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Union européenne

Les Quinze face à leurs divisions

Les ministres des Affaires Etrangères des quinze pays de l’Union européenne tiennent une réunion informelle de deux jours en Grèce. Au programme des discussions, deux sujets particulièrement sensibles: le conflit en Irak et la relance du projet de défense commune européenne.
C’est sur l’île grecque de Rhodes que les Quinze tentent de retrouver leur unité en traitant d’un sujet qui les a profondément divisés au cours des derniers mois, l’Irak. Les déclarations communes jusque-là se sont contentées d’insister sur le «rôle central» que doivent jouer les Nations unies dans l’après-guerre. Et les Quinze doivent désormais ouvrir un débat de fond en analysant les conséquences que l’intervention militaire en Irak a eu sur les relations entre les membres de l’Union. Car un important fossé s’est creusé entre le camp de la paix emmené par la France, l’Allemagne et la Belgique, et les alliés fidèles des Etats-Unis dans le conflit irakien, à savoir la Grande-Bretagne et l’Espagne.

«Il est temps d’analyser cette crise et de voir ce qu’elle implique pour l’UE» a ainsi déclaré le ministre des Affaires étrangères de la Grèce, Georges Papandréou, dont le pays occupe actuellement la présidence européenne. «Il est d’une importance fondamentale de trouver un terrain commun sur comment traiter le ‘jour d’après’ dans le pays et la région». La question irakienne a du coup été inscrite en tête de l’ordre du jour de ces discussions, lors du déjeuner de la première journée de discussion. Semblant anticiper des débats houleux, les autorités grecques locaux ont choisi d’organiser une partie des discussions dans un décor relaxant, à bord d’un bateau de croisière reliant Rhodes à l’île proche de Kastellorizo.

La Commission européenne et la présidence grecque de l’UE ont annoncé leur intention de présenter pendant cette réunion une série de propositions concrètes qui visent à relancer le rôle des Européens en Irak. L’une d’entre elle vise la mise en place à Bagdad d’un bureau permanent qui serait charger de superviser différentes missions, telles que celle de l’acheminement de l’aide humanitaire ou l’évaluation des besoins de reconstruction. Les Quinze vont également être amenés à s’interroger sur le rôle que pourrait jouer l’UE dans le processus de réconciliation ou la mise en place de nouvelles institutions. Des sujets délicats qui ne pourront être abordés qu’une fois que les quinze membres de l’Union auront défini une position globale sur la situation en Irak, un pays dans lequel le président américain vient de décréter la fin des «opérations majeures de combat».

Louis Michel en première ligne

La deuxième journée de cette réunion informelle est consacrée à un autre sujet particulièrement conflictuel entre les Quinze membres, la mise en place d’une politique européenne de défense. Réunis mardi à Bruxelles, quatre pays de l’UE –l’Allemagne, la France, la Belgique et le Luxembourg- ont analysé la manière de relancer cet ambitieux projet, envisageant notamment le fonctionnement dès 2004 d’un «noyau» qui regrouperait les Etats disposés à engager des troupes dans de futures opérations militaires de l’UE autonomes de l’Otan. Les résultats de ce sommet doivent être présentés ce samedi à tous les membres de l’UE par le ministre belge des Affaires étrangères, Louis Michel.

Ce diplomate chevronné sait déjà qu’il devra affronter l’hostilité de plusieurs pays qui craignent que l’Otan ne se retrouve affaiblie. Certains d’entre eux ont vivement dénoncé le fait que quatre pays se réunissent de la sorte pour examiner une étape aussi importante de la construction européenne. Une critique à laquelle le ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin s’est notamment chargé de répondre en expliquant que l’idée était d’élaborer une proposition qui puisse ensuite être débattue par tous. Son homologue belge Louis Michel a lui aussi plaidé la bonne foi des quatre pays réunis en Belgique et leur souci de faire avancer la construction européenne. A la veille d’effectuer sa présentation, il déclarait espérer que ne soit pas fait «un procès en sorcellerie». «Comme c’est une réunion informelle, je suppose que les esprits seront ouverts et ne seront pas préconditionnés», a ainsi déclaré vendredi Louis Michel à son arrivée en Grèce.

En marge de ces points de friction, d’autres sujets beaucoup plus consensuels devraient permettre aux membres de l’UE d’afficher leur cohésion. Les Quinze ne devraient ainsi pas manquer de saluer la publication cette semaine de la «feuille de route», un document qui détaille les étapes d’un règlement pacifique du conflit au Proche-Orient en visant la création, d’ici 2005, d’un Etat palestinien indépendant. L’UE a participé à l’élaboration de ce document qui a été remis mercredi aux Palestiniens et aux Israéliens Autre motif de satisfaction, la présence à cette réunion de représentants des dix futurs pays adhérents à l’Union européenne. Le 16 avril avait été signé dans la capitale grecque le traité d’adhésion qui permettra à dix pays de rejoindre officiellement l’Union européenne le 1er mai 2004. Et ces nations sont pour la première fois invitées à participer à des discussions de travail rassemblant les quinze pays déjà membres.



par Olivier  Bras

Article publié le 02/05/2003