susceptibles d'avoir des liens avec ces groupes nous prenons des mesures. Dès que nous avons retrouvé des gens qui ont été membres d'Al-Qaïda, nous les avons arrêtés et renvoyés dans leurs pays», a ajouté le président iranien. Une manière de confirmer les déclarations du ministre saoudien des Affaires étrangères concernant l’extradition vers l’Arabie Saoudite de seize membres d’Al Qaïda qui étaient entrés en Iran après la chute des Taliban.

Faciliter le retour des réfugiés afghans

En tout cas, pour le gouvernement iranien, un Afghanistan pacifié, même pro-américain, présente de meilleurs avantages que le régime des Taliban. D’ailleurs, le parlement iranien vient d’approuver une aide de 550 millions de dollars pour la reconstruction de l’Afghanistan. En effet, Téhéran espère que le retour de la stabilité et la sécurité permettra de régler le problème du trafic de la drogue. Une très grande partie de la drogue produite en Afghanistan arrive en Iran pour être acheminée en Europe ou dans les pays arabes. Mais cette drogue est de plus en plus distribuée en Iran même, qui compte actuellement plus de deux millions de toxicomanes.
De même, les Iraniens espèrent que le retour à la normal chez leur voisin favorisera le retour des deux millions et demi de réfugiés afghans qui vivent actuellement en Iran. Téhéran avait signé un accord avec le HCR pour favoriser le retour volontaire des réfugiés. Mais le gouvernement iranien vient de lancer un ultimatum aux Afghans, n’ayant pas de titre de séjour régulier. Ils ont jusqu’au 27 août pour se présenter à la police pour les ramener à la frontière. Au-delà de cette date, ils sont considérés comme des clandestins et la police prendra les mesures nécessaires pour les renvoyer dans lepays. Téhéran espère que le départ des réfugiés afghans permettra de créer des emplois pour les trois millions de chômeurs iraniens.

Enfin, la visite du président Khatami est une réponse aux déclarations des responsables américains qui accusent régulièrement l’Iran de s’immiscer dans les affaires intérieures afghanes. En effet, Hamid Karzaï a affirmé que l’Iran était un partenaire stratégique pour son pays.

Ecoutez également:
Jean Piel, journaliste RFI.



par Siavosh  Ghazi

Article publié le 13/08/2002