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Développement durable

La société civile en ordre dispersé

En marge des débats officiels du sommet de la Terre, les organisations non gouvernementales sont réunies à Johannesburg. Dans une immense cacophonie, se mêlent les associations les plus sérieuses et les groupes les plus inattendus.
De notre correspondante à Johannesburg

Près de 5000 personnes ont convergé lundi matin au centre Nasrec, qui abrite le Forum des ONG (organisations non gouvernementales), pour écouter le discours que devait prononcer Nelson Mandela. L’ancien président n’est pas venu, sans explications sur son absence. Pour les membres de la société civile, cette déception n’a pas occulté les enjeux du Sommet mondial sur le développement durable: l’avenir de la planète et de l’humanité.

Pour certains, l’exercice paraît d’ores et déjà voué à l’échec. «Rio n’a rien donné, Johannesburg n’apportera que des mots», affirment quatre Sud-Coréens venus d’eux-mêmes, en dehors de toute association. L’un d’entre eux, Choi Byong-Soo, artiste et écologiste, sculpte des pingouins de glace aux portes du centre Nasrec. Ses sculptures fondent au soleil, tombant les unes après les autres, illustration de la menace que représente le réchauffement de la Terre pour l’Antarctique et les glaciers.

Qualifiée samedi de «mauvais signe» par Jan Pronk, ministre néerlandais de l’environnement et envoyé de Kofi Anan, le secrétaire général des Nations unies, l’absence du président américain George Bush à Johannesburg relève du «boycott» pur et simple pour Chaitanya Kalevan, un membre de Just one world (Juste un monde), une ONG canadienne anti-mondialisation. «Comment voulez-vous qu’on arrive à quelque chose, alors que la seule super-puissance du monde n’est pas là ?», demande-t-il, malgré la présence d’une délégation américaine.

Pour d’autres, la possibilité d’obtenir des Etats un plan d’action concret, dix ans après Rio, n’est pas tout à fait exclue. L’Australienne Pauline Coll, membre de la délégation oecuménique du Conseil mondial des Eglises, attend beaucoup de l’Europe dans les négociations entre pays riches et pays pauvres. Elle veut croire en l’existence d’une «volonté politique qui crééra un monde durable». Dénommé «groupe majeur», quelque 3000 grandes ONG ont été accréditées au sommet officiel pour faire du lobbying auprès des délégations de leurs gouvernements respectifs, avant l’arrivée d’une centaine de chefs d’Etat et de gouvernement, à la fin de la semaine.

Des objectifs très variés

Claude Martin, directeur général du WWF, l’une des ONG internationales les plus influentes, estime «très décevant» le projet de déclaration finale de la conférence. «Jusqu’à présent, ce document ne donne pas les actions planifiées et tangibles qu’il faudrait pour résoudre les problèmes d’environnement de la planète», a-t-il déclaré hier. Parmi ces actions, Claude Martin a mentionné l’approvisionnement en énergie «propre et accessible» à 2 millions de personnes qui en sont privées dans le monde, et à un objectif clair qui verrait les énergies renouvelables représenter 10 % de la consommation globale dès 2010.

Alors que les subventions agricoles américaines et la question de l’accès des marchés du Nord aux pays du Sud sera posée à Johannesburg, Emmanuel Sama, représentant camerounais de l’Institut africain pour le développement économique et social (Inades), espère que le sommet permettra de savoir «comment éradiquer la pauvreté, un fléau qui frappe surtout les paysans».

Du côté des ONG françaises, regroupées dans un Collectif Joburg 2002, les objectifs sont doubles. Pour Benoît Théau, porte-parole de ce groupe, Johannesburg devrait déboucher sur un «plan d’action très concret qui engage les Etats». Le sommet verra par ailleurs des «espaces de discussion et de dialogue se créer, très importants puisque de plus en plus d’acteurs interviennent dans ce dialogue avec des thèmes de plus en plus larges».

Beaucoup sont en effet venus avec des objectifs très variés. Des femmes d’affaires chinoises, qui se prennent mutuellement en photo avec toute personne rencontrée, affirment être surtout là pour se faire connaître. L’Américaine Anele Heiges, elle, représente une association qui lutte contre le trafic d’enfants en provenance de l’ex-Union soviétique. Venue pour «apprendre», elle avoue chercher un lien avec l’environnement. «Il faut que nous arrêtions d’acheter et de vendre des êtres humains, d’acheter et de vendre la Terre», hasarde-t-elle.

Quant au contre-sommet organisé par des ONG sud-africaines pour faire «capoter» un autre «sommet de la mondialisation», ses efforts paraissent compromis. Une première manifestation pacifique de 500 personnes, organisée sans autorisation samedi soir aux abords de l’Université du Witwatersrand, a été dispersée par la police. Nkosazana Dlamini-Zuma, la ministre sud-africaine des Affaires étrangères, a affirmé que «ce sommet ne serait pas celui de l’anarchie».

A lire également:
Johannesburg : les propositions de la France, l'éditorial de Norbert Navarro (27/08/2002)

A écouter également:

Eoliennes en Allemagne Magazine Reporter présenté par Laurent Berthault. (20'00")

Reportages: l'antenne de RFI de 6h45 à 7h00 TU (mardi 27 août 2002, 15'00").

Opération de dépollution en Turquie par Jérôme Bastion, interrogé par Emmanuel d'Abzac (mardi 27 août 2002, 5'15").

Quelles priorités pour le secteur de l'énergie en Afrique à l'horizon 2020 ?
Jean-Philippe Thomas de l'ONG Enda-Energie au micro de Boniface Vignon (Invité Afrique, mardi 27 août 2002, 6'01").



Article publié le 27/08/2002