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Afghanistan

La Loya Jirga prolonge le débat, faute d’accord

La Loya Jirga, grande assemblée traditionnelle afghane, va poursuivre ses travaux au delà de dimanche soir, date initialement prévue pour sa séparation. En effet, les discussions achoppent sur la composition et le rôle de la future assemblée nationale, dont la création a été demandée par Hamid Karzaï, élu jeudi à la tête du gouvernement de transition. Cette assemblée nationale devrait approuver la composition du gouvernement intérimaire qui devrait prendre ses fonctions le 22 juin et mener le pays à des élections générales, dans deux ans.
Avec 1 295 voix sur les 1 555 suffrages exprimés par les délégués de Loya Jirga, Hamid Karzaï est depuis jeudi le nouveau chef d’Etat de l’Afghanistan post-Taliban. L’ancien chef du gouvernement intérimaire, mis en place après la chute du régime du mollah Omar, obtient ainsi la reconnaissance de ses pairs pour son bilan réputé excellent dans la gestion, ces six derniers mois, des affaires du pays. Au cours de cette période en effet, l’Afghanistan a été relativement épargné par la violence, mis à part quelques affrontements entre factions rivales dans l’Est et le nord du pays. La vie a repris son cours normal dans plusieurs grandes villes et la région de Kaboul a été entièrement pacifiée. Plus d’un million de réfugiés sont en outre rentrés chez eux, preuve d’une stabilisation du pays.

En plébiscitant Hamid Karzaï, les délégués de la Loya Jirga ont sans doute également voulu saluer la personnalité de ce fin politique qui a réussi au cours de ces derniers mois à faire l’union autour de lui. Ce Pachtoune, il est vrai largement soutenu par les Etats-Unis, a en effet dirigé un gouvernement largement dominé par les hommes de l’Alliance du Nord, en majorité Tadjiks. Il a su trouvé les mots justes et la bonne attitude pour que l’Afghanistan ne sombre pas à nouveau dans une guerre fratricide entre les différentes ethnies qui le composent.

Les femmes, nouvelle force politique ?

La tâche qui attend le nouveau chef de l’Etat est loin d’être aisée. Sa première mission sera en effet de former un gouvernement de transition équilibré et approuvé par la Loya Jirga, qui devra mener le pays aux élections générales prévues dans dix-huit mois. L’Alliance du Nord -coalition des minorités ethniques du nord du pays- qui s’était taillée la part du lion dans le gouvernement intérimaire, devrait perdre ainsi quelques portefeuilles au bénéfice des Pachtounes, le principal groupe ethnique de l’Afghanistan. Après la mise en place de son équipe, Hamid Karzaï devra également définir une politique économique et judiciaire, s’atteler à réformer la constitution et surtout s’attaquer de front aux problèmes de sécurité dans un pays où les chefs de guerre ont traditionnellement imposé leur loi.

Si l’élection de Hamid Karzaï à la tête de l’Afghanistan n’était qu’une formalité, la candidature d’une femme à ce poste a en revanche été la grande surprise de ce scrutin. Sept mois après la chute d’un régime qui avait interdit toute éducation, toute vie active et tout rôle public aux femmes, Massouda Jalal a en effet réunis plus de 10% des voix lors de l’élection par la Loya Jirga du nouveau chef de l’Etat. C’est la preuve, a-t-elle affirmé, que «les femmes représentent désormais une force politique en Afghanistan», même si elle admet toutefois avoir été déçue par son résultat. Cette ancien enseignante en médecine avait en effet espéré obtenir au moins les 200 voix des femmes présentes à la Loya Jirga mais n’a pu compter que sur 171 suffrages.

«Mon score, a par ailleurs affirmé Massouda Jalal, renforce la position des femmes afghanes et maintenant les gens nous prendront plus au sérieux». Sans doute un vœux dans un pays où l’imam de l’une des principales mosquées de Kaboul a récemment affirmé que selon les enseignements de l’islam, «les femmes n’étaient pas intelligentes» et étaient «incapables d’assumer la fonction du chef de l’Etat».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 16/06/2002