Mondialisation
Premier G8 d’après-guerre
La France accueille le G8 dans un contexte international toujours marqué par le contre-coup de la guerre américaine en Irak. En raison de la position française au cours des événements, il est à redouter que les décisions qui seront prises (ou pas) seront elles aussi fortement brouillées par les parasites du conflit qui continuent de détériorer la relation entre, notamment, Washington et Paris. Si, après les festivités de Saint-Pétersbourg, le contexte paraît pourtant plus favorable à la détente, il semble en revanche peu propice à la prise de décisions généreuses.
Les rencontres de Saint-Pétersbourg, auxquelles ont participé une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement, ont été un prélude utile, indispensable peut-être, aux retrouvailles d’une communauté internationale qui vient de traverser l’épreuve de la division. Rien n’est oublié et l’essentiel des problèmes demeure. Mais, au moins, la communication directe est rétablie selon les usages diplomatiques habituels plutôt que par le moyen détourné des petites phrases assassines, surtout distillées par voie de presse. Le président russe vient ainsi de réussir une colossale opération de relations publiques. Elle n’a certes pas abouti à une démonstration de réconciliation générale, qui aurait été dénoncée comme une vaste hypocrisie compte tenu du fossé qui continue de séparer les positions. Personne n’a renoncé, mais la présence de chacun atteste la volonté de tous de redonner sa chance au dialogue international, fût-il conflictuel.
C’est donc dans cet état d’esprit que s’ouvre la réunion du club des huit pays les plus puissants de la planète, le G8 (qui regroupe les chefs d’Etat et de gouvernement américain, français, russe, britannique, canadien, japonais, allemand et italien). Les travaux prendront fin mardi, à la mi-journée, et le programme comprend deux principaux temps forts. Le premier, samedi, en préambule au G8 à proprement parler avec la réunion dite du «dialogue élargi». Outre les «grands» de ce monde, y participeront onze représentants de pays émergents (Egypte, Algérie, Nigeria, Afrique du Sud, Sénégal, Mexique, Brésil, Chine, Arabie Saoudite, Malaisie et Inde). Le président suisse sera associé aux travaux, de même que le secrétaire général de l’ONU, le président de la Banque mondiale, le directeur général du Fonds monétaire internationale et celui de l’Organisation mondiale du commerce. C’est dans la soirée de ce dimanche que la question du Nouveau partenariat pour l’Afrique (NEPAD) sera abordée, lors du dîner auquel seront conviés les chefs d’Etat égyptien, algérien, sud-africain, nigérian et sénégalais.
Ce n’est que lundi que les Huit se retrouveront entre eux pour une petite journée de travail consacrée aux perspectives de l’économie mondiale et aux affaires politiques. En fin d’après-midi il sera question du développement durable (la faim dans le monde, l’accès à l’eau, le financement du développement). Mais le président américain aura déjà quitté le sommet pour s’envoler vers le Proche-Orient où il doit participer à deux sommets (en Egypte, le 3 juin, et en Jordanie, le lendemain).
L’Afrique victimes des tensions au sein du club
Depuis quelques jours la presse française ne cesse de souligner le difficile exercice auquel va être soumis l’hôte du sommet. L’attitude de Jacques Chirac et de la diplomatie française lors de la montée en puissance américaine contre l’Irak a été ressentie, à Washington, comme une véritable trahison. Et, en dépit de quelques politesses de circonstances, l’administration américaine ne semble pas disposée à pardonner au président français son opposition à la guerre et son rôle de leader dans la fronde anti-américaine qui a rythmé les semaines qui ont précédé le conflit. Pourtant, si Paris n’a pas convaincu et si l’unilatéralisme américain a finalement remporté la première étape (militaire), rien en l’état ne laisse présager que tôt ou tard, face aux difficultés que l’on voit poindre avec la montée du débat sur les vraies causes de la guerre et l’opposition de plus en plus marquée des Irakiens à l’égard de leurs libérateurs, Washington n’en reviendra pas à des méthodes moins brutales et plus diplomatiques dans sa gestion des relations internationales. Il n’empêche : à l’heure qu’il est les comptes ne sont pas soldées et cet aspect risque de polluer l’ensemble du programme car il est à l’origine d’une grave détérioration de l’atmosphère transatlantique.
On peut donc s’interroger sur le sort qui sera réservé aux dossiers que la France veut porter sur la table du G8. L’Afrique d’abord, dont Paris a pris l’engagement d’être le porte-parole lors du dernier sommet France-Afrique qui s’est tenu au début de l’année. Outre la question du Nepad qui, au fur et à mesure que le temps passe, voit sa crédibilité s’affaiblir, demeure également celle de l’accès des produits agricoles du Sud aux marchés du Nord. Or l’agriculture, tant aux Etats-Unis qu’en Europe, est un secteur subventionné. Et tant que la guerre commerciale agricole entre les deux géants durera, il semble improbable que le tiers monde trouvera sa juste place dans les échanges mondiaux. De même Washington reste sensible aux arguments des lobbies pharmaceutiques et les négociations sur l’accès des pays du Sud aux indispensables médicaments produits au Nord sont bloquées depuis deux ans. L’affrontement euro-américain sur les aliments issus des OGM (organismes génétiquement modifiés) n’a pas fini non plus d’encombrer la résolution du problème de la faim dans le monde. Alors qu’en vertu du principe de précaution les Européens n’envisagent de les admettre qu’en entourant cette autorisation de nombreuses précautions, les Américains (premiers producteurs mondiaux) proclament que l’attitude de Bruxelles est dictée par des arrières-pensées protectionnistes et qu’elle entrave le règlement du problème.
Cependant, pour faire bonne mesure et couper l’herbe sous les pieds de ses détracteurs, Washington sait formuler des propositions apparemment généreuses. Ainsi les Etats-Unis ont annoncé le déblocage sur cinq ans d’une somme de quinze milliards de dollars consacrée à la lutte anti-sida. La proposition est toutefois assortie d’une certain nombre de conditions. Parmi celles-ci, et fidèle à ses préférences pour les aides bilatérales, l’administration américaine a précisé que seul (et au maximum) un milliard serait versé au Fonds mondial créé par les Nations unies voici deux ans. C’est en tout cas une annonce dont l’effet devrait provoquer un mouvement de surenchère propice à une collecte de fonds plus généreuse que prévue. Le sida est responsable de la mort de 8 000 personnes, chaque jour.
C’est donc dans cet état d’esprit que s’ouvre la réunion du club des huit pays les plus puissants de la planète, le G8 (qui regroupe les chefs d’Etat et de gouvernement américain, français, russe, britannique, canadien, japonais, allemand et italien). Les travaux prendront fin mardi, à la mi-journée, et le programme comprend deux principaux temps forts. Le premier, samedi, en préambule au G8 à proprement parler avec la réunion dite du «dialogue élargi». Outre les «grands» de ce monde, y participeront onze représentants de pays émergents (Egypte, Algérie, Nigeria, Afrique du Sud, Sénégal, Mexique, Brésil, Chine, Arabie Saoudite, Malaisie et Inde). Le président suisse sera associé aux travaux, de même que le secrétaire général de l’ONU, le président de la Banque mondiale, le directeur général du Fonds monétaire internationale et celui de l’Organisation mondiale du commerce. C’est dans la soirée de ce dimanche que la question du Nouveau partenariat pour l’Afrique (NEPAD) sera abordée, lors du dîner auquel seront conviés les chefs d’Etat égyptien, algérien, sud-africain, nigérian et sénégalais.
Ce n’est que lundi que les Huit se retrouveront entre eux pour une petite journée de travail consacrée aux perspectives de l’économie mondiale et aux affaires politiques. En fin d’après-midi il sera question du développement durable (la faim dans le monde, l’accès à l’eau, le financement du développement). Mais le président américain aura déjà quitté le sommet pour s’envoler vers le Proche-Orient où il doit participer à deux sommets (en Egypte, le 3 juin, et en Jordanie, le lendemain).
L’Afrique victimes des tensions au sein du club
Depuis quelques jours la presse française ne cesse de souligner le difficile exercice auquel va être soumis l’hôte du sommet. L’attitude de Jacques Chirac et de la diplomatie française lors de la montée en puissance américaine contre l’Irak a été ressentie, à Washington, comme une véritable trahison. Et, en dépit de quelques politesses de circonstances, l’administration américaine ne semble pas disposée à pardonner au président français son opposition à la guerre et son rôle de leader dans la fronde anti-américaine qui a rythmé les semaines qui ont précédé le conflit. Pourtant, si Paris n’a pas convaincu et si l’unilatéralisme américain a finalement remporté la première étape (militaire), rien en l’état ne laisse présager que tôt ou tard, face aux difficultés que l’on voit poindre avec la montée du débat sur les vraies causes de la guerre et l’opposition de plus en plus marquée des Irakiens à l’égard de leurs libérateurs, Washington n’en reviendra pas à des méthodes moins brutales et plus diplomatiques dans sa gestion des relations internationales. Il n’empêche : à l’heure qu’il est les comptes ne sont pas soldées et cet aspect risque de polluer l’ensemble du programme car il est à l’origine d’une grave détérioration de l’atmosphère transatlantique.
On peut donc s’interroger sur le sort qui sera réservé aux dossiers que la France veut porter sur la table du G8. L’Afrique d’abord, dont Paris a pris l’engagement d’être le porte-parole lors du dernier sommet France-Afrique qui s’est tenu au début de l’année. Outre la question du Nepad qui, au fur et à mesure que le temps passe, voit sa crédibilité s’affaiblir, demeure également celle de l’accès des produits agricoles du Sud aux marchés du Nord. Or l’agriculture, tant aux Etats-Unis qu’en Europe, est un secteur subventionné. Et tant que la guerre commerciale agricole entre les deux géants durera, il semble improbable que le tiers monde trouvera sa juste place dans les échanges mondiaux. De même Washington reste sensible aux arguments des lobbies pharmaceutiques et les négociations sur l’accès des pays du Sud aux indispensables médicaments produits au Nord sont bloquées depuis deux ans. L’affrontement euro-américain sur les aliments issus des OGM (organismes génétiquement modifiés) n’a pas fini non plus d’encombrer la résolution du problème de la faim dans le monde. Alors qu’en vertu du principe de précaution les Européens n’envisagent de les admettre qu’en entourant cette autorisation de nombreuses précautions, les Américains (premiers producteurs mondiaux) proclament que l’attitude de Bruxelles est dictée par des arrières-pensées protectionnistes et qu’elle entrave le règlement du problème.
Cependant, pour faire bonne mesure et couper l’herbe sous les pieds de ses détracteurs, Washington sait formuler des propositions apparemment généreuses. Ainsi les Etats-Unis ont annoncé le déblocage sur cinq ans d’une somme de quinze milliards de dollars consacrée à la lutte anti-sida. La proposition est toutefois assortie d’une certain nombre de conditions. Parmi celles-ci, et fidèle à ses préférences pour les aides bilatérales, l’administration américaine a précisé que seul (et au maximum) un milliard serait versé au Fonds mondial créé par les Nations unies voici deux ans. C’est en tout cas une annonce dont l’effet devrait provoquer un mouvement de surenchère propice à une collecte de fonds plus généreuse que prévue. Le sida est responsable de la mort de 8 000 personnes, chaque jour.
par Georges Abou
Article publié le 01/06/2003