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Pétrole

Les cours du brut oscillent au gré de la crise irakienne

A la hausse ces derniers jours de crainte d’une attaque américaine contre l’Irak, les cours du pétrole ont chuté après le discours de Bush. Avant, peut-être, une nouvelle remontée.
Le premier effet tangible du discours prononcé jeudi aux Nations unies par George W. Bush a été une baisse sensible du cours du pétrole brut. Le prix du baril frôlait depuis plusieurs jours les 30 dollars en raison des craintes persistantes d'un conflit en Irak. A l'évidence, les opérateurs ont déduit que la décision américaine de passer par les Nations unies réduisait, ou du moins éloignait, la perspective d'une guerre. La réponse du vice-premier ministre irakien, Tarek Aziz les a fait repartir à la hausse.
C'est que les cours de l'or noir sont particulièrement sensibles («élastiques», disent les économistes) au contexte politique du Moyen-Orient. L'une des raisons de la hausse récente des prix du pétrole, outre le fait que les membres de l'Opep respectent plutôt mieux que d'ordinaire leur quota, est la chute des enlèvements de pétrole irakien qui a tendu l'offre sur le marché des hydrocarbures. En effet, devant la crainte d'une interception éventuelle de leur cargaison par la flotte américaine, nombre d'armateurs s'abstiennent actuellement d'acheter leur pétrole à l'Irak. De plus, l’approche de l’hiver ne peut que relancer la demande d’hydrocarbures.

Mécaniquement, lorsque l'offre se réduit face à une demande qui ne fléchit pas autant (malgré le ralentissement de la croissance observé partout depuis un an), d'une part les prix se tendent, et d'autre part, les stocks se réduisent. C'est ainsi qu'en juillet, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les stocks des pays industrialisés ont baissé de 25 millions de barils pour atteindre 895 millions et qu'au mois d'août, les stocks américains étaient descendus sous les 300 millions de barils.

Au gré des péripéties politiques

Le 11 septembre, la Commission européenne a adopté deux projets de directives prévoyant de porter à 120 jours de consommation les réserves stratégiques de l'Union européenne. Actuellement, l'obligation est limitée à 90 jours seulement. Ces directives doivent encore être approuvées par le Parlement européen et le Conseil européen pour être effectives. En ce qui concerne la France, ces directives n’auront pas besoin d’être transposées dans la législation nationale, puisqu’une loi datant de 1928 fait déjà obligation à l’État de garantir en permanence de stocks supérieurs ou égaux à 120 jours de consommation.
En tout état de cause, si l’existence de stocks stratégiques importants permet d’amortir la flambée des cours, le pétrole demeure une denrée extrêmement sensible à la situation politique du Moyen-Orient. Et pourtant, lorsque l’on analyse les crises passées, qu’il s’agisse de la révolution iranienne (1978-1979), de la guerre des pétroliers dans le Golfe (1984-1985) ou de la crise du Koweït (1990-1991) qui, toutes, se sont traduites par une flambée des prix pétroliers, l’analyse a posteriori a démontré qu’à aucun moment le marché pétrolier n’a été menacé d’une rupture d’approvisionnement car, à tout instant, l’offre disponible était en mesure de répondre à la demande.

En outre, il est hautement vraisemblable qu’une opération militaire en Irak se traduirait, d’une manière ou d’une autre, par un contrôle américain des réserves irakiennes de pétrole, les deuxièmes du monde après celles de l’Arabie Saoudite, ce qui devrait garantir durablement la stabilité des approvisionnements en hydrocarbures des pays occidentaux. En revanche, si, comme beaucoup le redoutent, des opérations militaires en Irak débordent et provoquent une instabilité dans l’ensemble du Moyen-Orient, les cours du brut remonteraient en flèche et oscilleraient au gré des péripéties politiques de la région tout entière. Autant dire que, face à tant d’incertitudes, le prix du baril a de fortes chances de jouer au yo-yo dans les semaines et les mois à venir.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 15/09/2002