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Décryptage de la stratégie africaine d’Elf: les Etats afriacins concernés (Gabon)(extrait de l'ordonnance de renvoi)

L'ordonnance de renvoi (la décision du juge d’instruction qui conduit les prévenus de l’affaire Elf devant le tribunal) contient l'exposé des faits qui leur sont reprochés et indique leur qualification juridique. De la page 70 à la page 105, l’ordonnance de renvoi examine spécifiquement le rôle et la place des filiales africaines de Elf dans les circuits de financement occulte ainsi que le rôle de la compagnie pétrolière dans ces pays africains. RFI vous propose le texte intégral de cette partie de l’ordonnance de renvoi.
CHAPITRE 2 Les Etats africains concernés

De nombreux virements ayant crédité et débité les comptes de MM SIRVEN et TARALLO sont liés à des investissements effectués par le groupe ELF dans ces pays africains.
Tant M. TARALLO que M. SIRVEN ont affirmé que ces comptes ont véhiculé des fonds pour le compte de décideurs politiques africains.
Il est donc nécessaire, avant de procéder à l'examen de ces comptes, de connaître la situation de chacun des pays concernés et de rechercher les liens ayant pu exister entre leurs dirigeants d'une part et MM SIRVEN et TARALLO d'autre part.


Titre 1 : Le Gabon

Le Gabon a une population à peine supérieure à 1 million d'habitants. M. BONGO en est le président depuis 1967.

Selon M. TARALLO, la totalité des recettes fiscales du pétrole assure 70 % des revenus de. l'État gabonais. Il a précisé que le Gabon produisait 100 millions de barils par an et qu'ELF en commercialisait 50 à 60 millions de barils, Shell commercialisant environ 40% de la production.

Un rapport du Sénat américain (adressé le 11 juin 1999) révèle ainsi l'existence de comptes aux Etats Unis, à la City BANK, au nom de M. BONGO et de sociétés off-shore telles que TENDIN, que la CITYBANK a cédé au président BONGO en 1985, ou LÊONTINE ou "OS". En 1985, le président BONGO a transféré 52 millions de $ en faveur de TENDIN.

Le total des fonds sur les comptes de TENDIN a varié entre 28 et 72 millions de $. Depuis 1985. tes documents examinés par la sous commission indiquent que les fonds circulant dans les comptes bancaires particuliers de M. BONGO depuis 1985 ont dépassé les 130 millions de $. Parallèlement il a bénéficié de découverts de la CITIBANK du Gabon de plusieurs millions de $, immédiatement couverts par des virements des comptes de M. BONGO à Pans, lesquels étaient à leur tour couverts par des virements de comptes off-shore appartenant à TENDIN. Ce processus peut avoir été conçu pour éviter des virements directs venant des comptes off-shore de TENDIN sur les comptes du président du Gabon et de diminuer le risque que le personnel bancaire au Gabon en ait connaissance.


Le rapport insiste sur la nécessité pour la banque de garder ces opérations secrètes. Le rapport fait état à la page 23 du fait que M. DOSSOU bénéficiait de la signature du président sur le compte OS ouvert fin 1995 dans le but de recevoir des paiements de compagnies pétrolières. Ce compte a alors été crédité de 5 millions de $. D'autres dépôts ont été faits par la suite sur les comptes de M. BONGO: 3 millions de $ en 1996 et 21,9 millions de $ en 1997.

M. DOSSOU a noué des relations d'affaires étroites avec M. TARALLO. Dès 1991. ils se sont partagés 67 millions de francs suisses (versés selon M. TARALLO. par une compagnie pétrolière américaine AMERADA HESS) portés au crédit de leurs comptes à la banque HOTTINGER.
Nous verrons en effet que M. TARALLO soutient que l'ensemble des fonds ayant crédité ses comptes ouverts à la BDG. à l'UBP de Genève et chez BONSPARTNERS, étaient gérés par lui pour le compte de son mandant, le président BONGO, bénéficiaire de bonus et que ses investissements immobiliers, tant à Paris qu'à Bonifacio, ainsi que les achats d'oeuvres d'art ont été réalisés pour le compte du président BONGO (cf infra Livre troisième, Les comptes de M. TARALLO).

De même M. TARALLO explique les virements ayant crédité les comptes BONDPARTNERS de M. SIRVEN et débités des comptes VERS1MA et FERANA, par leur destination gabonaise (cf infra : les comptes de M. SIRVEN, livre 3éme.).

M TARALLO a expliqué, par ailleurs, avoir mis en place la société CPIH en 1975, sous M. GUILLAUMAT. CPIH avait pour vocation d'assurer la "contre-partie française et européenne des investissements diversifiés gabonais". Les gabonais avaient deux administrateurs. CPIH est une filiale d'ELF GABON. Créée en 1975 à l'issue d'une visite du président d'ELF au président de la République gabonaise, CPIH avait pour objectif déclaré d'aider, par ses investissements, à la diversification de l'économie gabonaise.

Le nom de CPIH est apparu dans l'affaire BIDERMANN, cette société ayant réalisé d'importantes avances de fonds au groupe BIDERMANN. M. DOSSOU a expliqué, dans un courrier du 21 novembre 1996, les conditions dans lesquelles CPIH avait effectué des investissements dans le groupe BIDERMANN. M. DOSSOU apparaît également, dans un document de la CIBC de Genève daté du 11 mai 1993, comme l'ayant droit économique de la société KOURTAS apparaissant dans l'affaire BIDERMANN (cf infra Livre cinquième, M. BIDERMANN et ses proches).

Par une attestation datée du 19 mars 1997, le président BONGO a confirmé que M. DOSSOU, en sa qualité de Conseiller Spécial auprès de la Présidence, avait été chargé en mai 1993 d'ouvrir ce compte à la CIBC au nom de KOURTAS, crédité par des fonds appartenant à la Présidence.

Article publié le 29/01/2003