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Côte d''Ivoire

Les rebelles accusent la France de ne pas être neutre

Les rebelles ivoiriens sont furieux de l’attitude de la France qu’ils accusent d’avoir «outrepasser son mandat» en tirant sur un groupe d’insurgés pour stopper leur progression dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire. Ils affirment par ailleurs que les autorités françaises «ont fait le choix de faire la guerre aux Ivoiriens qui combattent pour la liberté de leur pays», accusant explicitement Paris de s’être rangé aux côtés des forces loyalistes du président Laurent Gbagbo. Des accusations que dénoncent l’armée française qui estime avoir agi en état de «légitime défense».
L’accrochage a eu lieu sur la route de Duékoué dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, un carrefour stratégique vers Daloa, la capitale du cacao, dont le pays est le premier producteur mondial. Les militaires français ont tiré sur un groupe de rebelles du Mouvement populaire pour l’indépendance de la Côte d’Ivoire (MPIGO) qui tentait de contourner un de leurs postes de contrôle. Ils affirment avoir effectué des tirs de sommation, mais devant le refus d’obtempérer des insurgés, des blindés français ont dû détruire trois pick-up conduits par les rebelles. «Nos militaires ont été agressés par des éléments incontrôlés et ont réagi en fonction des ordres qui leur ont été donnés», a ainsi déclaré le chef d’état-major des Armées françaises, le général Henri Bentégeat, actuellement en visite en Côte-d’Ivoire, insistant notamment sur le fait qu’ils avaient agi en état de légitime défense. Il a également justifié leur action par la menace qui pèse sur la sécurité des étrangers vivant dans la région. «Si ces éléments s’étaient installés au delà de la région de Duékoué, la sécurité des ressortissants étrangers aurait été directement menacée», a ainsi assuré le général français.

Les trois mouvements rebelles ivoiriens –MPIGO et MJP présents dans l’ouest et MPCI qui contrôle le nord– ne partagent bien entendu pas cette version des faits. Ils accusent en effet la France d’avoir «outrepassé son mandat» et de participer à «une guerre qui n’est pas la sienne» en stoppant la progression dans l’ouest du MPIGO, qui affirme que plusieurs de ses combattants ont été tués au cours de l’accrochage. Les rebelles de ce mouvement ont par ailleurs dénoncé «l’invasion française dans le grand ouest ivoirien», estimant notamment que les troupes françaises avaient fait «le choix de faire la guerre aux Ivoiriens qui combattent pour la liberté de leur pays». De son côté le MPCI, qui contrôle le nord et qui s’est engagé dans un cessez-le-feu depuis le 17 octobre dernier, a estimé que les forces françaises sont «des forces conquérantes et d’occupation».

«Importante et urgente réunion» des rebelles à Bouaké

La France a vivement démenti les accusations des rebelles qui affirment que les militaires français se sont désormais rangés aux côtés des forces loyalistes de Laurent Gbagbo. «L’armée française ne prend pas parti, la France n’a pas pris parti pour ou contre tel ou tel mouvement rebelle», a martelé à Abidjan le général Henri Bentégeat. Le chef d’état-major des Armées a souligné que les rebelles n’avaient «rien à craindre» des militaires français tant qu’«ils respectaient la règle du jeu». Paris a renforcé à la mi-décembre son dispositif militaire en Côte d’Ivoire. Outre la protection des ressortissant étrangers, la mission des soldats français est de garantir le cessez-le-feu signé le 17 octobre avec les rebelles du MPCI. Ils ont désormais pour consigne «d’ouvrir le feu» sur toute personne empêchant manifestement la réalisation de leur mission ou commettant «des exactions».

Les affrontements de samedi ne sont pas restés sans conséquences puisque les trois mouvements rebelles ont soudainement rallié leurs positions. Leurs responsables ont en effet décidé de tenir une «importante et urgente réunion» lundi à Bouaké dans le centre, la deuxième ville du pays aux mains du MPCI. Les rebelles, qui se présentent en tant que «mouvements de libération», affirment, dans un communiqué, qu’ils étudieront notamment «la question de l'alliance entre le MJP, le MPIGO et le MPCI» et «l'implication de la France et son soutien aux troupes» du président Gbagbo. Ils menacent également de relancer les combats en évoquant notamment «l'éventuelle ouverture de tous les fronts militaires».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 22/12/2002