Turquie
Un islamiste Premier ministre
Le président turc, Ahmet Necdet Sezer, a demandé le 16 novembre à Abdullah Gül, numéro deux de la formation islamiste Parti de la justice et du développement (AKP), vainqueur des élections législatives du 3 novembre, de former le nouveau gouvernement. Ce sera la première équipe issue du même parti depuis dix ans en Turquie. Cette situation a été obtenue en raison de la confortable majorité obtenue au parlement par les députés de l'AKP. La formation du leader islamiste Recep Tayyip Erdogan n'a, en effet, pas eu besoin de rechercher une alliance afin de composer un gouvernement de coalition. C'est donc à un gouvernement islamiste que revient aujourd'hui la charge de poursuivre les négociations d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.
La Turquie va-t-elle devenir le laboratoire d'une gouvernance islamiste à critères occidentaux ? En tout cas ce pays va être soumis à un régime d’observation rigoureux après la petite révolution politique qu’il vient de vivre. Ce pays a une réputation de vigilance sur la question de la laïcité de ses institutions qui a été jusqu’au point de justifier une longue tradition d’intervention militaire dans les affaires politiques.
Cette volonté de ne pas remettre en question ce dogme s’appuie une détermination ancienne de s’arrimer à la partie occidentale du continent en rejoignant l’Union européenne. La Turquie a déjà saisi toutes les occasions et elle est déjà partenaire dans bon nombre d’instances communes. Reste à finaliser. Le prochain rendez-vous, et premier défi pour Abdullah Gül, sera le prochain sommet européen de Copenhague dont les Turcs attendent de savoir quel compte à rebours leur sera fixé pour rallier la communauté, et quels sont les critères exigés. Ce qui aura également le mérite de clarifier la position de l’Europe sur son identité et la part du religieux et du laïc qu’elle lui accorde.
«Les normes internationales»
En tout cas, à cinquante-deux ans, Abdullah Gül est présenté comme un économiste au discours pro-occidental. Ses premières déclarations, au sortir de sa rencontre avec le président, ont été pour annoncer sa volonté d’améliorer les normes démocratiques de son pays, justement dans la perspective de l’entrée au sein de l’UE.
Un peu plus tôt, dans la matinée, le leader de l’AKP, empêché de participer au scrutin en raison d’une inéligibilité parlementaire pour «incitation à la haine religieuse», déclarait lors d’une conférence de presse vouloir introduire «des mesures pour combattre la torture». «Les droits et libertés de base seront élevés aux normes internationales dans le cadre du processus pour rejoindre l’UE», soulignait M. Erdogan. La charge symbolique est lourde, en effet, pour un gouvernement de cette nature, dans le contexte internationale actuel. D’autant qu’il y a une semaine le président de la Convention européenne, et ancien président français, Valéry Giscard d’Estaing se prononçait contre l’adhésion, en invoquant la culture religieuse. Le député français Pierre Lellouche, présent à Istanbul dans le cadre de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, dont la Turquie est l’un des pivots, a ramené le débat sur le terrain de la rationalité : «Il appartient aux Turcs comme aux Européens de juger sur ses actes ce gouvernement», a-t-il dit.
Enfin, dernière élément inédit : ce gouvernement n’est pas mal accueilli, tant sur la scène politique nationale qu’au niveau international. Contrairement à ce qu’on aurait pu redouter, l’armée a pris acte, sans manifestation d’hostilité, de la décision populaire d’envoyer à l’Assemblée une majorité de députés islamistes. Et, à l’extérieur, l’annonce de ce bouleversement dans un grand pays voisin et allié n’a pas provoqué de communiqué apeuré, ni d’éditoriaux ironiques. Le Conseil de l’Europe a adressé samedi ses «chaleureuses félicitations» au nouveau Premier ministre.
Abdullah Gül va entamer un véritable marathon diplomatique qui va le mener sur tous les fronts des dossiers litigieux, des droits de l’Homme à la question chypriote, que le secrétaire général de l’Onu veut résoudre sans délai, en passant par la normalisation de ses relations avec le voisin grec. Mais il dispose aussi de solides alliés, au sein de l’Union, mais également Outre-Atlantique.
Cette volonté de ne pas remettre en question ce dogme s’appuie une détermination ancienne de s’arrimer à la partie occidentale du continent en rejoignant l’Union européenne. La Turquie a déjà saisi toutes les occasions et elle est déjà partenaire dans bon nombre d’instances communes. Reste à finaliser. Le prochain rendez-vous, et premier défi pour Abdullah Gül, sera le prochain sommet européen de Copenhague dont les Turcs attendent de savoir quel compte à rebours leur sera fixé pour rallier la communauté, et quels sont les critères exigés. Ce qui aura également le mérite de clarifier la position de l’Europe sur son identité et la part du religieux et du laïc qu’elle lui accorde.
«Les normes internationales»
En tout cas, à cinquante-deux ans, Abdullah Gül est présenté comme un économiste au discours pro-occidental. Ses premières déclarations, au sortir de sa rencontre avec le président, ont été pour annoncer sa volonté d’améliorer les normes démocratiques de son pays, justement dans la perspective de l’entrée au sein de l’UE.
Un peu plus tôt, dans la matinée, le leader de l’AKP, empêché de participer au scrutin en raison d’une inéligibilité parlementaire pour «incitation à la haine religieuse», déclarait lors d’une conférence de presse vouloir introduire «des mesures pour combattre la torture». «Les droits et libertés de base seront élevés aux normes internationales dans le cadre du processus pour rejoindre l’UE», soulignait M. Erdogan. La charge symbolique est lourde, en effet, pour un gouvernement de cette nature, dans le contexte internationale actuel. D’autant qu’il y a une semaine le président de la Convention européenne, et ancien président français, Valéry Giscard d’Estaing se prononçait contre l’adhésion, en invoquant la culture religieuse. Le député français Pierre Lellouche, présent à Istanbul dans le cadre de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, dont la Turquie est l’un des pivots, a ramené le débat sur le terrain de la rationalité : «Il appartient aux Turcs comme aux Européens de juger sur ses actes ce gouvernement», a-t-il dit.
Enfin, dernière élément inédit : ce gouvernement n’est pas mal accueilli, tant sur la scène politique nationale qu’au niveau international. Contrairement à ce qu’on aurait pu redouter, l’armée a pris acte, sans manifestation d’hostilité, de la décision populaire d’envoyer à l’Assemblée une majorité de députés islamistes. Et, à l’extérieur, l’annonce de ce bouleversement dans un grand pays voisin et allié n’a pas provoqué de communiqué apeuré, ni d’éditoriaux ironiques. Le Conseil de l’Europe a adressé samedi ses «chaleureuses félicitations» au nouveau Premier ministre.
Abdullah Gül va entamer un véritable marathon diplomatique qui va le mener sur tous les fronts des dossiers litigieux, des droits de l’Homme à la question chypriote, que le secrétaire général de l’Onu veut résoudre sans délai, en passant par la normalisation de ses relations avec le voisin grec. Mais il dispose aussi de solides alliés, au sein de l’Union, mais également Outre-Atlantique.
par Georges Abou
Article publié le 16/11/2002