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Chine

Pour une solution politique en Irak

Lorsque Colin Powell va s’adresser au Conseil de sécurité de l’ONU cette semaine, la Chine sera l’un des membres à convaincre en priorité. Les dirigeants chinois ont adopté une ligne claire, à savoir qu’ils sont opposés à une guerre en Irak menée par les Etats-Unis, et appellent à une solution diplomatique et politique par le biais les Nations unies.
De notre correspondant à Pékin,

Après à un entretien téléphonique entre les présidents Jiang Zemin et Jacques Chirac le 26 janvier, «la Chine a une position très proche de celle de la France», rapporte l’agence officielle Xinhua, en précisant que selon Jiang «la Chine et la France doivent sauvegarder conjointement la crédibilité et l'autorité de l'ONU». Quelques jours plus tôt, le chancelier allemand Schröder et le secrétaire général du PCC Hu Jintao étaient «tombés d'accord pour considérer que leurs points de vue sont très, très semblables», selon le ministère des Affaires étrangères chinois. Pékin s’aligne donc sur l’axe Paris-Berlin.

Cet appui européen permet à la Chine de réaffirmer son poids diplomatique sur la scène internationale, en tant que défenseur d’un monde multipolaire.

Membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, la Chine, comme la France, a le droit de veto sur les résolutions du conseil. Pour Tang Jiaxuan, ministre chinois des Affaires étrangères, la guerre «doit et peut être évitée». Il partage l’avis français, russe et allemand de laisser davantage de temps aux enquêteurs de l’ONU en Irak. La remise du premier rapport d’enquête sur le désarmement marque selon lui «un nouveau commencement, et non une fin».

L’opposition de la Chine à la guerre s’explique de plusieurs manières par les analystes. D’une part un conflit mené par les Etats-Unis verrait le rôle de la Chine sur la scène internationale diminué. D’autre part la guerre créerait un précédent à une intervention beaucoup plus proche, en Corée du Nord, allié de Pékin qui vient de reprendre son programme nucléaire. Enfin les liens économiques sino-irakiens se sont renforcés depuis la guerre du Golfe, et la Chine a contribué au réarmement conventionnel de l’Irak, notamment en équipant de fibres optiques le nouveau système irakien de défenses anti-aériennes. La Chine se défend aussi d’avoir vendu des armes à l’Irak, via la Russie et d’autres pays de l’ex-bloc de l’Est, ce qu’affirment certains conservateurs américains.

«Impérialisme américain»

Dans les journaux, à la radio, sur Internet, la tendance unanime des médias est plus virulente que les discours des dirigeants. Ainsi le quotidien officiel en langue anglaise China Daily commentait cette semaine que «les enquêteurs de l’ONU subissent des pressions politiciennes». La dernière édition du magazine officiel Huanqiu Shibao publie en page de couverture une grande photographie couleur représentant Saddam Hussein souriant et détendu pour illustrer un article intitulé: «Pourquoi Saddam n’a pas peur». Dans le Quotidien de la jeunesse de Pékin on peut voir jour après jour des photos de civils irakiens, notamment des enfants, l’air apeuré. Un éditorial récent du Quotidien du Peuple, organe officiel du PCC, estimait qu’il est «vraiment ridicule pour les Etats-Unis d’afficher des airs de saint, alors qu’ils s’entêtent comme d’habitude à n’agir que pour leurs propres intérêts». Dans la rue, l’opinion générale s’inquiète aussi d’une guerre, perçue comme la marque de «l’impérialisme américain», terme qui revient systématiquement dans toutes les discussions sur le sujet.

Réaliste, la Chine se prépare pourtant déjà aux conséquences de la guerre. Troisième consommateur de pétrole au monde, et importateur net (pour moitié du Moyen-orient), elle a commencé cette semaine a constituer un stock stratégique de pétrole de 20 millions de tonnes de brut, de quoi tenir un mois.



par Abel  Segrétin

Article publié le 01/02/2003