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Côte d''Ivoire

Les rebelles ivoiriens modèrent leurs propos

Au lendemain de la ferme condamnation de la France pour son rôle dans la crise ivoirienne, les rebelles jouent l’apaisement et se déclarent «prêts à s’inscrire dans la dynamique d’une solution pacifique».
C’est presque un coup de théâtre. En quelques heures, entre lundi soir et mardi midi, les rebelles de l’ouest ivoirien sont passés d’une dénonciation véhémente de l’attitude des soldats français, avec menace d’engagement militaire massif à l’appui, à une position beaucoup plus nuancée. Dans un communiqué publié à Bouaké, au lendemain de la réunion des trois mouvements rebelles, deux d’entre eux, le Mouvement populaire ivoirien du grand ouest (MPIGO) et le Mouvement pour la justice et la paix (MJP), sont revenus sur les incidents armés qui les avaient opposé aux soldats français à Man, le 30 novembre, et à Duékoué, le 21 décembre. Ces incidents sont «la conséquence d’une méprise et ne remettent nullement en cause l’avenir des relations avec la France», annoncent le MPIGO et le MJP dans un texte qu’ils cosignent avec le ministre togolais de la Défense, le général Assani Tidjani, émissaire du chef de l’Etat togolais, lui-même médiateur de la crise ivoirienne.

On remarquera dans le texte qu’il est question d’«avenir des relations avec la France» qu’il conviendrait de préserver. Et, en effet, à l’issue de leur rencontre avec le général togolais, ce mardi, les deux mouvements se déclaraient (autre changement de ton) «prêts à s’inscrire dans la dynamique d’une solution pacifique de sortie de crise et à faire des propositions pour le cessez-le-feu après consultation de leurs bases respectives». Ce changement radical de discours pourrait, s’il se confirme, jeter les bases d’une nouvelle approche visant à intégrer les rebelles de l’Ouest dans le jeu des négociations, plutôt que les laisser se marginaliser dans la région stratégique qu’ils occupent. Une zone sensible tant sur le plan économique que sur le plan international. Il est certes trop tôt, à ce stade des déclarations, pour envisager l’avenir. Mais il est certain que des dernières déclarations constituent un élément d’apaisement, après les crispations de ces dernières vingt-quatre heures.

Médiation togolaise

Pour le Togo c’est incontestablement l’occasion de montrer qu’il conserve une certaine influence sur les parties en conflit. L’absence de résultats enregistrés depuis qu’il a pris en mains la négociation entre mutins et gouvernement, au titre de la communauté sous-régionale CEDEAO, a été au centre de vives critiques, notamment de la part de la présidence sénégalaise en exercice. l’insuccès avait même fini par détériorer le climat autour du tapis vert et nombre de négociateurs ne croyaient plus aux chances d’aboutir. Lundi, dans un entretien au quotidien français La Croix, le secrétaire général du mouvement rebelle MPCI en appelait à la France et à l’ONU, déclarant sa défiance dans les initiatives africaines. La nuance introduite ce mardi sonne comme une petite victoire diplomatique pour le général Eyadema, avec lequel il faut donc toujours compter et dont la diplomatie ne se solde finalement pas que par des échecs.

Enfin cette déclaration survient dans un contexte d’ouverture à Abidjan où le chef de l’Etat s’apprête, lui aussi, à proposer des «mesures pour une sortie durable de crise» incluant notamment «un appel aux autres formations politiques pour la formation d’un nouveau gouvernement de rassemblement». Le schéma présidentiel contient également «un projet de loi contre le racisme, la xénophobie et le tribalisme», «la suppression de la carte de séjour» et la «naturalisation ‘sans condition de stage’ de personnalités ayant rendu des services éminents à la Côte d’Ivoire et qui souhaitent avoir la nationalité ivoirienne». Il est également question de la tenue d’un «référendum sur trois questions soulevées par la crise : les conditions d’éligibilité à la présidence de la République, le code foncier rural et la nationalité». En revanche, aucune mention d’éventuelles élections anticipées comme le réclament les mutins.(Ecouter la correspondance de notre envoyé spécial à Abidjan, Cyril Bensimon).



par Georges  Abou

Article publié le 24/12/2002