Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Défense

Les États-Unis testent la «mère de toutes les bombes»

L’armée de l’air a testé mardi en Floride la bombe conventionnelle la plus puissante jamais employée.
Son appellation officielle: Massive Ordnance Air Blast, ce qui signifie: munition massive à effet de souffle. Son surnom: «Mère de toutes les bombes» (Mother of all bombs, allusion à la célèbre expression de Saddam Hussein décrivant la précédente guerre comme la «mère de toutes les batailles»). Son sigle est le même dans les deux cas: MOAB.

L’engin pèse 9,5 tonnes ce qui en fait la bombe la plus lourde de toute l’histoire militaire et a une capacité de destruction équivalente à celle d’une petite bombe atomique. Larguée d’un avion, elle atteint son but par guidage satellitaire, ce qui en fait une arme non seulement redoutable par sa puissance, mais qui l’inscrit dans la panoplie des «armes intelligentes», tout comme les bombes guidées par laser. Sauf que, dans le cas de ces dernières, il est nécessaire que l’objectif soit désigné par un rayon laser tout au long du bombardement afin de guider le projectile vers sa cible avec précision, ce qui suppose la présence soit d’un avion au-dessus de celle-ci, «illuminant» au laser l’objectif, soit d’un agent au sol braquant un rayon laser sur ce dernier.

Dans les deux cas, cela immobilise des ressources et les place en danger. Rien de tel avec le guidage par satellite qui, moyennant une programmation préalable comme celle que l’on fait subir aux missiles de croisière, se dirige grâce au GPS droit sur l’objectif à détruire avec une précision de quelques mètres tandis que le bombardier peut s’éloigner vers des horizons plus sûrs.
Une précision de quelques mètres est d’ailleurs sans doute superflue dans le cas de la MOAB. Sa puissance de destruction, sans équivalent hormis les armes nucléaires, dépasse, et de loin, ce que l’on a fait de plus meurtrier jusqu’à présent, à savoir la redoutable BLU-82, surnommée «daisy cutter» (faucheuse de marguerites), employée depuis la guerre du Vietnam, mais également au cours de celle du Koweït, et, plus récemment, lors de la campagne d’Afghanistan.

Une arme «psychologique»

Comme la daisy cutter, la MOAB est une bombe à effet de souffle. Autrement dit, ce qu’elle ne détruit pas par les éclats ou la chaleur, elle anéantit par la puissance du souffle provoqué par l’explosion. Les bâtiments, bien sûr, mais a fortiori les êtres vivants, dont les tissus et les organes sont déchirés par le souffle et, quand ce n’est pas le cas, qui sont asphyxiés par la raréfaction soudaine de l’oxygène, provoquée par l’explosion.

Pour un porte-parole de l’armée américaine, la MOAB est «une arme psychologique. Son emploi peut être très dévastateur contre des forces terrestres». Psychologique ? Sans doute, si l’on considère que l’essai effectué mardi a été entouré d’une abondante publicité et que le calendrier de ce test doit sans doute au moins autant aux préparatifs de guerre contre l’Irak qu’à une programmation purement technique. Le chef d’état-major interarmes, le général Myers, a précisé que «tout ce que nous avons dans notre arsenal, tout ce qui est en train d’être développé, pourrait être utilisé» lors du prochain conflit, tandis que le secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, ajoutait que les États-Unis cherchaient par tous les moyens à faire pression sur l’Irak.

On ne saurait mieux expliquer que la médiatisation de l’essai vise avant tout à démoraliser davantage encore les forces armées irakiennes à la veille de la guerre. Pourtant, il serait inapproprié de parler de dissuasion: comme l’ont démontré les derniers conflits engagés par les États-Unis, ces armes, pour terrifiantes qu’elles soient, ne sont pas considérées par l’état-major américain comme des armes de dissuasion, mais bien comme des armes d’emploi.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 12/03/2003