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Burkina Faso

Les concerts d’Alpha Blondy interdits

Prévus pour le 21 décembre à Ouagadougou et le 23 à Bobo-Dioulasso, les concerts de la superstar ivoirienne du reggae Alpha Blondy ont été interdits par le gouvernement burkinabè. Une décision liée à la crise ivoirienne dans laquelle Jagger comme on l’appelle a pris position en faveur de l’intervention de l’armée française. L’artiste ainsi que les organisateurs ne désespèrent pas de convaincre les autorités burkinabè à revenir à de meilleurs sentiments.
De notre correspondant au Burkina Faso

«Je suis fataliste. Tout ce que Dieu fait est bon!» Alpha Blondy semble prendre avec philosophie la décision des autorités burkinabè d’interdire ses concerts. Au cours de la conférence de presse qu’il a donnée mardi matin à Ouagadougou avant de s’envoler pour Bamako pour la suite de sa tournée africaine, l’artiste ivoirien s’est montré fair-play. Il n’avait pas l’air affecté par cette décision «lourde» pour lui. Devant les journalistes burkinabè, il a réitéré ses prises de position sans jamais s’en prendre directement aux autorités de Ouagadougou.

C’est le 20 décembre, c’est-à-dire seulement la veille du premier concert que le ministre de la sécurité, le lieutenant-colonel Djibril Bassolet a signifié par lettre aux organisateurs sa décision d’interdire Alpha Blondy de se produire au Burkina. «Nous avons tenté en vain toute la journée de joindre le ministre pour négocier. Le lendemain, lorsqu’on a pu le rencontrer, il nous a expliqué que la décision était irrévocable», explique Salfo Soré, l’un des organisateurs du spectacle.

Très vite, la «mauvaise» nouvelle a fait le tour de la ville de Ouagadougou. Mais personne ne voulait y croire. Pour de nombreux fans, ce n’était qu’une simple plaisanterie de mauvais goût d’autant que la star du reggae était arrivée 72 heures avant le jour J. Si bien que certains sont venus assez tôt au stade municipal samedi pour être sûr d’avoir la place. En plus, la vente des tickets d’entrée se poursuivait normalement jusqu’à seulement quelques heures de l’heure prévue pour le spectacle. La confirmation de la décision gouvernementale fera alors l’effet d’une bombe. C’était la déception pour les milliers de jeunes qui attendaient leur idole depuis plusieurs mois.

Alpha Blondy: «je ne suis pas un fouteur de merde»

Mais pour certains observateurs, il fallait s’attendre à cette réaction du pouvoir après les déclarations supposées d’Alpha Blondy lors d’un concert quelques jours plus tôt à Lomé. Selon la presse ivoirienne reprise à Ouagadougou, l’artiste ivoirien aurait lancé aux représentants des rebelles venus à Lomé pour les négociations avec le gouvernement et présents à son concert d’arrêter la guerre. «Vous avez déjà perdu la guerre», aurait-il dit. Interrogé par RFI dimanche 22 décembre, Alpha Blondy réfute ces propos. Mais c’était sans doute déjà trop tard.

Lundi, l’artiste ainsi que les organisateurs du spectacle ont été reçus par le ministre de la sécurité sans grand résultat. Même si Djibril Bassolet leur a demandé de faire de nouvelles propositions de dates pour étude, rien n’indique que les deux concerts prévus seront effectivement autorisés. Au ministère de la sécurité, on dit craindre que Alpha Blondy connu pour son franc-parler ne transforme son concert en un meeting sur la crise ivoirienne. «Ce serait dangereux pour sa sécurité s’il fait certaines déclarations au moment où beaucoup de nos compatriotes meurtris rentrent au pays. Egalement, ce serait diplomatiquement gênant pour nous s’il prend position contre le gouvernement ivoirien», explique un ministre.

Au cours de la conférence de presse qu’il a donnée à Ouagadougou, Alpha Blondy s’est voulu rassurant. «Je ne suis pas un fouteur de merde (...) Mon but n’est pas de faire peur ni de semer la panique, je voudrais rester positif comme mon groupe sanguin.», a-t-il déclaré. «Que mon grand frère Blaise [le président Blaise Compaoré] se mette à l’aise, il n’a qu’à venir au concert», poursuit Alpha Blondy toujours disposé à jouer au Burkina.

Ce qui est sûr, les prises de position de l’artiste en faveur de l’intervention de l’armée française semble se heurter à celles du gouvernement burkinabè. On se souvient que récemment, le ministre d’Etat Salif Diallo avait ouvertement critiqué la présence de l’armée française en Côte d’Ivoire au cours d’un discours prononcé devant le président Compaoré ainsi que devant le corps diplomatique. Or, Jagger qui avait demandé le départ des troupes françaises en Afrique dans une de ses chansons continue de saluer leur interventions en Côte d’Ivoire. «Si l’armée française ne s’implique pas, ce sera de la non-ingérence coupable car la classe politique a prouvé sa carence. Ils sont prêts à amener le peuple à l’abattoir. Nous sommes un arc-en-ciel et malheur à celui qui va briser l’arc-en-ciel» a conclu Alpha Blondy ironisant que les français constituent la 68ème ethnie de la Côte d’Ivoire.

Lire également:
La biographie d’Alpha Blondy sur le site www.rfimusique.com



par Alpha  Barry

Article publié le 25/12/2002