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Mali

Pas de majorité à l’Assemblée

En attendant la confirmation ou l'infirmation des résultats des législatives maliennes par la Cours constitutionnelle, un constat: aucun parti politique n'enlève la majorité des 147 sièges.
De notre correspondant à Bamako

La photo d'arrivée est de plus en plus claire. L'Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma) vient en tête avec 57 sièges de députés. Le Rassemblement pour le Mali de l'ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Kéita 31 sièges, le CNID de Me Mountaga Tall signe son grand retour avec 12 sièges de députés. 12 sièges également pour les partisans déclarés du président Amadou Toumani Touré regroupés au sein d’ACC.

Le Sadi de l'ancien leader estudiantin Oumar Mariko fait une entrée fracassante dans l'hémicycle avec six députés, alors que le MPR du Dr Choguel Maïga, héritier politique du Général Moussa Traoré fronce les sourcils avec quatre députés. Voilà pour les chiffres. Aujourd'hui le président Touré doit se frotter les mains. Sans parti politique, il a été inspiré de rester hors du marigot politique malien avec un couplet: «Je gouvernerai sans états d'âme avec la future majorité parlementaire».

Mais voilà qu'aucun parti n'a cette majorité. Avec un peu de politique fiction on peut imaginer «ATT» de son palais présidentiel qu'il vient d'emménager poser publiquement, la question suivante: «Qui veut gouverner avec moi ? Et qui veut aller goûter aux délices de l'opposition?». A la deuxième question, la réponse est nette: Personne. A la première, tout le monde répondrait sûrement «Moi !». Or, dans un parlement, il faut une majorité et une opposition. Les partis politiques maliens l'ont bien compris. Alors les négociations de coulisse ont bel et bien commencé avec un credo «pousser l'adversaire dans l'opposition».

Ces négociations de coulisses sont menées par les deux blocs politiques qui dominent désormais la vie politique malienne. D'abord l'Alliance pour la République et la démocratie (ARD), pilotée par l'Adéma .Tous les partis de cette alliance totalisent 64 sièges. Son premier vice-président Soumeylou Boubeye Maïga est très affairé. Insubmersible, il commente pour RFI tout en sirotant un thé à la menthe: «La situation est intéressante. Ceux qui nous avaient vite enterré en feront pour leurs frais. L'Adéma seul à plus de députés que tous les partis de l'alliance dénommée «Espoir 2002» réunis. Question: Pouvez-vous former la majorité, et avec qui ?». Réponse : «Nous sommes en phase d'évaluation, voyons venir». Décodage de ceux qui connaissent l'homme : «L'affaire est dans le sac». C'est vrai qu'à son domicile, c'est un peu le ballet. sept candidats indépendants y ont été aperçus. Exactement le nombre qu'il faut pour que le parti de l'ancien président malien Alpha Oumar Konaré devient majoritaire.

Cerise sur le gâteau, Soumaïla Cissé, l'ancien candidat du parti à la présidentielle a aussi pris son bâton de pèlerin, en oubliant les «dents légitimes» qu'il a contre certains de ces «amis politiques». De l'autre côté de la ville, sur la route qui mène en Guinée, le domaine somptueux de l'ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Kéita, pilier de l'alliance baptisé «Espoir 2002». Un paon se promène majestueusement dans la cour. Nous sommes aussi ici en pleine négociation. Va et vient, discussion en aparté. «Nous n'allons pas nous laisser faire. Les maliens ont clairement affirmé qu'ils souhaitent le changement. et nous répétons:Nous sommes en négociation avancée. Avec nos alliés nous avons déjà une cinquantaine de députés».Rideau.

Les Maliens fâchés avec les urnes
Sollicités par tous, les candidats indépendants d'un côté et de l'autre les partisans déclarés d’ATT tapis dans une alliance dénommée «ACC» font leurs calculs. Rien d'officiel pour le moment. En fait tout le monde attend ici le verdict des neufs sages de la Cour. Vont-ils raboter ? Gommer des chiffres ? Les résultats ne vont-ils pas donner une autre photo des forces politiques en présence? Inquiétudes légitimes quand on sait que la Cour a annulé à la présidentielle plus de 500 000 voix et plus de 160 000 voix lors du premier tour des législatives.

En attendant, deux observations. Les Maliens sont fâchés avec les urnes. Le taux de participation des législatives dans la capitale malienne est de 14%. Il est plus élevé à l'intérieur du pays. Les exégètes ont beau avancé des raisons: Saison pluvieuse, incapacité des politiciens de mobiliser, histoire de désamour entre la classe politique malienne et son électorat, dégoût des électeurs pour la triche, ils manque des clés pour comprendre ce divorce entre électeurs et politiques maliens. D'où la proposition du président de la République: organiser après les élections, une table ronde pour analyser le phénomène.

Ensuite pour la première fois depuis dix ans, les Maliens ont participé à des législatives pluralistes, celles de 1997, ayant été boycotté par l'opposition. Aujourd'hui, selon une expression locale, «on sait qui pèse quoi». Deux surprises. Le Parena de Tiébilé Dramé n'obtient qu'un seul député contre sept dans l'ancienne assemblée. L'homme proche du Général sait cependant rebondir. Le MPR, malgré la libération de «son père spirituel» le général Moussa Traoré (avant les législatives) n'a pu tirer son épingle du jeu. Enfin, la future assemblée nationale malienne sera animée avec l'élection de grosses cylindrées. Citons quelques uns. Me Mountaga Tall, juriste émérite, l'ancien bâtonnier de l'ordre des avocats du Mali Me Kassoum Tapo, et surtout l'ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Kéita du RPM. L'homme est connu pour son amour de la langue de Molière. Mais aussi pour ces célèbres phrases latines, vestiges de son passage à la Sorbonne.




par Serge  Daniel

Article publié le 02/08/2002