Kosovo
Elections sans passion dans une province toujours divisée
Un million trois cent mille électeurs sont convoqués aux élections municipales samedi au Kosovo. Il s’agit du troisième scrutin depuis l’entrée des troupes internationales dans la province, en juin 1999. Même si l’enjeu est important, ces élections ne suscite aucun enthousiasme dans la population.
De notre envoyé spécial au Kosovo
Dragan Velic fait partie des dirigeants serbes modérés du Kosovo. Pourtant, cette fois-ci, cet homme d’une quarantaine d’années, explose : «Pour nous, les Serbes du Kosovo, rien ne change». Dragan Velic travaillait autrefois dans les services d’urbanisme de Pristina. Depuis le printemps 1999, il a dû se réfugier dans son village natal de Gracanica, une enclave serbe aux portes de la principale ville du Kosovo.
Il y a quelques semaines, les troupes internationales de la KFOR ont levé les checks-points qu’elles maintenaient aux entrées de Gracanica. «C’est une mesure démagogique qu’a pris le général français Valentin lorsqu’il a quitté le commandement de la KFOR» , explique Dragan Velic. «De toute façon, les soldats internationaux continuent à patrouiller jour et nuit, et les incidents se multiplient. Nous avons comptabilisé plus de dix d’attaques armées contre des civils serbes depuis deux semaines à travers tout le Kosovo».
Représentant des Serbes de Gracanica, Dragan Velic fait partie du «Groupe des 18», qui rassemble les dirigeants serbes ouverts au dialogue. Après de longues hésitations, les Serbes du Kosovo ont décidé, mardi, de prendre part aux élections municipales de samedi. «Très peu de Serbes voteront. Comment expliquer qu’il faut participer aux élections quand nos droits les plus élémentaires sont bafoués tous les jours ?», explique Dragan Velic, qui reconnaît que monter une campagne électorale en 48 heures est un défi presque impossible. Les partis nationalistes appellent d’ailleurs au boycott du scrutin, sauf dans les cinq communes du Kosovo où les Serbes représentent la majorité de la population.
Un pas important vers l’auto-administration
À Kosovska Mitrovica, la grande ville partagée entre secteur serbe et secteur albanais, les Serbes devraient ainsi massivement bouder les urnes. Le chef de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Michael Steiner, a pourtant proposé un plan de résolution de la crise de Mitrovica, qui prévoit une assez large décentralisation. «Mais ce plan ne devrait pas valoir que pour Mitrovica, mais pour toutes les villes du Kosovo où les Serbes ne peuvent toujours vivre librement, comme Pristina, Pec, Gnjilane, Urosevac», s’exclame Dragan Velic. «À terme, il n’y a que deux options envisageables : le partage du Kosovo ou bien une réelle décentralisation du pouvoir qui permettent à toutes les communautés nationales du Kosovo de vivre côte à côte. Les Albanais rejettent l’idée de partage, mais ne veulent pas non plus envisager de véritable décentralisation».
Dans le camp albanais, la revendication d’indépendance du Kosovo continue de constituer l’alpha et l’oméga de tous les programmes électoraux, et les candidats se laissent aller à la surenchère nationaliste. Le plan de Michel Steiner pour Mitrovica est lui-même critiqué, car il remettrait en cause «l’unité» du Kosovo. Comme lors des précédents scrutins, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) devrait assez largement l’emporter, même si les sondages prévoient un tassement sensible des scores du parti d’Ibrahim Rugova qui ne devrait guère profiter à ses éternels rivaux, les formations issues de la guérilla de l’UCK, mais plutôt à de nouveaux petits partis ou à des listes d’initiatives locales. Les observateurs électoraux du KACI, un organisme indépendant de contrôle des élections, prévoient une montée de l’abstention et une grande dispersion des voix. «Les électeurs sont fatigués des élections à répétition, alors que leurs conditions de vie ne s’améliorent pas», note le journaliste Adriatrik Kelmendi. Alors que beaucoup de Kosovars étaient revenus au pays après l’entrée des troupes de l’OTAN, on note à nouveau un fort mouvement d’exil, même si tous les pays occidentaux ont drastiquement réduit leurs capacités d’accueil.
L’enjeu est pourtant de taille, puisque les conseils municipaux élus samedi devront rester en fonction quatre années, et que la MINUK prévoie d’opérer de larges transferts de compétences à ces nouvelles assemblées. Les administrateurs locaux de la MINUK qui disposaient d’un droit de veto dans chaque commune devraient ainsi disparaître d’ici six mois. Ce pas important vers l’auto-administration du Kosovo ne suscite pourtant guère d’enthousiasme et ne s’accompagne pas d’une réelle volonté politique d’inclure toutes les communautés nationales dans la vie de la province.
Dragan Velic fait partie des dirigeants serbes modérés du Kosovo. Pourtant, cette fois-ci, cet homme d’une quarantaine d’années, explose : «Pour nous, les Serbes du Kosovo, rien ne change». Dragan Velic travaillait autrefois dans les services d’urbanisme de Pristina. Depuis le printemps 1999, il a dû se réfugier dans son village natal de Gracanica, une enclave serbe aux portes de la principale ville du Kosovo.
Il y a quelques semaines, les troupes internationales de la KFOR ont levé les checks-points qu’elles maintenaient aux entrées de Gracanica. «C’est une mesure démagogique qu’a pris le général français Valentin lorsqu’il a quitté le commandement de la KFOR» , explique Dragan Velic. «De toute façon, les soldats internationaux continuent à patrouiller jour et nuit, et les incidents se multiplient. Nous avons comptabilisé plus de dix d’attaques armées contre des civils serbes depuis deux semaines à travers tout le Kosovo».
Représentant des Serbes de Gracanica, Dragan Velic fait partie du «Groupe des 18», qui rassemble les dirigeants serbes ouverts au dialogue. Après de longues hésitations, les Serbes du Kosovo ont décidé, mardi, de prendre part aux élections municipales de samedi. «Très peu de Serbes voteront. Comment expliquer qu’il faut participer aux élections quand nos droits les plus élémentaires sont bafoués tous les jours ?», explique Dragan Velic, qui reconnaît que monter une campagne électorale en 48 heures est un défi presque impossible. Les partis nationalistes appellent d’ailleurs au boycott du scrutin, sauf dans les cinq communes du Kosovo où les Serbes représentent la majorité de la population.
Un pas important vers l’auto-administration
À Kosovska Mitrovica, la grande ville partagée entre secteur serbe et secteur albanais, les Serbes devraient ainsi massivement bouder les urnes. Le chef de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK), Michael Steiner, a pourtant proposé un plan de résolution de la crise de Mitrovica, qui prévoit une assez large décentralisation. «Mais ce plan ne devrait pas valoir que pour Mitrovica, mais pour toutes les villes du Kosovo où les Serbes ne peuvent toujours vivre librement, comme Pristina, Pec, Gnjilane, Urosevac», s’exclame Dragan Velic. «À terme, il n’y a que deux options envisageables : le partage du Kosovo ou bien une réelle décentralisation du pouvoir qui permettent à toutes les communautés nationales du Kosovo de vivre côte à côte. Les Albanais rejettent l’idée de partage, mais ne veulent pas non plus envisager de véritable décentralisation».
Dans le camp albanais, la revendication d’indépendance du Kosovo continue de constituer l’alpha et l’oméga de tous les programmes électoraux, et les candidats se laissent aller à la surenchère nationaliste. Le plan de Michel Steiner pour Mitrovica est lui-même critiqué, car il remettrait en cause «l’unité» du Kosovo. Comme lors des précédents scrutins, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) devrait assez largement l’emporter, même si les sondages prévoient un tassement sensible des scores du parti d’Ibrahim Rugova qui ne devrait guère profiter à ses éternels rivaux, les formations issues de la guérilla de l’UCK, mais plutôt à de nouveaux petits partis ou à des listes d’initiatives locales. Les observateurs électoraux du KACI, un organisme indépendant de contrôle des élections, prévoient une montée de l’abstention et une grande dispersion des voix. «Les électeurs sont fatigués des élections à répétition, alors que leurs conditions de vie ne s’améliorent pas», note le journaliste Adriatrik Kelmendi. Alors que beaucoup de Kosovars étaient revenus au pays après l’entrée des troupes de l’OTAN, on note à nouveau un fort mouvement d’exil, même si tous les pays occidentaux ont drastiquement réduit leurs capacités d’accueil.
L’enjeu est pourtant de taille, puisque les conseils municipaux élus samedi devront rester en fonction quatre années, et que la MINUK prévoie d’opérer de larges transferts de compétences à ces nouvelles assemblées. Les administrateurs locaux de la MINUK qui disposaient d’un droit de veto dans chaque commune devraient ainsi disparaître d’ici six mois. Ce pas important vers l’auto-administration du Kosovo ne suscite pourtant guère d’enthousiasme et ne s’accompagne pas d’une réelle volonté politique d’inclure toutes les communautés nationales dans la vie de la province.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 26/10/2002