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Centrafrique

Malade de la guerre civile

Plusieurs initiatives diplomatiques ont été enregistrées au cours du week-end, autour du dossier centrafricain. Les chefs d’Etat de la CEMAC se sont réunis à Brazzaville, tandis que le président tchadien effectuait une visite à Bangui. Le ministre français délégué à la Coopération s’est également rendu en RCA, dimanche. Cette mobilisation, qui survient à quelques jours de la tenue du sommet France-Afrique, traduit aussi la situation très grave que traverse ce pays.
C'est l'un des grands conflits africains du moment et parmi les plus durables. Aujourd'hui le pays est coupé en deux. Au Nord, une rébellion conduite par l'ancien chef d'état-major de l'armée, qui bénéficie du soutien du voisin tchadien. Au Sud, un chef d'Etat affaibli qui ne doit sa survie qu'à la présence auprès de lui d'un corps expéditionnaire libyen (qui a officiellement quitté le pays), de mercenaires tchadiens et de miliciens congolais, dont les responsables sont désormais poursuivis pour crimes de guerre devant la Cour pénale international.

La souveraineté centrafricaine est évidemment menacée par le conflit qui mine la cohésion nationale et installe un peu plus le pays dans l’anarchie. Les voies de communication sont affectées et, bien que les partisans du président Ange-Félix Patassé soient passées à l’offensive, la principale route de désenclavement du pays, qui rejoint le Cameroun à l’Ouest, a été plusieurs fois menacée au cours de ces dernières semaines. Officiellement les quelque mille cinq cents miliciens du rebelle congolais Jean-Pierre Bemba, accusés des pires atrocités lors des offensives loyalistes, sont sur le départ. Un journaliste de l’AFP en a vu cent cinquante quitter Bangui, samedi. Mais on voit mal comment le régime pourrait combattre sans ces précieux auxiliaires, alors que l’armée nationale n’a pas résisté aux multiples entreprises de déstabilisation qui ont marqué la vie du pays au cours de ces dernières années. La situation militaire est donc encore très incertaine mais il semble que le matériel libyen dont dispose le camp loyaliste fait la différence sur le terrain.

En tout cas les trois cent cinquante soldats de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) en voie de déploiement en RCA ne suffiraient pas à assurer les conditions d’un retour à la normale. Ils devront s’en tenir à la protection des institutions et à la sécurisation de la frontière nord, avec le Tchad, comme le prévoit leur mission initiale, décidée début octobre, avant même la dernière tentative de coup d’Etat, fin octobre. Si toutefois le reste des effectifs attendus arrive ! Les chefs d’Etat de la CEMAC se sont réunis samedi à Brazzaville pour mesurer la distance qu’il restait à parcourir avant de parvenir au résultat. Le président en exercice, le Congolais Denis Sassou Nguesso, a dressé un bilan modeste des initiatives en cours indiquant qu’on en était plutôt «à l’heure des actions patientes et discrètes». Il s’est félicité de la volonté du chef de l’Etat centrafricain d’organiser un dialogue inter-centrafricain et de la visite à Bangui du président tchadien.

Une mission militaire française attendue à Bangui

Simultanément, en effet, la capitale centrafricaine accueillait le président Idriss Déby. Une brève visite de «travail et d’amitié» au cours de laquelle le chef de l’Etat tchadien a vigoureusement démenti l’implication de son pays aux côtés des rebelles du général Bozizé. Au cours de la visite, il a été convenu de tenir dans de brefs délais une commission mixte afin de régler les problèmes bilatéraux. Notamment ceux soulevés par les razzias et pillages, commis par des bandes armées venues du Tchad, dont les centrafricains du Nord sont victimes et les exactions subies par des Tchadiens, ou des Centrafricains d’origine tchadienne en RCA.

Dimanche, c’était le ministre français délégué à la Coopération qui, à son tour, faisait escale à Bangui. Pierre-André Wiltzer a insisté sur «le succès du dialogue national (qui) conditionne le retour de la paix et la mobilisation de l’aide financière». Le ministre a également annoncé l’envoi d’une mission militaire française en Centrafrique pour évaluer la situation. Il a déclaré avoir rencontré à Paris les coordonnateurs du dialogue inter-centrafricain et évoqué la disponibilité de la France pour apporter sa contribution dans un cadre global. Vraisemblablement la CEMAC ici, comme la CEDEAO ailleurs. On mesurera mieux dans quelques jours, à l’issue du sommet France-Afrique, jusqu’où les partenaires de la Centrafrique sont prêts à s’engager pour soutenir Bangui.



Article publié le 17/02/2003