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Centrafrique

A la recherche d’une solution de paix

Bangui-Libreville-Paris, c’est le nouvel axe par lequel les Centrafricains espèrent le retour de la paix pour leur pays. Les médiateurs centrafricains rencontrent à Libreville le président Omar Bongo, avant de s’entretenir avec les opposants centrafricains en exil à Paris pour déterminer les dates et les termes d’un dialogue national.
Depuis une dizaine d’années la Centrafrique est le théâtre de mutineries et de coups d’Etat manqués qui ont fini par installer ce pays dans une instabilité politique. Les deux derniers coups d’Etat, de mai 2001 et d’octobre 2002, ont consacré une nouvelle forme de contestation, la rébellion armée. L’ancien chef d’Etat-major de l’armée centrafricaine, le général François Bozizé, auteur de la tentative de coup d’Etat d’octobre 2002, avait trouvé refuge au sud du Tchad avec un carré de fidèles, pour qui le seul et unique objectif est de chasser le président Ange-Félix Patassé du pouvoir par tous les moyens. Les incursions des forces reconstituées du général Bozizé en territoire centrafricain ont mis à mal les relations entre la Centrafrique et le Tchad. Mais, malgré le nouvel exil du général Bozizé en France, en décembre 2002, les opérations militaires de ses fidèles n’ont pas connu de répit. Après plusieurs tentatives manquées de prendre la capitale, Bangui, les rebelles ont rebroussé chemin mais en scindant le pays deux. Ils occupent un bon nord-ouest du pays. Selon des communiqués contradictoires, ils auraient échoué dans leur tentative d’occuper le quart-ouest du pays, qui leur aurait permis de contrôler l’axe Bangui-Douala, la principale ouverture du pays vers la mer. En effet, par le port de Douala au Cameroun, la Centrafrique vainc son enclavement en réalisant par ce port l’essentiel de ses importations et exportations. Le contrôle de cet axe est donc vital pour le pouvoir de Bangui qui y déploie de nombreux détachements militaires pour rester maître de la région.

Ultime recours : le dialogue national

A l’instar de la République démocratique du Congo, qui a mis plusieurs années pour faire aboutir un dialogue inter-congolais avec la signature de l’accord de Pretoria, même si son application reste hypothétique comme l’accord de Marcoussis pour le dialogue inter-ivoirien, le régime du président Patassé souhaite aussi s’engager dans cette voie de la négociation. Ce type de discussion a fait la preuve qu’elle aboutit inévitablement au maintien en place du pouvoir. En validant un statu quo, elle met de fait un coup de frein aux harcèlements que subit le pouvoir. Ce répit parrainé par la communauté internationale est aussi souhaité par le pouvoir de Bangui qui a fini par donner des moyens à un coordonnateur du dialogue national, Mgr Paulin Pomodimo. Il s’est, lui, attaché les services d’un adjoint, en la personne d’Henri Maïdou, un ancien Premier ministre.

Ils sont tous deux partis à Libreville, le 3 février, rencontrer le président Omar Bongo, médiateur dans la crise centrafricaine au nom de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC). Ils se rendront ensuite à Paris, où se trouvent la plupart des opposants centrafricains et surtout le chef de la rébellion armée, le général François Bozizé. L’objet principal de ces rencontres se résume en quelques mots : amnistie et choix du lieu de la conférence. Pour l’opposition, dans sa grande majorité, le choix d’une capitale étrangère pour abriter la conférence sur le dialogue national centrafricain s’impose. Elle veut éviter, d’une part, les pressions du pouvoir si la conférence se tenait à Bangui et permettre, d’autre part, à tous les opposants d’y participer, surtout ceux qui sont sous le coup de condamnations allant des peines de prison à la peine de mort par contumace. Pour l’heure le pouvoir de Bangui n’est pas disposé à étudier un préalable d’amnistie générale.

La Coordination des partis politiques de l’opposition (CPPO) qui soutient l’idée d’un dialogue national appelle à un grand rassemblement le samedi 8 février à Bangui. Cette coordination réclame un cessez-le-feu et exige également le retrait de toutes les forces étrangères présentes en Centrafrique. Du côté du pouvoir, les rebelles congolais du MLC (Mouvement de libération du Congo) et des unités libyennes appuient toujours les forces gouvernementales, alors que du côté de la rébellion, la présence de nombreux éléments issus de la garde présidentielle et qui seraient d’origine tchadienne (les codos) constitueraient des forces d’appoint aux troupes du général Bozizé. Jean-Pierre Bemba, le Chef du MLC a annoncé que ses troupes partiraient de la Centrafrique dès la mi-février. Mais, selon les observateurs, le président Ange-Félix Patassé ne consentirait à laisser partir les troupes qui ont assuré le maintien de son régime que si un accord de cessez-le-feu est conclu au préalable avec la rébellion.

Sur le plan humanitaire, Stan Nkwain, coordonnateur des agences des Nations unies en Centrafrique, parle de grave crise sans précédent dans l’histoire de ce pays. En raison de la partition du pays, certaines régions manqueraient de tout ; médicaments, vaccins, pétrole et nourriture pour ceux qui ont fui les combats et se retrouvent en forêt. L’approvisionnement devant partir de Bangui ou du Tchad pour les régions sous contrôle de la rébellion, le coordonnateur des agences de Nations unies exige des uns et des autres un minimum de garantie de sécurité avant le déclenchement des opérations de secours. «Etant donné l’ampleur de l’action humanitaire qui devrait suivre la mission en zone rebelle à partir du 6 février, l’établissement d’un couloir humanitaire permettant d’accéder à ces zones par la route directement à partir de Bangui sera une condition sine qua non pour le lancement de toute opération d’assistance humanitaire en faveur des zones concernées», précise le coordonnateur des agences des Nations unies, Stan Nkwain.



par Didier  Samson

Article publié le 04/02/2003