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Guinée

Lansana Conté «très affaibli»

Le président Lansana Conté est toujours soigné à la clinique royale de l’hôpital militaire de Rabat. Annoncée, le 21 décembre dernier comme un voyage privé et de promotion de la Guinée auprès des hommes d’affaires marocains, cette visite a finalement été présentée comme une consultation médicale du président «très affaibli».
L’arrivée de Lansana Conté, président de Guinée, au Maroc pour des soins intensifs, avait été entourée du secret. Une importante délégation familiale l’accompagne dans ce voyage, ce qui fait dire au commun des Guinéens que le cas du président est beaucoup plus grave que ce qu’on tente de faire croire. Les communiqués de presse contradictoires ont entretenu toutes sortes de rumeurs sur l’état de santé du président. Mais aujourd’hui les rumeurs ont évolué. Le président n’est pas mort, mais il est bel et bien malade. Les seules rumeurs qui circulent encore font état des suites d’une crise de diabète dont le président aurait été victime au début du mois de décembre. Une autre version fait état de complications de problèmes rénaux et de prostate qui nécessiteraient des soins intensifs.

En tout cas, même s’il y a un mystère autour de la maladie du président, il ne fait plus aucun doute qu’il est souffrant, au point de ne pas pouvoir enregistrer son discours de présentation des vœux au peuple guinéen. Le Premier ministre, Lamine Sidimé a déclaré à la télévision et à la radio guinéennes, le 31 décembre, que le président absent l’avait chargé «de livrer son message de nouvel an». Il a surtout parlé de vigilance, de quiétude et de préservation des «avancées de la démocratie» en Guinée. Aux oreilles de l’opposition, ce discours a sonné comme un aveu de faiblesse et un appel au secours d’un pouvoir sans tête. Dans les milieux proches du pouvoir à Conakry on se prépare à parer à toute éventualité, «dans la légalité et dans le respect de la constitution». Les différents états-majors des partis politiques tiennent réunions sur réunions et l’ambiance tendue que crée l’absence de Lansana Conté rappelle les dernières heures du président Sékou Touré, lui aussi parti de Conakry pour recevoir des soins, avec une importante délégation familiale. Il était aussi passé par le Maroc avant d’être admis dans un hôpital de Cleveland aux Etats-Unis pour une opération du cœur qui lui avait été fatale, le 26 mars 1984.

«risque réel d'un nouveau coup d'Etat militaire»

Les partis politiques de l’opposition regroupés au sein du FRAD (Front républicain pour l’alternance démocratique) se préparent à toute éventualité et publient un communiqué, le 30 décembre 2002, adressé à la presse nationale guinéenne et internationale. Le FRAD considère comme «illégal et illégitime le référendum du 11 novembre 2001» qui permet à Lansana Conté de briguer un nouveau mandat présidentiel en décembre 2003. Le troisième. Le FRAD ne reconnaît pas non plus les élections législatives qu’il avait boycottées en juin 2002. Il réclame aujourd’hui la constitution d’une commission électorale indépendante pour la reprise du processus électoral dans son ensemble en Guinée. Le FRAD se dit «disposé en cas de vacance du pouvoir à participer avec les autres forces vives de la nation à la gestion d’une période de transition d’un an maximum afin de mettre en place les institutions et organismes indispensables permettant d’obtenir des élections libres, justes et transparentes seule gage de stabilité, de progrès et de paix tant nationale que régionale», précise le communiqué.

Mais derrière cette unité de façade, se profile une guerre de succession. L’opposition, réunie au sein du FRAD appelle à une unité «indéfectible et patriotique» par une «commune détermination des leaders d’agir ensemble et de travailler en équipe». En choisissant ces termes, le FRAD s’adresse directement à l’UPR de Siradiou Diallo qui avait fait défection en juin 2002 en participant aux législatives. L’UPR compte une vingtaine de députés dans la nouvelle Assemblée nationale. Mais au sein des partis qui composent le FRAD l’entente n’est pas parfaite. Le RPG d’Alpha Condé connaît quelques problèmes de fonctionnement interne soulevés par certains cadres du parti vivant en Europe. Une autre composante du FRAD, l’UFD, souffre de divergence de points de vue entre responsables. Certains souhaitent que le futur candidat à l’élection présidentielle, qui pourrait faire l’unanimité, soit l’ancien président de l’Assemblée nationale Biro Diallo. Ce choix est contesté par d’autres qui reprochent aux premiers de vouloir imposer leur candidat «sans consultation démocratique». Pour le coordinateur de l’opposition (FRAD), Cissé Campbel, il est urgent d’accorder les violons pour éviter un nouveau coup d’Etat militaire en Guinée. «Le risque est réel», précise-t-il.



par Didier  Samson

Article publié le 04/01/2003