Sénégal
Les islamistes à l’assaut de la laïcité
Un code de statut personnel en conformité avec la charia pour régir les musulmans sénégalais, en lieu et place du Code actuel de la famille d’inspiration laïque adopté en 1972, tel est le dessein nourri par les musulmans sénégalais. Mais les initiateurs de s’empresser d’ajouter: chrétiens et autres continueront d’être régis par l’actuel code de la famille. Mandaté par «l’ensemble des familles religieuses» du pays, le Comité islamique pour la réforme du code de la famille du Sénégal (Circofs), a mis la dernière main à un projet remis au président Wade le 12 avril dernier pour adoption par le gouvernement et l’Assemblée nationale.
De notre correspondant à Dakar
Ce n’est pas le premier assaut que les islamistes sénégalais, si divisés et aux intérêts opposés soient ils, lancent contre la République laïque au Sénégal sur cette question comme sur d’autres. Mais c’est la première fois qu’ils soumettent un projet aussi achevé avec à la clé un important lobbying et une puissante campagne de communication. Déjà, en 1971, quand l’actuel code de la famille était en discussion, les familles religieuses avaient élaboré en hâte un contre-projet qu’elles soumettent au président Senghor qui ne donnera jamais de suite. Tout au long de l’histoire politique sénégalaise post-coloniale, à chaque réforme du code de la femme, les notables religieux avaient mené des grilles pour empêcher leur adoption ou les diluer. Aujourd’hui, avec un président de la République qui ne cache pas ses opinions religieuses et en particulier son appartenance à la famille religieuse de Touba (mourides), les islamistes sénégalais croient le contexte favorable pour revenir à l’assaut.
«Nous ne pouvons pas imposer ce code à tout le monde, mais nous pouvons nous l’imposer à nous-mêmes», déclare l’imam Elimane Ndiaye, un des membres du comité d’initiative. Mais cette clause de style cache mal les dangers pour la République contenus dans le projet des islamistes s’il devait entre adopté par l’Assemblée nationale. Partant du fait que les musulmans sont majoritaires au Sénégal (plus de 90%) les islamistes invoquent la démocratie pour revendiquer un statut particulier qui les régirait. «A chacun sa religion, à chacun son droit de la famille» invoquant la liberté de culte pour dépecer les lois et règlements d’une république laïque sensés régir tous les citoyens sans distinction de religion.
Ce projet islamiste vise tous les aspects de la vie en société. En effet il embrasse les domaines aussi variés que les fiançailles, les mariages (célébration, conditions de validité, obligations du mari, de l’épouse, divorce), la filiation, le divorce, la garde des enfants, la puissance parentale (aujourd’hui dévolue à l’homme et que les enseignants et les femmes veulent modifier), l’héritage, etc. L’adoption de ce projet implique la restauration des tribunaux musulmans, des juridictions qui avaient été instaurées par le colonisateur (la France en l’occurrence) mais qui ont disparu même si dans certaines villes du Sénégal, les cadis (les juges musulmans) existent encore et qui interviennent dans les différends familiaux sans pour autant faire force de loi au regard des textes de la République.
Appel à la vigilance des jeunes chrétiens
Pour l’heure, les premières réactions sont venues de la communauté chrétienne. En effet, à l’occasion de la journée mondiale de la jeunesse catholique célébrée ce dimanche, l’archevêque de Dakar, Mgr Théodore Adrien Sarr, sans citer le projet des islamistes, a déclaré dans son homélie que «parfois, nous percevons des signes qui sont sources d’inquiétude, et nous nous demandons si cette laïcité qui, jusqu’à présent est la gloire du Sénégal, une garantie de la paix, ne va pas entre rognée de plus en plus». Et de lancer un appel aux milliers de jeunes chrétiens du pays à la vigilance: «vous, jeunes, vous allez construire le Sénégal de demain. Alors veillez à lutter pour le maintien de la laïcité positive. Veuillez à lutter pour que l’égalité, le droit et le devoir de tous se maintiennent le plus longtemps possible».
Pour l’heure, la balle est dans le camp du président Wade, de l’Assemblée nationale, dont le président et les présidents des groupes parlementaires ont tous reçu le projet de charia concocté par les familles religieuses du Sénégal. Mais dans un pays dont les populations à majorité musulmane récusent tout corset intégriste, le projet des extrémistes sénégalais a peu de chance d’être adopté, car cela impliquerait la réforme de la constitution laïque adoptée il y a moins de deux ans.
Ce n’est pas le premier assaut que les islamistes sénégalais, si divisés et aux intérêts opposés soient ils, lancent contre la République laïque au Sénégal sur cette question comme sur d’autres. Mais c’est la première fois qu’ils soumettent un projet aussi achevé avec à la clé un important lobbying et une puissante campagne de communication. Déjà, en 1971, quand l’actuel code de la famille était en discussion, les familles religieuses avaient élaboré en hâte un contre-projet qu’elles soumettent au président Senghor qui ne donnera jamais de suite. Tout au long de l’histoire politique sénégalaise post-coloniale, à chaque réforme du code de la femme, les notables religieux avaient mené des grilles pour empêcher leur adoption ou les diluer. Aujourd’hui, avec un président de la République qui ne cache pas ses opinions religieuses et en particulier son appartenance à la famille religieuse de Touba (mourides), les islamistes sénégalais croient le contexte favorable pour revenir à l’assaut.
«Nous ne pouvons pas imposer ce code à tout le monde, mais nous pouvons nous l’imposer à nous-mêmes», déclare l’imam Elimane Ndiaye, un des membres du comité d’initiative. Mais cette clause de style cache mal les dangers pour la République contenus dans le projet des islamistes s’il devait entre adopté par l’Assemblée nationale. Partant du fait que les musulmans sont majoritaires au Sénégal (plus de 90%) les islamistes invoquent la démocratie pour revendiquer un statut particulier qui les régirait. «A chacun sa religion, à chacun son droit de la famille» invoquant la liberté de culte pour dépecer les lois et règlements d’une république laïque sensés régir tous les citoyens sans distinction de religion.
Ce projet islamiste vise tous les aspects de la vie en société. En effet il embrasse les domaines aussi variés que les fiançailles, les mariages (célébration, conditions de validité, obligations du mari, de l’épouse, divorce), la filiation, le divorce, la garde des enfants, la puissance parentale (aujourd’hui dévolue à l’homme et que les enseignants et les femmes veulent modifier), l’héritage, etc. L’adoption de ce projet implique la restauration des tribunaux musulmans, des juridictions qui avaient été instaurées par le colonisateur (la France en l’occurrence) mais qui ont disparu même si dans certaines villes du Sénégal, les cadis (les juges musulmans) existent encore et qui interviennent dans les différends familiaux sans pour autant faire force de loi au regard des textes de la République.
Appel à la vigilance des jeunes chrétiens
Pour l’heure, les premières réactions sont venues de la communauté chrétienne. En effet, à l’occasion de la journée mondiale de la jeunesse catholique célébrée ce dimanche, l’archevêque de Dakar, Mgr Théodore Adrien Sarr, sans citer le projet des islamistes, a déclaré dans son homélie que «parfois, nous percevons des signes qui sont sources d’inquiétude, et nous nous demandons si cette laïcité qui, jusqu’à présent est la gloire du Sénégal, une garantie de la paix, ne va pas entre rognée de plus en plus». Et de lancer un appel aux milliers de jeunes chrétiens du pays à la vigilance: «vous, jeunes, vous allez construire le Sénégal de demain. Alors veillez à lutter pour le maintien de la laïcité positive. Veuillez à lutter pour que l’égalité, le droit et le devoir de tous se maintiennent le plus longtemps possible».
Pour l’heure, la balle est dans le camp du président Wade, de l’Assemblée nationale, dont le président et les présidents des groupes parlementaires ont tous reçu le projet de charia concocté par les familles religieuses du Sénégal. Mais dans un pays dont les populations à majorité musulmane récusent tout corset intégriste, le projet des extrémistes sénégalais a peu de chance d’être adopté, car cela impliquerait la réforme de la constitution laïque adoptée il y a moins de deux ans.
par Demba Ndiaye
Article publié le 16/04/2003