Grande-Bretagne
Irak: Tony Blair ploie mais ne se brise pas
Après dix longues heures d’un débat furieux et passionné, Tony Blair a donc sauvé la face en obtenant le soutien du parlement britannique à une action militaire contre l’Irak. Mais au prix d’un préjudice personnel énorme pour le Premier ministre: il subit ainsi une nouvelle rébellion majeure, puisque pas moins de 139 députés travaillistes ont voté contre la politique du gouvernement, plus encore que lors d’un premier vote fin février qui avait recueilli 122 voix contestataires.
Tony Blair a su, à l'automne dernier, persuader Georges Bush d'emprunter le chemin des Nations unies. Il s'agissait de tout faire pour obtenir l'aval de la Communauté internationale avant de partir pour une guerre déjà décidée par les Etats-Unis. Pour le premier ministre britannique, c'était au-delà de la défense de ses propres convictions, une façon de faire résonner à Washington la voix de l'Europe. Car Tony Blair reste le dirigeant du Royaume Uni le plus pro-européen que le continent ait connu depuis de longues années. L'entreprise, on le sait, a échoué. Et le premier ministre britannique a dû faire un choix terrible. En s'engageant dans une guerre dite illégale, aux côtés de son allié américain, il s'est de fait écarté de la conception multilatérale des relations internationales qu'il prétendait justement défendre. Et il apparaît dorénavant sur la scène européenne comme celui qui a choisi à l'heure du combat le grand large. Bien plus que l'Espagne ou l'Italie, dont les postures diplomatiques, pour n'être suivies par aucun engagement militaire, perdent une grande part de leur consistance.
Mais si Tony Blair a dû transiger avec certaines de ses croyances à l'occasion d'un conflit qu'il croit juste, il n'a pas pour autant abandonné l'idée de les défendre dans l'après guerre. C'est donc pour remettre inlassablement l'ouvrage sur le métier que Tony Blair se rend dans la résidence de son ami Bush. Il veut évoquer avec lui la façon dont ils peuvent tous deux amener les Etats-Unis et l'Europe à travailler à nouveau ensemble en tant que partenaires et non rivaux. Le dirigeant britannique veut remettre l'ONU au coeur du système, qu'il s'agisse de la gestion de la crise humanitaire ou de la reconstruction de l'Irak. Il veut aussi reparler du processus de paix au Proche-Orient, dont la relance est permise par la désignation du premier ministre palestinien. Des thèmes chers aux diplomaties européennes dont Tony Blair se fait l'ambassadeur à Washington. Rétablir des relations transatlantiques sereines constitue, après le déclenchement de la plus grave crise qu'ait connue l'Europe et les Etats-Unis, son actuelle feuille de route. A Washington la tâche ne sera pas aisée. Les faucons y défendent l'idée que l'Amérique ne peut décidément plus compter sur les Nations unies. En Europe la plaie est encore trop à vif pour qu'un rapprochement se fasse. La voie empruntée par le premier ministre britannique a donc tout d'une ligne de crête. Mais cela ne semble pas gêner un Tony Blair plus ancré dans ses convictions que jamais.
Le revirement de Clare Short
Il faut dire qu’en deux jours Tony Blair a enregistré la démission de trois membres de son gouvernement: Robin Cook, ministre des relations avec le Parlement et ancien secrétaire au Foreign Office, Lord Philip Hunt, sous-secrétaire d'Etat à la Santé, suivi de de John Denham, secrétaire d'Etat à l'Intérieur. Sans oublier le départ de quatre secrétaires privés parlementaires.
Des défections contre-balancées par l’étonnant revirement de Clare Short, la ministre au Développement International qui après avoir qualifié l’action de Tony Blair d’extrêmement dangereuse et juré de quitter son poste sans le feu vert de l’ONU, a finalement décidé de rester au gouvernement... Clare Short a expliqué son geste en invoquant, elle aussi, l’intransigeance de la France. Mais de tout autres rumeurs circulent: pour certains analystes, il est plus probable qu’elle soit restée pour pouvoir participer au volet humanitaire d’après-guerre et notamment la reconstruction de l’Irak après l’attaque anglo-américaine. D’autres vont même jusqu’à soupçonner que le chancelier de l’Echiquier Gordon Brown l’aurait convaincue de rester, ne pouvant risquer de perdre un autre allié au sein du cabinet.
Néanmoins, Clare Short vient de perdre toute crédibilité, surtout lorsqu’on compare son geste à celui, majestueux, de Robin Cook. Sans compter que Tony Blair pourrait finalement décider de se débarrasser d’elle une fois le conflit achevé... Un Premier ministre qui par la même occasion sort grandi de ce coup de poignard dans le dos même si la décision de Clare Short apparaît un bien maigre lot de consolation pour Tony Blair, affaibli par le train de démissions et épuisé par des semaines de négociations internationales infructueuses.
Certes le chef du gouvernement a remporté la partie mais il a dû compter paradoxalement sur l’appui de l’opposition conservatrice et se retrouve fragilisé à la veille d’un vaste conflit militaire. Le message de son camp est très clair: le chef du gouvernement va désormais agir sans le soutien des travaillistes, sans le soutien de la population britannique et sans le soutien de l’opinion internationale.
Mais si Tony Blair a dû transiger avec certaines de ses croyances à l'occasion d'un conflit qu'il croit juste, il n'a pas pour autant abandonné l'idée de les défendre dans l'après guerre. C'est donc pour remettre inlassablement l'ouvrage sur le métier que Tony Blair se rend dans la résidence de son ami Bush. Il veut évoquer avec lui la façon dont ils peuvent tous deux amener les Etats-Unis et l'Europe à travailler à nouveau ensemble en tant que partenaires et non rivaux. Le dirigeant britannique veut remettre l'ONU au coeur du système, qu'il s'agisse de la gestion de la crise humanitaire ou de la reconstruction de l'Irak. Il veut aussi reparler du processus de paix au Proche-Orient, dont la relance est permise par la désignation du premier ministre palestinien. Des thèmes chers aux diplomaties européennes dont Tony Blair se fait l'ambassadeur à Washington. Rétablir des relations transatlantiques sereines constitue, après le déclenchement de la plus grave crise qu'ait connue l'Europe et les Etats-Unis, son actuelle feuille de route. A Washington la tâche ne sera pas aisée. Les faucons y défendent l'idée que l'Amérique ne peut décidément plus compter sur les Nations unies. En Europe la plaie est encore trop à vif pour qu'un rapprochement se fasse. La voie empruntée par le premier ministre britannique a donc tout d'une ligne de crête. Mais cela ne semble pas gêner un Tony Blair plus ancré dans ses convictions que jamais.
Le revirement de Clare Short
Il faut dire qu’en deux jours Tony Blair a enregistré la démission de trois membres de son gouvernement: Robin Cook, ministre des relations avec le Parlement et ancien secrétaire au Foreign Office, Lord Philip Hunt, sous-secrétaire d'Etat à la Santé, suivi de de John Denham, secrétaire d'Etat à l'Intérieur. Sans oublier le départ de quatre secrétaires privés parlementaires.
Des défections contre-balancées par l’étonnant revirement de Clare Short, la ministre au Développement International qui après avoir qualifié l’action de Tony Blair d’extrêmement dangereuse et juré de quitter son poste sans le feu vert de l’ONU, a finalement décidé de rester au gouvernement... Clare Short a expliqué son geste en invoquant, elle aussi, l’intransigeance de la France. Mais de tout autres rumeurs circulent: pour certains analystes, il est plus probable qu’elle soit restée pour pouvoir participer au volet humanitaire d’après-guerre et notamment la reconstruction de l’Irak après l’attaque anglo-américaine. D’autres vont même jusqu’à soupçonner que le chancelier de l’Echiquier Gordon Brown l’aurait convaincue de rester, ne pouvant risquer de perdre un autre allié au sein du cabinet.
Néanmoins, Clare Short vient de perdre toute crédibilité, surtout lorsqu’on compare son geste à celui, majestueux, de Robin Cook. Sans compter que Tony Blair pourrait finalement décider de se débarrasser d’elle une fois le conflit achevé... Un Premier ministre qui par la même occasion sort grandi de ce coup de poignard dans le dos même si la décision de Clare Short apparaît un bien maigre lot de consolation pour Tony Blair, affaibli par le train de démissions et épuisé par des semaines de négociations internationales infructueuses.
Certes le chef du gouvernement a remporté la partie mais il a dû compter paradoxalement sur l’appui de l’opposition conservatrice et se retrouve fragilisé à la veille d’un vaste conflit militaire. Le message de son camp est très clair: le chef du gouvernement va désormais agir sans le soutien des travaillistes, sans le soutien de la population britannique et sans le soutien de l’opinion internationale.
par Muriel Delcroix
Article publié le 19/03/2003