Défense
Les limites des capacités de projection françaises
La France n’a pas choisi de s’engager contre l’Irak. Si elle l’avait fait, ses moyens en hommes et en équipements auraient-ils été supérieurs à ceux de la guerre du Golfe ?
En 1991, les armées françaises, mobilisées dans le cadre des opérations Bouclier du désert et Tempête du désert, avaient envoyé 12 000 hommes dans le Golfe contre
30 000 pour les Britanniques, professionnalisés depuis bien longtemps. Désormais, la France dispose elle aussi d’une armée professionnelle composée d’environ 370 000 soldats. D’où, en théorie, une augmentation importante de ses effectifs disponibles pour des opérations extérieures: conflits, opérations de maintien de la paix.
D’après la loi de programmation militaire 2003-2008, qui définit un modèle d’armées à l’horizon 2015, l’armée de terre doit en effet être en mesure d’engager plus de 50 000 hommes, sans relève, pour prendre part à un conflit majeur dans le cadre de l'Alliance atlantique. La marine doit être capable d’engager une force navale comprenant le groupe aéronaval et son accompagnement, un groupe amphibie pouvant projeter un groupement de type blindé léger de 1400 hommes, ainsi que des sous-marins nucléaires d'attaque.
Quant à l’armée de l’air, elle doit pouvoir mobiliser une force aérienne constituée d'une centaine d'avions de combat (dont soixante-quinze peuvent être engagés dans une opération européenne) et les ravitailleurs associés, un groupe de transport capable de projeter 1500 hommes à 5000 kilomètres en trois jours, ainsi que les moyens de commandement, de conduite, de détection et de contrôle aérien, et les bases aériennes nécessaires.
De même, un contingent de 600 gendarmes peut être engagé à l'extérieur des frontières dans des opérations de soutien et de rétablissement de la paix, ainsi que les éléments spécialisés et d'accompagnement des forces.
13 000 soldats actuellement en opération
Voilà pour les intentions. Dans les faits, nous n’en sommes pas là. Les armées françaises sont engagées dans un grand nombre d’opérations et leur capacité de projection n’est pas extensible à l’infini. Près de 38 000 soldats sont actuellement basés hors de métropole. 13 000 d’entre eux sont en opération sur trois continents dont 5500 dans les Balkans (Bosnie, Kosovo, Macédoine), plus de 3000 en Côte d’Ivoire et 300 en Centrafrique et enfin, 500 en Afghanistan. Sans compter le plan Vigipirate de prévention du terrorisme qui mobilise depuis hier 500 militaires supplémentaires. Ils viennent s’ajouter aux 300 militaires déjà déployés pour assurer la sécurité des points sensibles, tels que les gares et les aéroports.
Combien d’hommes auraient pu être déployés en Irak et selon quel scénario ? La question n’est évidemment pas d’actualité pour le ministère de la Défense! En ce qui concerne les équipements, il est intéressant de lire l’analyse du général de l'armée de l'air Jean-Patrick Gaviard, sous-chef opération à l’état-major des armées, sur son expérience en Afghanistan*: «Cette crise a bien sûr mis en évidence (…) la nécessité de disposer d'une mobilité stratégique autonome. Aujourd'hui, l'armée de l'air ne peut couvrir que 40 % du besoin des armées et ses C-160 Transall et C-130 sont vieillissants. Le retrait des plus anciens appareils dès 2006 pose la question d'un renouvellement rapide par des A-400M. Cette capacité ne sera donc retrouvée qu'aux environs de 2011. Comme cela a été signalé pour les forces spéciales, l'absence d'hélicoptères lourds pèse fortement sur l'aéromobilité des forces terrestres. Parallèlement, l'absence de moyens spécifiques de projection maritime doit être soulignée». Et le porte-avions Charles-de-Gaulle ? Il est opérationnel depuis l’Afghanistan et fait actuellement escale à La Sude (Crète) pour quatre ou cinq jours. On peut supposer que, dans l’immédiat, il ne prendra pas le chemin du Golfe!
* Disponible sur le site Internet du ministère de la Défense:
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30 000 pour les Britanniques, professionnalisés depuis bien longtemps. Désormais, la France dispose elle aussi d’une armée professionnelle composée d’environ 370 000 soldats. D’où, en théorie, une augmentation importante de ses effectifs disponibles pour des opérations extérieures: conflits, opérations de maintien de la paix.
D’après la loi de programmation militaire 2003-2008, qui définit un modèle d’armées à l’horizon 2015, l’armée de terre doit en effet être en mesure d’engager plus de 50 000 hommes, sans relève, pour prendre part à un conflit majeur dans le cadre de l'Alliance atlantique. La marine doit être capable d’engager une force navale comprenant le groupe aéronaval et son accompagnement, un groupe amphibie pouvant projeter un groupement de type blindé léger de 1400 hommes, ainsi que des sous-marins nucléaires d'attaque.
Quant à l’armée de l’air, elle doit pouvoir mobiliser une force aérienne constituée d'une centaine d'avions de combat (dont soixante-quinze peuvent être engagés dans une opération européenne) et les ravitailleurs associés, un groupe de transport capable de projeter 1500 hommes à 5000 kilomètres en trois jours, ainsi que les moyens de commandement, de conduite, de détection et de contrôle aérien, et les bases aériennes nécessaires.
De même, un contingent de 600 gendarmes peut être engagé à l'extérieur des frontières dans des opérations de soutien et de rétablissement de la paix, ainsi que les éléments spécialisés et d'accompagnement des forces.
13 000 soldats actuellement en opération
Voilà pour les intentions. Dans les faits, nous n’en sommes pas là. Les armées françaises sont engagées dans un grand nombre d’opérations et leur capacité de projection n’est pas extensible à l’infini. Près de 38 000 soldats sont actuellement basés hors de métropole. 13 000 d’entre eux sont en opération sur trois continents dont 5500 dans les Balkans (Bosnie, Kosovo, Macédoine), plus de 3000 en Côte d’Ivoire et 300 en Centrafrique et enfin, 500 en Afghanistan. Sans compter le plan Vigipirate de prévention du terrorisme qui mobilise depuis hier 500 militaires supplémentaires. Ils viennent s’ajouter aux 300 militaires déjà déployés pour assurer la sécurité des points sensibles, tels que les gares et les aéroports.
Combien d’hommes auraient pu être déployés en Irak et selon quel scénario ? La question n’est évidemment pas d’actualité pour le ministère de la Défense! En ce qui concerne les équipements, il est intéressant de lire l’analyse du général de l'armée de l'air Jean-Patrick Gaviard, sous-chef opération à l’état-major des armées, sur son expérience en Afghanistan*: «Cette crise a bien sûr mis en évidence (…) la nécessité de disposer d'une mobilité stratégique autonome. Aujourd'hui, l'armée de l'air ne peut couvrir que 40 % du besoin des armées et ses C-160 Transall et C-130 sont vieillissants. Le retrait des plus anciens appareils dès 2006 pose la question d'un renouvellement rapide par des A-400M. Cette capacité ne sera donc retrouvée qu'aux environs de 2011. Comme cela a été signalé pour les forces spéciales, l'absence d'hélicoptères lourds pèse fortement sur l'aéromobilité des forces terrestres. Parallèlement, l'absence de moyens spécifiques de projection maritime doit être soulignée». Et le porte-avions Charles-de-Gaulle ? Il est opérationnel depuis l’Afghanistan et fait actuellement escale à La Sude (Crète) pour quatre ou cinq jours. On peut supposer que, dans l’immédiat, il ne prendra pas le chemin du Golfe!
* Disponible sur le site Internet du ministère de la Défense:
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par Estelle Nouel
Article publié le 26/03/2003