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Union européenne

Giscard déclenche la polémique

La réforme des institutions de l'Union européenne élargie, dans la version proposée par Valery Giscard d'Estaing, président de la Convention pour l’avenir de l’Europe, s’est heurtée à de vives critiques. Mais une version amendée a été retenue, tenant compte des objections des «petits» pays de l’Union, de la Commission de Bruxelles et du Parlement européen qui dénonçaient un affaiblissement de leur rôle.
La Convention pour l’avenir de l’Europe, présidée par l’ancien président français Giscard d’Estaing, a pour mission de proposer une Constitution de l’Union européenne, organisant les institutions européennes et leur fonctionnement, dans le cadre d’une communauté élargie à 25 membres. Les propositions présentées par le président de la convention, plutôt complexes au demeurant, ont essuyé, dès qu’elles ont été connues, un tir de barrage nourri. Il est vrai que les intérêts des parties en présence, Etats-nations, Commission européenne, Parlement européen sont souvent divergents et plusieurs dispositions du projet modifient l’équilibre entre les différents pouvoirs.

C’est pourquoi le présidium de 13 membres chargé de préparer les travaux de la Convention pour l’avenir de l’Europe a modifié la version initiale de son président, tentant d’apaiser craintes et appréhensions.

Première innovation, la présidence de l’Union européenne ne serait plus tournante, deux fois par an, formule qui a été jugée peu opérationnelle, surtout après le passage de 15 à 25 membres. Ce président de l’UE serait élu pour une durée de deux ans et demi, renouvelable une fois. Il serait choisi par les membres du Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement, en son sein ou parmi ses anciens membres. Il devrait, le cas échéant, abandonner son mandat national de chef d’état ou de gouvernement en cours. A l’intérieur du Conseil européen il n’aurait ni pouvoir de décision ni droit de vote mais, à l’extérieur, il représenterait l’Union européenne. Eventuellement, un bureau l’assisterait dans sa fonction de préparation des décisions du Conseil européen.

La version amendée ne retient plus la création d’un poste de vice-président du Conseil européen qui avait déclenché un tollé mais maintient celle d’un ministre des affaires étrangères de l’UE rassemblant les fonctions actuellement détenues par le Monsieur PESC, Javier Solana, et par le commissaire européen chargé des relations extérieures, Chris Patten. La présidence tournante serait maintenue pour les Conseils des ministres thématiques (agriculture, justice…).

La Commission européenne passerait de 20 à 15 membres et 15 commissaires délégués qui, en contrepartie de la réduction du nombre de commissaires permettrait la représentation de davantage de pays en cette instance. Le président de la Commission serait élu par le Parlement européen sur proposition du Conseil européen.

Le Parlement serait élu comme aujourd’hui pour cinq ans et compterait 700 députés au lieu des 732 prévus par le traité de Nice de décembre 2000 pour accroître la représentation des nouveaux adhérents à l’Europe communautaire. Enfin, Valery Giscard d’Estaing suggère la réunion annuelle d’un congrès composé pour un tiers des députés européens et pour deux tiers des représentants des parlements nationaux.

La «bronca» des petits

Dans les premières réactions, généralement vives, qui ont accueilli les propositions du président de la convention revient la critique d’avoir agi de son propre chef et de chercher à favoriser les grands pays de l’Union (Allemagne, France, Italie Espagne, Grande-Bretagne) par rapport aux petits. Ainsi pour le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker le document rendu public serait une «provocation destinée à susciter le débat».

Il y voit la volonté d’accroître l’influence des états les plus peuplés au détriment d’une véritable intégration européenne. Mais il se rassure en pensant que ce projet ne recevra pas l’approbation de l’ensemble de la convention pour l’avenir de l’Europe ni de la conférence intergouvernementale qui suivra pour l’adopter définitivement. Mettre fin à la présidence tournante de l’Union européenne fait craindre aux pays moins peuplés d’être évincés de la direction de l’Union. Ils appréhendent que la fonction ne revienne qu’à des personnalités issues des poids lourds européens rompant l’égalité théorique entre tous les pays membres.

Plusieurs parlementaires européens issus des petits comme des grands pays de l’Union estiment que le projet vise essentiellement à réduire les pouvoirs de la Commission et du Parlement et d’en faire des «appendices d’un Conseil européen surpuissant».

Après modifications, le commissaire européen aux Affaires institutionnelles Michel Barnier voit dans ce projet une base de travail. Sur cette base, l’ensemble des membres de la Convention doit encore se prononcer, avant que la proposition de Constitution de l’Union élargie soit présentée au sommet européen de Salonique en Grèce, le 20 juin prochain.



par Francine  Quentin

Article publié le 24/04/2003