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Guerre en Irak

Les Américains frappent le cœur de Bagdad

D’intenses combats se sont déroulés lundi matin au centre même de la capitale irakienne. Les troupes américaines, qui ont lancé une attaque terrestre vers 7h00 (locale), ont pris pour cible le palais de la république, l’un des symboles du pouvoir de Saddam Hussein. Le lieutenant-colonel Peter Bayer, le responsable des opérations en cour, a même affirmé que trois palais présidentiels seraient désormais sous le contrôle des troupes américaines qui n’ont, semble-t-il, pas été confrontées à une forte résistance dans leur progression vers le centre de la ville. L’aviation américano-britannique qui a survolé la capitale toute la nuit a par ailleurs lancé dans la matinée d’intenses raids visant essentiellement la périphérie de Bagdad.
Plus d’une centaine de véhicules blindés, parmi lesquels 70 tanks, ont pénétré tôt lundi matin dans le centre même de Bagdad et pris d’assaut le palais de la république, l’un des principaux centres du pouvoir irakien. Des obus ont frappé l’enceinte de ce complexe, provoquant des incendies et une violente explosion émanant sans doute d’un dépôt de munitions a été entendue dans le périmètre même du palais. Si les troupes américaines de la 3ème division d’infanterie n’ont semble-t-il rencontré aucune résistance dans leur avancée vers le cœur de la capitale irakienne, elles étaient en proie à d’intenses tirs d’artillerie aux abords du complexe présidentiel, défendu par des soldats irakiens. Un officier américain, en charge de cette opération, a affirmé à des journalistes présents à l’aéroport international de Bagdad, qu’une attaque avait été déclenchée à 7h00 GMT dans le centre de la capitale. «Nos forces attaquent actuellement le centre même de la ville», a déclaré le lieutenant-colonel Peter Bayer en précisant notamment que samedi dernier il ne s’était agi que d’une simple incursion alors que ce matin «l’attaque est réelle». Un peu plus tôt des officiels américains avaient affirmé que les troupes de la coalition avaient encerclé la capitale, bloquant ainsi tous les mouvements des troupes irakiennes. Ces sources ont également précisé que les principaux axes routiers menant à Bagdad étaient désormais sous le contrôle de la coalition.

Les événements se sont donc précipités ce lundi, la résistance tant redoutée de la garde républicaine irakienne apparaissant pour l’instant très réduite. L’officier en charge de l’opération terrestre déclenchée ce matin a d’ailleurs affirmé que les forces américaines avaient pris le contrôle de trois complexes présidentiels, dont le principal palais de Saddam Hussein situé au centre de Bagdad. «Nos troupes ont sécurisé le palais de la république ainsi qu’un autre palais dans le centre de la ville et un troisième situé près de l’aéroport international», a ainsi affirmé le lieutenant-colonel Peter Bayer. Selon lui, deux bataillons de chars et un bataillon d’infanterie mécanisée participaient à cette opération. Les unités américaines ont essuyé des tirs d’armes légères et de roquettes mais ont pu, selon lui, sécuriser leurs positions.

Les forces irakiennes auraient, par ailleurs, fait exploser deux ponts près de Bagdad pour tenter de retarder l’invasion de la capitale par les troupes américaines. Cette information émane d’un officier américain, le général John Kelly, qui a souligné que c’est la première fois depuis le début de la guerre, le 20 mars dernier, que les soldats irakiens mènent de telles opérations de sabotage pour ralentir l’avancée de la coalition. «Les deux ponts au-dessus de la rivière Diyala ( à l’est de Bagdad) n’ont pas été complètement détruits mais sont inutilisables», a-t-il précisé. Au moins six soldats américains ont par ailleurs été blessés et six autres sont portés disparus après une attaque à la roquette contre une position militaire dans le sud de la capitale. Le commandement américain a confirmé lundi après-midi que quatre personnes, deux militaires et deux journalistes, ont été tués lors de combats dans le sud de la ville.

Démenti formel des autorités de Bagdad

Le ministre irakien de l’Information, Mohammed Saïd al-Sahhaf, a violemment démenti les informations selon lesquelles les troupes américaines occuperaient des positions au sein de la capitale Bagdad. Selon lui, les colonnes américaines ont été «massacrées» par «les vaillantes troupes irakiennes». Le ministre a également appelé les médias à «ne pas croire» ce que disent les Américains sur les combats à Bagdad, soutenant que les troupes irakiennes avaient infligé à leurs forces «une leçon que l'histoire n'oubliera jamais». «Nos forces héroïques ont tué des centaines» de soldats américains qui ont pénétré dans le quartier de Dora dans le sud-ouest de la capitale, a-t-il précisé. «La bataille a été féroce et se poursuit encore», a-t-il également affirmé en soulignant que «les soldats américains étaient en train de se suicider sur les murs de Bagdad». Les bâtiments administratifs, dont les ministères de l’Information et des Affaires étrangères, situés autour du complexe présidentiel où se sont déroulés les intenses combats de ce matin, étaient toujours aux mains des Irakiens lundi. Des miliciens armés de lance-roquettes et de fusils d’assaut en protégeaient l’accès. De violents combats ont par ailleurs repris en milieu de matinée dans le complexe principal du palais de la République, que les Américains avaient affirmé un peu plus tôt contrôler.

Peu après l’annonce de la prise des trois palais présidentiels, le Pentagone a affirmé que l’opération des forces militaires américaines en cours dans la capitale irakienne n’était pas «la bataille de Bagdad» mais un «fort message» adressé au régime de Saddam Hussein. Cette opération ne «ne représente pas la bataille de Bagdad. C'est un fort message selon lequel nous pouvons aller où nous voulons, quand nous voulons» adressé aux forces irakiennes et à Saddam Hussein, a notamment affirmé Ben Owens, du département de la Défense. En attaquant le symbole du pouvoir au cœur de Bagdad, les Américains ont sans doute également voulu délivrer un message à la population et lui signifier ainsi que les autorités irakiennes n’avaient plus le contrôle de la capitale.

Lors de son point de presse quotidien, le général Vince Brook a affirmé que le régime irakien avait perdu le contrôle d’une partie de la capitale. «Les attaques américaines au cœur de Bagdad contre des cibles clés du régime renforcent la réalité que le régime ne contrôle plus toute la ville», a-t-il notamment déclaré. L’opération de lundi matin a été qualifiée de «raid à travers la ville» par le commandement central. A Londres, le ministre britannique de la Défense Geoff Hoon a pour sa part affirmé que la moitié des forces de la garde républicaine irakienne ne combattait plus pour Saddam Hussein. «Au fur et à mesure que les forces de la coalition ont occupé des territoires, elles ont pu compter le nombre de tanks et de pièces d’artillerie qui ont été détruits et le chiffre rond de 50% semble être à peu près juste», a-t-il déclaré.

Ailleurs dans le pays, les troupes américaines sont parvenues à prendre le contrôle de la ville sainte de Kerbala après 48 heures de combats intenses au cours desquels quelque 400 miliciens irakiens auraient été tués. Plus au sud à Bassorah, plusieurs centaines de soldats britanniques ont pénétré dans le centre de la ville et auraient pris le contrôle de l’université jusqu’ici aux mains des partisans de Saddam Hussein. Les Royal Marines se sont également emparés de l’immense palais que le président irakien s’était fait construire dans cette ville chiite. Selon un officier britannique, la bataille de Bassorah est «plus ou moins terminée». Ali Hassan al-Majid, le cousin de Saddam Hussein, tristement surnommé Ali le chimique pour avoir organisé le gazage des populations kurdes, serait en outre mort. Il aurait été tué lors d’un raid aérien de la coalition sur Mossoul.

Dans le nord enfin, Mossoul a subi d’intenses bombardements. La télévision qatarienne al-Jazira a montré en direct des images de la ville d’où s’élevaient des nuages de fumée noire. Depuis la veille, des miliciens du parti Baas ont établi des barrages aux entrées et à l’intérieur même de la ville.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 07/04/2003