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Francophonie

Liban-Afrique : mieux se connaître grâce à la francophonie

A l’occasion du sommet de la francophonie à Beyrouth, auquel participe une vingtaine d’États africains, le Liban désire nouer des relations plus étroites avec les pays de ce continent où sont installés de nombreux Libanais expatriés. Voire même négocier des accords de coopération en marge du sommet.
De notre envoyée spéciale à Beyrouth

Actuellement, on estime que plus de 300 000 personnes d’origine libanaise sont installées en Afrique de l’Ouest. La Côte d’Ivoire (55 000), le Sénégal (30 000) et le Nigeria (25 000) sont les principaux pays d’accueil de cette communauté, dans l’ensemble bien intégrée. Souvent commerçants, les Libanais participent activement au développement de l’économie des États dans lesquels ils ont élu domicile.

Et pourtant, Ghassan Salamé, le ministre de la Culture du pays hôte du sommet de la francophonie, explique que, jusqu’à présent, les relations entre son pays et les États africains sont restées «très faibles». Grâce au sommet de Beyrouth, il espère établir «un partenariat triangulaire entre l’État libanais, les États africains et les communautés» qui y sont installées. Mais aussi «tourner la page de l’émigration chaotique». D’ailleurs, la diaspora africaine a compris l’enjeu de ce sommet et a contribué activement à sa préparation. Notamment en prenant en charge le voyage à Beyrouth des délégations de certains États africains. Voire même, selon Ghassan Salamé, en finançant «des prolongations» à ces séjours. D’autre part, les Libanais d’Afrique ont aussi invité à leurs frais des «faiseurs d’opinion», journalistes par exemple, pour qu’ils puissent eux aussi participer au sommet et découvrir le Liban. «Ils veulent montrer leur pays aux représentants des pays dans lesquels ils habitent».

«Tourner la page de l’émigration chaotique»

Dans le même temps, les autorités libanaises ont fait des propositions de coopération aux États africains pour permettre l’adoption d’un certain nombre de dispositions destinées à faciliter les échanges. Il s’agit, par exemple, de mesures d’encouragement aux investissements en Afrique, aux exportations, de diminution des taxes… Ces propositions semblent intéresser les interlocuteurs africains. Le Liban a reçu «une dizaine de réactions», venant notamment du Gabon, du Burundi ou de la République démocratique du Congo. Ce qui incite Ghassan Salamé à penser que «des accords pourraient être négociés en marge du sommet».

Au-delà des aspects diplomatiques et commerciaux, cette démarche découle aussi et surtout d’un désir de contribuer à résoudre le problème identitaire dont souffrent parfois les membres de la diaspora, partagés entre deux appartenances et deux cultures. Une ambiguïté qui leur a déjà valu de mauvais traitements en période de crise socio-politique. La francophonie, en tant que plus petit dénominateur commun, offre donc, dans cette perspective, un cadre de rapprochement intéressant pour les populations concernées.

Profitant de ce contexte francophone favorable et du bassin d’audience potentiel important offert par la diaspora libanaise en Afrique, la chaîne de télévision Al-Manar (télévision satellitaire du Hezbollah) vient de lancer un bulletin d’information en français qui lui est prioritairement destiné. Les Libanais d’Afrique font, en effet, partie des cibles de la chaîne puisqu’ils sont majoritairement de confession musulmane chiite. Une communauté au sein de laquelle la langue française a récemment marqué des points au Liban alors que son utilisation a décliné dans les populations chrétiennes. L’une des explications de ce phénomène viendrait de l’impact de la politique «arabe» menée par la France, jugée favorable, qui faciliterait la progression du français chez les musulmans. Dans ce contexte, le sommet de la francophonie de Beyrouth, le premier organisé dans une capitale arabe, comme aime à le rappeler le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, l’Égyptien Boutros Boutros-Ghali, tombe à point nommé.



par Valérie  Gas

Article publié le 15/10/2002