Turquie
Les Turcs déçus, mais pas surpris par l’UE
L’Union européenne, si elle n’a pas surpris, a une nouvelle fois déçu l’opinion publique et la classe politique turques en émettant un rapport critique à l’égard de la Turquie, même s’il souligne les efforts considérables accomplis par la Turquie en matière de droits de l’Homme.
De notre correspondant en Turquie
Ce que veut la Turquie, c’est un calendrier précis pour entamer les discussions techniques devant mener à l’intégration de l’Union européenne, un rêve inassouvi depuis 39 ans exactement. Un espoir d’autant plus déçu que, précurseur de l’élargissement à l’Est avec un accord d’association signé en 1963 à Ankara, la Turquie se voit aujourd’hui «doublée» par douze autres petits pays d’Europe centrale et orientale, et dénonce un ostracisme des Quinze.
«Nous n’accepterons pas de statut particulier», a mis en garde le ministre turc des Affaires étrangères et vice-Premier ministre Sükrü Sina Gürel dans un entretien à RFI. Le thème du «deux poids, deux mesures», du traitement spécial réservé à l’enfant terrible des candidats à l’Europe est repris, naturellement, par le vice-Premier ministre nationaliste Devlet Bahçeli, qui n’a jamais caché son opposition à «l’ingérence» des institutions européennes dans les affaires intérieures turques et à l’abandon de souveraineté que son pays doit concéder pour faire partie de l’Union.
Autre terme récurrent des politiciens turcs, après ce «dernier avertissement» précédant le sommet de Copenhague en décembre prochain: l’Europe a une attitude «politique» et non objective vis-à-vis de la Turquie. «Si l’Europe avait été sincère depuis le sommet d’Helsinki en 1999 (qui a vu la candidature de la Turquie formellement acceptée), elle aurait dû reconnaître les progrès que la Turquie a faits», a regretté M. Gürel au micro de RFI.
La Turquie «a le droit» de s’asseoir avec les Quinze
«L’Europe joue avec la Turquie», titrait le très influent journal Cumhuriyet, gardien du dogme kémaliste. Le chef de la diplomatie turque a expliqué à RFI que «mettre en doute les intentions turques de mettre en œuvre des réformes adoptées ‘à temps’ et avec un fort soutien populaire n’est ni judicieux, ni juste, ni honnête». La Turquie «mérite» de progresser dans son processus d’intégration européenne et doit obtenir «au cours de l’année 2003» des assurances quant à l’ouverture de discussions sur son futur européen. Il est vrai que les modifications constitutionnelles adoptées à l’arraché, lors d’une session extraordinaire d’un parlement en vacances, représentent un pas de géant pour ce pays souvent mis à l’index des droits de l’Homme. Parmi elles, l’abolition de la peine de mort et la libéralisation de l’enseignement et de la diffusion audiovisuelle de la langue kurde, qui «donneraient le droit» à la Turquie de s’asseoir à la table des Quinze, selon un thème habituel à la diplomatie turque.
Pourtant, la «société civile» turque, et la presse qui exprime le sentiment de l’intelligentsia et des cercles d’affaires plus que celui du pouvoir, à défaut de traduire la pensée populaire, assume plutôt bien les doutes européens sur l’engagement européen de la Turquie. «La Turquie doit travailler d’arrache-pied», écrit le journal Radikal, en écho à Hürriyet qui met quant à lui «tout le monde au travail» d’ici au sommet de Copenhague, les 12 et 13 décembre prochains. Le problème, c’est qu’entre-temps la Turquie va se retrouver face au choix de ses électeurs et renouveler son Assemblée nationale, donc son gouvernement. Or les islamistes sont donnés larges gagnants de ce scrutin dont l’Europe, bizarrement, a annoncé qu’elle attendait de voir ce qui sortirait des urnes pour se forger une opinion sur l’octroi à la Turquie de ce calendrier tant attendu.
Le ministre des Affaires étrangères Gürel a joué les docteurs Coué en estimant pour RFI qu’il était «confiant en la clairvoyance des électeurs» qui se prononceront le 3 novembre prochain, mais il a aussi mis en garde les Européens: «l’Union européenne sera jugée par l’opinion publique turque sur sa sincérité et son sérieux», affirmant que «la grande déception que représenterait un nouveau maintien à l’écart de la Turquie devra être pris en compte par le futur gouvernement, quel qu’il soit». Les relations turco-européennes sont, une nouvelle fois, dans la balance. C’est ce que le ministre turc chargé des Affaires européennes Mesut Yilmaz appelle le «tournant critique» dans la longue et tumultueuse histoire d’amour entre Ankara et Bruxelles.
Ce que veut la Turquie, c’est un calendrier précis pour entamer les discussions techniques devant mener à l’intégration de l’Union européenne, un rêve inassouvi depuis 39 ans exactement. Un espoir d’autant plus déçu que, précurseur de l’élargissement à l’Est avec un accord d’association signé en 1963 à Ankara, la Turquie se voit aujourd’hui «doublée» par douze autres petits pays d’Europe centrale et orientale, et dénonce un ostracisme des Quinze.
«Nous n’accepterons pas de statut particulier», a mis en garde le ministre turc des Affaires étrangères et vice-Premier ministre Sükrü Sina Gürel dans un entretien à RFI. Le thème du «deux poids, deux mesures», du traitement spécial réservé à l’enfant terrible des candidats à l’Europe est repris, naturellement, par le vice-Premier ministre nationaliste Devlet Bahçeli, qui n’a jamais caché son opposition à «l’ingérence» des institutions européennes dans les affaires intérieures turques et à l’abandon de souveraineté que son pays doit concéder pour faire partie de l’Union.
Autre terme récurrent des politiciens turcs, après ce «dernier avertissement» précédant le sommet de Copenhague en décembre prochain: l’Europe a une attitude «politique» et non objective vis-à-vis de la Turquie. «Si l’Europe avait été sincère depuis le sommet d’Helsinki en 1999 (qui a vu la candidature de la Turquie formellement acceptée), elle aurait dû reconnaître les progrès que la Turquie a faits», a regretté M. Gürel au micro de RFI.
La Turquie «a le droit» de s’asseoir avec les Quinze
«L’Europe joue avec la Turquie», titrait le très influent journal Cumhuriyet, gardien du dogme kémaliste. Le chef de la diplomatie turque a expliqué à RFI que «mettre en doute les intentions turques de mettre en œuvre des réformes adoptées ‘à temps’ et avec un fort soutien populaire n’est ni judicieux, ni juste, ni honnête». La Turquie «mérite» de progresser dans son processus d’intégration européenne et doit obtenir «au cours de l’année 2003» des assurances quant à l’ouverture de discussions sur son futur européen. Il est vrai que les modifications constitutionnelles adoptées à l’arraché, lors d’une session extraordinaire d’un parlement en vacances, représentent un pas de géant pour ce pays souvent mis à l’index des droits de l’Homme. Parmi elles, l’abolition de la peine de mort et la libéralisation de l’enseignement et de la diffusion audiovisuelle de la langue kurde, qui «donneraient le droit» à la Turquie de s’asseoir à la table des Quinze, selon un thème habituel à la diplomatie turque.
Pourtant, la «société civile» turque, et la presse qui exprime le sentiment de l’intelligentsia et des cercles d’affaires plus que celui du pouvoir, à défaut de traduire la pensée populaire, assume plutôt bien les doutes européens sur l’engagement européen de la Turquie. «La Turquie doit travailler d’arrache-pied», écrit le journal Radikal, en écho à Hürriyet qui met quant à lui «tout le monde au travail» d’ici au sommet de Copenhague, les 12 et 13 décembre prochains. Le problème, c’est qu’entre-temps la Turquie va se retrouver face au choix de ses électeurs et renouveler son Assemblée nationale, donc son gouvernement. Or les islamistes sont donnés larges gagnants de ce scrutin dont l’Europe, bizarrement, a annoncé qu’elle attendait de voir ce qui sortirait des urnes pour se forger une opinion sur l’octroi à la Turquie de ce calendrier tant attendu.
Le ministre des Affaires étrangères Gürel a joué les docteurs Coué en estimant pour RFI qu’il était «confiant en la clairvoyance des électeurs» qui se prononceront le 3 novembre prochain, mais il a aussi mis en garde les Européens: «l’Union européenne sera jugée par l’opinion publique turque sur sa sincérité et son sérieux», affirmant que «la grande déception que représenterait un nouveau maintien à l’écart de la Turquie devra être pris en compte par le futur gouvernement, quel qu’il soit». Les relations turco-européennes sont, une nouvelle fois, dans la balance. C’est ce que le ministre turc chargé des Affaires européennes Mesut Yilmaz appelle le «tournant critique» dans la longue et tumultueuse histoire d’amour entre Ankara et Bruxelles.
par Jérôme Bastion
Article publié le 11/10/2002