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Indonésie

Espoirs de paix à Aceh

Le conflit d’Aceh, un des plus longs et des plus sanglants conflits d'Asie du Sud-Est, devrait prendre fin ce lundi, avec la signature d'un accord de paix entre les rebelles du GAM et le gouvernement indonésien.

De notre correspondant en Indonésie

Les séparatistes de la province d'Aceh et le gouvernement indonésien sont réunis à Genève pour signer un accord de paix destiné à mettre fin à l’un des plus vieux conflits en Asie du Sud-Est. Un conflit qui a fait plus de 12 000 morts depuis 1976 dans cette province du nord de l'île de Sumatra (4 millions d'habitants) riche en hydrocarbures. Il oppose les rebelles du Mouvement Aceh libre (GAM) au gouvernement, qui a refusé toute idée d'indépendance d'Aceh, perçue comme une remise en cause de l'unité de l'immense archipel de 212 millions d'habitants.

Le GAM fut réprimé par l’Etat indonésien dès sa création en 1976 par un petit groupe de nationalistes achénais. Mais les multiples violations des droits de l’homme commises par l'armée indonésienne ont rapidement nourri le sentiment indépendantiste dans une grande partie de la population. Une population qui ressent très mal la mainmise totale de Djakarta sur le pétrole, l'arrivée dans la province de migrants venus de l'île de Java mais également l'absence de respect de ses traditions culturelles.

Première région islamisée d'Indonésie, Aceh s'était constitué en un puissant sultanat qui avait connu la prospérité au 17ème siècle, et les Achinais avaient été de farouches résistants à la domination hollandaise. En 1989, le conflit a pris une telle ampleur que le général Suharto, qui dirige alors l’archipel d’une main de fer, décrète la province Zone d'opérations militaires spéciales. S’en suit une décennie de combats acharnés dont la population civile est la principale victime.

Un espoir naît avec la chute de la dictature Suharto en 1998. Mais à la différence du conflit au Timor oriental, qui a abouti en 1999 à un vote pour l'indépendance sous les auspices de l'ONU, le drame achénais ne mobilise pas la communauté internationale. La violence redouble alors d’intensité et il faudra attendre l’intervention du centre Henri-Dunant, une organisation humanitaire basée en Suisse, pour que des négociations de paix s’engagent dans le courant de l’année 2000.

Une impasse militaire


L’accord de Genève est le résultat de deux années de négociations. Deux années parsemées d’échecs dans un contexte de violences ininterrompues. Chaque jour, des combats sont signalés et des cadavres retrouvés, dans la jungle ou au bord des routes, sommairement exécutés et souvent même torturés. Avec près de 2000 morts, 2002 aura même été l’année la plus meurtrière de toute l’histoire du conflit.

Si les deux parties ont finalement accepté de signer un compromis c’est d’abord parce qu’aucune d’entre-elles n’est parvenue à prendre un avantage militaire décisif sur l’autre. L’armée indonésienne est restée maître des villes et des principales voies de communication mais elle n’a jamais pu déloger la guérilla de ses bastions traditionnels, la jungle et certaines zones rurales où les indépendantistes bénéficient souvent de l’appui de la population.

Les pressions américaines auront également joué un rôle déterminant. Les Etats-Unis ont relancé en août dernier leur coopération militaire avec Djakarta pour l’aider à mieux lutter contre le terrorisme. Or la situation à Aceh, où les soldats indonésiens se sont livrés à de multiples exactions sur la population civile, devenait très embarrassante pour un pays qui avait suspendu toute coopération militaire avec l’Indonésie suite aux massacres du Timor oriental en 1999. Washington pouvait craindre en effet que son aide ne soit utilisée pour renforcer la répression à Aceh, contribuant ainsi à alimenter un sentiment anti-américain déjà largement répandu dans l’archipel.

L'accord, préparé sous les auspices du centre Henry Dunant prévoit d’abord la cessation immédiate des hostilités. Le cessez le feu sera supervisée par 150 observateurs internationaux dont certains sont déjà sur place. Il y aura ensuite des élections «libres et honnêtes» pour élire une assemblée provinciale et un gouverneur. Ce régime devrait conduire progressivement la province à davantage d’autonomie politique mais également assurer une meilleure répartition des richesses naturelles entre la province et Djakarta.

Un des point de l’accord le plus compliqué à mettre en œuvre sera le désarmement de la rébellion, forte de quelques milliers de combattants, et le rôle de l'armée indonésienne durant le cessez-le-feu. Les rebelles craignent en effet de se retrouver sans protection face aux 30 000 membres des forces de sécurité indonésiennes et notamment les policiers d'élite de la Brimob, fréquemment accusés d’exactions dans la province. Au delà, les indépendantistes achénais savent que, privés de leurs armes et donc de tout moyens de pression militaire, il deviendra pour eux presque impossible de lutter pour l’indépendance après avoir obtenu l’autonomie.

Une impasse militaire

L’accord de Genève est le résultat de deux années de négociations. Deux années parsemées d’échecs dans un contexte de violences ininterrompues. Chaque jour, des combats sont signalés et des cadavres retrouvés, dans la jungle ou au bord des routes, sommairement exécutés et souvent même torturés. Avec près de 2000 morts, 2002 aura même été l’année la plus meurtrière de toute l’histoire du conflit.

Si les deux parties ont finalement accepté de signer un compromis c’est d’abord parce qu’aucune d’entre-elles n’est parvenue à prendre un avantage militaire décisif sur l’autre. L’armée indonésienne est restée maître des villes et des principales voies de communication mais elle n’a jamais pu déloger la guérilla de ses bastions traditionnels, la jungle et certaines zones rurales où les indépendantistes bénéficient souvent de l’appui de la population.

Les pressions américaines auront également joué un rôle déterminant. Les Etats-Unis ont relancé en août dernier leur coopération militaire avec Djakarta pour l’aider à mieux lutter contre le terrorisme. Or la situation à Aceh, où les soldats indonésiens se sont livrés à de multiples exactions sur la population civile, devenait très embarrassante pour un pays qui avait suspendu toute coopération militaire avec l’Indonésie suite aux massacres du Timor oriental en 1999. Washington pouvait craindre en effet que son aide ne soit utilisée pour renforcer la répression à Aceh, contribuant ainsi à alimenter un sentiment anti-américain déjà largement répandu dans l’archipel.

L'accord, préparé sous les auspices du centre Henry Dunant prévoit d’abord la cessation immédiate des hostilités. Le cessez le feu sera supervisée par 150 observateurs internationaux dont certains sont déjà sur place. Il y aura ensuite des élections «libres et honnêtes» pour élire une assemblée provinciale et un gouverneur. Ce régime devrait conduire progressivement la province à davantage d’autonomie politique mais également assurer une meilleure répartition des richesses naturelles entre la province et Djakarta.

Un des point de l’accord le plus compliqué à mettre en œuvre sera le désarmement de la rébellion, forte de quelques milliers de combattants, et le rôle de l'armée indonésienne durant le cessez-le-feu. Les rebelles craignent en effet de se retrouver sans protection face aux 30 000 membres des forces de sécurité indonésiennes et notamment les policiers d'élite de la Brimob, fréquemment accusés d’exactions dans la province. Au delà, les indépendantistes achénais savent que, privés de leurs armes et donc de tout moyens de pression militaire, il deviendra pour eux presque impossible de lutter pour l’indépendance après avoir obtenu l’autonomie.



par Jocelyn  Grange

Article publié le 09/12/2002