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Irak

Crispation à la veille du rapport des inspecteurs

Fidèles à leur position, Français, Russes et Allemands semblent plus que jamais déterminés à empêcher le vote par le Conseil de sécurité d’une deuxième résolution autorisant le recours à une guerre contre l’Irak. Appuyés par les Chinois ils estiment en effet que les inspections donnent des résultats et qu’il est toujours possible de désarmer pacifiquement l’Irak. Excédé par leur résistance, les Etats-Unis ont une nouvelle fois affirmé qu’ils interviendraient en Irak, qu’une nouvelle résolution soit votée ou non. Selon Washington, la résolution 1441 justifie à elle seule une intervention militaire contre le régime de Saddam Hussein. Dans ce contexte, le rapport de Hans Blix et Mohamed el-Baradeï apparaît comme déterminant pour faire pencher les membres non permanents du Conseil de sécurité encore hésitants dans un camp ou dans l’autre.
Les Etats-Unis sont déterminés à déloger le maître de Bagdad et peu importe ce que contiendra le rapport des chefs des inspecteurs présenté vendredi aux membres du Conseil de sécurité. C’est en substance ce qui ressort des déclarations de ces derniers jours à Washington. Le président George Bush a en outre réuni mercredi un véritable conseil de guerre à la Maison Blanche en présence du secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, du chef d’état-major interarmées, le général Richard Myers, et du commandant en chef des opérations en Irak, le général Tommy Franks. Une conférence de presse a par la suite été donnée essentiellement pour faire savoir que le dispositif militaire était désormais prêt. Le plan d’attaque a même été communiqué à certains journalistes accrédités au Pentagone. A la différence de la guerre de 1991, la phase de bombardement devrait être courte mais massive et quelque 3 000 bombes téléguidées devraient pleuvoir sur l’Irak en 48 heures avant le lancement d’une campagne terrestre.

Leur décision arrêtée, les Etats-Unis n’ont toutefois pas renoncé à faire voter une deuxième résolution par le Conseil de sécurité de l’ONU autorisant un recours à la force contre le régime de Bagdad. Cette proposition discutée depuis le début de la semaine ne semble pas avoir convaincu la majorité des pays qui attendent le rapport des inspecteurs pour se prononcer. La Grande-Bretagne, principale alliée de Washington, recherche plus que jamais un consensus au sein de l’ONU pour justifier auprès d’une opinion publique farouchement hostile à la guerre la nécessité d’intervenir contre le régime de Saddam Hussein. Le Premier ministre Tony Blair, qui s’est dit «confiant» sur l’adoption à l’ONU d’une deuxième résolution sur l’Irak, tente par tous les moyens de convaincre Washington d’obtenir l’aval des Nations unies avant toute intervention militaire. Alors qu’un haut responsable du département d’Etat, Stephen Rademaker, affirmait encore mercredi que «les Etats-Unis n’avaient pas juridiquement besoin d’une deuxième résolution pour lancer une offensive contre l’Irak» et que «son obtention ne serait que très utile politiquement», le porte-parole de la Maison Blanche Ari Fleischer a déclaré jeudi que le projet de résolution présenté par Washington, Londres et Madrid pouvait être modifié. «Rien n’est inscrit dans le marbre», a-t-il affirmé, montrant ainsi le soucis de Washington de s’inscrire dans la légalité internationale.


Bagdad a «activement coopéré», selon Blix

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne envisageraient ainsi d’amender leur projet de résolution en fixant au président irakien «un ultimatum» et «des tâches précises» à accomplir afin de prouver son intention sincère de désarmer. Cet amendement vise en fait à arracher aux membres du Conseil de sécurité encore indécis leur soutien à une nouvelle résolution. Mais Paris, Moscou et Berlin qui campent sur leur position de désarmer l’Irak pacifiquement risquent de s’interposer. A l’issue d’une rencontre avec ses homologues russe et allemand, le chef de la diplomatie française Dominique de Villepin a déclaré sans ambages qu’«il n’y aura pas de deuxième résolution ouvrant la voie à l’emploi de la force», menaçant implicitement de l’utilisation du veto français. Plus direct, le ministre russe des Affaires étrangères Igor Ivanov a indiqué que son pays n’excluait pas l’utilisation de son droit de veto à l’ONU. Soucieux de donner toutes ses chances à la paix, la France, la Russie et l’Allemagne ont toutefois reconnu que les inspections ne pouvaient durer indéfiniment. Les trois pays refusent pourtant toute idée d’ultimatum à Bagdad qui les inscrirait de fait dans une logique de guerre.

Le chef des inspecteurs Hans Blix, qui doit présenter vendredi après-midi avec Mohamed el-Baradeï, le directeur de l’Agence internationale pour l’énergie atomique, un rapport déterminant sur le désarmement irakien, a affirmé mardi que Bagdad avait «coopéré de manière active le mois dernier». L’Irak a en effet accédé, certes à contrecoeur, à la demande de l’ONU en commençant la destruction de ses missiles al-Samoud 2 et a également autorisé les experts en désarmement à interroger plusieurs scientifiques irakiens. Les autorités de Bagdad ont en outre fourni des informations sur la destruction d’une partie de leur armement biologique et chimique. Ces mesures ont toutefois été balayées par le secrétaire d’Etat Colin Powell qui a une nouvelle fois accusé l’Irak de manipuler la communauté internationale, estimant que les gestes consentis par Saddam Hussein étaient «trop peu» et arrivaient «trop tard».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 06/03/2003