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Etats-Unis

Le Congrès prêt à se rallier à Bush

La Chambre des représentants a donné son accord mercredi à une résolution qui autorise le président américain à utiliser la force de manière «nécessaire et appropriée» contre l'Irak. Ce texte devrait également être rapidement approuvé par le Sénat où les Démocrates sont majoritaires. Le président Bush aura alors les mains libres pour déclarer la guerre à Saddam Hussein.
De notre correspondant à New York

George W. Bush n'a pas tout obtenu, mais les parlementaires ont cédé sur l'essentiel. «Le président est autorisé à utiliser les forces armées des États-Unis si il le juge nécessaire et approprié, pour défendre la sécurité nationale des États-Unis contre la menace posée par l'Irak», affirme la résolution qui devrait formellement être votée dans les jours qui viennent. La Chambre des représentants, dominée par les Républicains, n'a toutefois pas signé un chèque en blanc au président américain. George Bush devra certifier au Congrès (si possible avant une attaque militaire américaine, ou au moins dans les 48 heures qui suivront l'opération) que les voies diplomatiques et pacifiques ont échoué et ne pouvaient plus protéger le peuple américain contre les armes de destruction massives irakiennes. La résolution autorise également l'usage de la force pour faire respecter les résolutions du Conseil de sécurité qui concernent l'Irak, c'est à dire essentiellement le déploiement des inspecteurs en désarmement de l'ONU.

«L'Irak pose un problème depuis le 11 septembre qu'il ne posait pas avant, et nous devrions le gérer diplomatiquement si on le peut, militairement si on le doit», a expliqué le leader démocrate de la Chambre des réprésentants, Richard Gephardt. «Nous sommes en désaccord sur beaucoup de débats intérieurs. Mais ceci est la chose la plus importante. Cela ne devrait pas être une question politique. Nous devons faire ce qu'il faut pour la sécurité de notre nation et la sécurité de tous les Américains», a-t-il ajouté. Le représentant de Californie, le Démocrate Tom Lantos, a pour sa part affirmé que retarder toute confrontation avec l'Irak ne ferait que «augmenter le danger et augmenter le prix» et laisserait «les États-Unis humiliés aux yeux de l'histoire».

Pour s'assurer du soutien démocrate, la Maison Blanche a accepté plusieurs modifications de son texte initial, qui ont pour effet de limiter la marge de manœuvre du président. Un paragraphe a été ajouté pour encourager George Bush à faire plier l'Irak à travers le Conseil de sécurité de l'ONU et à épuiser les voies diplomatiques avant le recours à la force. Par ailleurs, des formules vagues qui laissaient penser que l'armée américaine aurait pu frapper d'autres pays de la région ont été abandonnées, de même que les références selon lesquelles l'Irak opprime son propre peuple, soutient le terrorisme et menace ses voisins. Selon la résolution, le président devra rendre compte au Congrès tous les deux mois de la situation en Irak. Déjà, il lui est demandé de réfléchir à l'après-Saddam Hussein. Les parlementaires voulaient également s'assurer que la guerre en Irak ne serait pas un frein à la poursuite de la guerre contre le terrorisme et les auteurs des attentats du 11 septembre.

La résignation semble l’emporter

«Le président est satisfait du fait que la résolution lui donne les outils nécessaires pour faire face à la menace posée par Saddam Hussein, et cela sans lui lier les mains», a assuré le porte-parole de la Maison Blanche, Ari Fleischer. Cette résolution a notamment le mérite, aux yeux du Pentagone, de ne pas forcer George Bush à obtenir un mandat de l'ONU pour passer à l'attaque. Encadré de parlementaires des deux camps, dans les jardins de la Maison Blanche, le président Américain a profité de l'occasion pour réaffirmer avec force que «le respect total de toutes les exigences de l'ONU est le seul choix et le temps qu'il reste pour faire ce choix est limité. Saddam doit désarmer, point à la ligne», a-t-il ajouté, menaçant : «si il persistait dans son défi, l'usage de la force pourrait devenir inévitable». Pendant ce temps, à l'ONU, le projet de résolution américain n'avait toujours pas été officiellement déposé, par manque de soutien parmi les membres du Conseil de sécurité.

Plusieurs démocrates et quelques républicains modérés n'étaient hier toujours pas satisfaits avec la résolution. Le représentant de New York, Gary Ackerman a fait part de ses «graves inquiétudes liées à l'échec complet de l'administration d'expliquer en quoi une guerre sans soutien contre l'Irak aiderait à instaurer un ordre global stable». Pourtant, la résignation semblait l'emporter. De nombreux Démocrates semblaient pressés d'en finir sur ce dossier, pour relancer le débat plus porteur sur l'économie alors que les élections parlementaires de novembre approchent à grands pas.

Même si il n'est pas encore évident que le Sénat, où les démocrates sont majoritaires, se rallie à cette résolution, le chef de la majorité, Tom Daschle, a tenu des propos de nature à rassurer George Bush. «Je suis certain qu'une résolution sera adoptée avec un large soutien des deux partis et donnant au président l'autorité dont il a besoin pour s'occuper de Saddam Hussein et de ses armes de destruction massives», a-t-il assuré. Le chef du comité des relations extérieures du Sénat, Joseph Biden, un démocrate du Delaware, semblait prêt à abandonner ses efforts pour rédiger une résolution encadrant plus strictement les conditions d'une guerre contre l'Irak, en les limitant à la question du désarmement et en accordant un rôle plus important à l'ONU. Plusieurs poids lourds du Sénat ont déjà apporté leur soutien à la résolution rédigée par la Chambre. C'est «une manière de renforcer le pouvoir du président en tant que commandant en chef», a expliqué Joseph Lieberman, rejoint par Evan Bayh, un démocrate de l'Indiana, ainsi que deux sénateurs républicains, John McCain et John Warner. Ce dernier a même affirmé à George Bush : «Monsieur le Président, nous avons tenu bon pour votre père, nous tiendrons bon pour vous». En janvier 1991, le Congrès avait autorisé George Bush senior à user de la force pour libérer l'Irak.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 03/10/2002