France
Peur sur la ville rose
Une nouvelle instruction judiciaire pour des faits d’une gravité exceptionnelle a été engagée en marge de la seconde mise en examen du tueur en série Patrice Alègre. Selon les deux anciennes prostituées interrogées par la gendarmerie nationale, l’accusé ne serait que l’homme de mains chargé d’alimenter un réseau sado-masochiste de notables pervers. Patrice Alègre aurait travaillé pour des policiers, des magistrats et des politiques. Sous la pression des témoignages et des médias, il a fini par l’admettre. Sous réserve qu’il n’a pas menti.
C’est un fait divers d’une gravité exceptionnelle en raison de la qualité des individus mis en cause dans cette affaire. Plus le temps passe, plus s’accumulent les témoignages (vrais ou faux) et les procès-verbaux d’instruction, et moins il paraît vraisemblable que le tueur en série ait simplement été un pervers isolé en proie à des pulsions incontrôlables. Cet homme est en prison depuis 1997 et il a été condamné en 2002 à une peine de réclusion criminelle à perpétuité pour cinq meurtres et six viols. Jusque-là Patrice Alègre apparaissait comme un petit souteneur détraqué dont les activités se limitaient aux eaux troubles de la prostitution et le rayon d’action ne dépassait guère le périmètre de la gare de Toulouse.
Après ce premier procès, au regard du nombre d’affaires non-élucidées dans la région, la justice était vite parvenue à la conclusion qu’elle avait affaire à un tueur en série exceptionnelle. Restait à réunir les pièces à conviction capables d’étayer cette hypothèse. Les premiers éléments sont apparus en avril dernier, lorsque la presse a révélé que d’anciennes prostituées, exerçant à Toulouse à la même époque que Patrice Alègre avaient été retrouvée par la gendarmerie nationale, chargée de l’enquête. Fanny et Patricia ne font plus partie du «milieu», mais elles ont toujours peur et désormais elles se cachent. Mais elles vont déclarer que Patrice Alègre bénéficie de protections policière et judiciaire qui lui ont permis d’échapper au sort réservé aux assassins, que l’une d’elle a été le témoin direct du crime d’une prostituée qui venait tout juste de dénoncer Alègre à la police, que ce dernier était notamment chargé d’organiser des soirées sado-masochistes particulièrement violentes pour les notables toulousains, parmi lesquels auraient figuré des hommes politiques (dont l’ancien maire Dominique Baudis) et des magistrats (au nombre de trois).
La confiance trahie des citoyens
Le 15 avril, cette situation aboutit à l’ouverture d’une information judiciaire «contre Patrice Alègre et tous les autres» pour «viols aggravés et complicité» et pour «proxénétisme aggravé en bande organisée». Au début, tout le monde nie. Et puis Alègre lui-même finit par reconnaître que Fanny et Patricia ne racontent pas que des mensonges et qu’il a bien assassiné Line Galbardi. Et, également, le travesti Claude Martinez, en 1992. Et, pour chacun des deux meurtres, il désigne les commanditaires, des notables toulousains parmi lesquels Dominique Baudis.
Dans la «ville rose», c’est la panique. Aucune nouvelle mise en examen n’a été prononcée mais la peur est palpable chez tous ceux qui ont été cités. Des jeunes filles, parmi lesquelles des mineures, ont été battues, violées, torturées et les accusations formulées par les deux principaux témoins sont précises et concordantes. Patrice Alègre lui-même, d’ordinaire silencieux, semble déstabilisé et, sortant de sa réserve, rompt le silence. Il a notamment transmis une lettre à la chaîne de télévision Canal + dans laquelle il écrit qu’il a tué («faire taire», dit-il) Claude Martinez sur commande («j’ai été chargé»). Ses avocats et ceux de ses victimes, sont à la fois terrifiés par la gravité des faits et satisfaits de la tournure prise par les événements. En effet, selon l’un d’entre eux, «Patrice Alègre est un tueur utilitaire, qui ne tue pas pour assouvir une pulsion sexuelle mais pour supprimer un témoin, rationnellement. L‘évolution de cette affaire ne fait que le confirmer». Ils le clamaient depuis longtemps. Désormais ils sont entendus.
Enfin, aujourd’hui en France il y a une «affaire Alègre» qui remet en cause la confiance des citoyens dans leurs institutions. Les accusateurs font en effet peser les pires soupçons sur le rôle de la police toulousaine dans cette affaire. Des magistrats, chargés d’administrer la justice, passent pour des sadiques, alors que des hommes politiques sont accusés de perversion et de cruauté. Au mépris de la présomption d’innocence et alors que le secret de l’instruction se révèle être, encore une fois, une pure fiction.
Après ce premier procès, au regard du nombre d’affaires non-élucidées dans la région, la justice était vite parvenue à la conclusion qu’elle avait affaire à un tueur en série exceptionnelle. Restait à réunir les pièces à conviction capables d’étayer cette hypothèse. Les premiers éléments sont apparus en avril dernier, lorsque la presse a révélé que d’anciennes prostituées, exerçant à Toulouse à la même époque que Patrice Alègre avaient été retrouvée par la gendarmerie nationale, chargée de l’enquête. Fanny et Patricia ne font plus partie du «milieu», mais elles ont toujours peur et désormais elles se cachent. Mais elles vont déclarer que Patrice Alègre bénéficie de protections policière et judiciaire qui lui ont permis d’échapper au sort réservé aux assassins, que l’une d’elle a été le témoin direct du crime d’une prostituée qui venait tout juste de dénoncer Alègre à la police, que ce dernier était notamment chargé d’organiser des soirées sado-masochistes particulièrement violentes pour les notables toulousains, parmi lesquels auraient figuré des hommes politiques (dont l’ancien maire Dominique Baudis) et des magistrats (au nombre de trois).
La confiance trahie des citoyens
Le 15 avril, cette situation aboutit à l’ouverture d’une information judiciaire «contre Patrice Alègre et tous les autres» pour «viols aggravés et complicité» et pour «proxénétisme aggravé en bande organisée». Au début, tout le monde nie. Et puis Alègre lui-même finit par reconnaître que Fanny et Patricia ne racontent pas que des mensonges et qu’il a bien assassiné Line Galbardi. Et, également, le travesti Claude Martinez, en 1992. Et, pour chacun des deux meurtres, il désigne les commanditaires, des notables toulousains parmi lesquels Dominique Baudis.
Dans la «ville rose», c’est la panique. Aucune nouvelle mise en examen n’a été prononcée mais la peur est palpable chez tous ceux qui ont été cités. Des jeunes filles, parmi lesquelles des mineures, ont été battues, violées, torturées et les accusations formulées par les deux principaux témoins sont précises et concordantes. Patrice Alègre lui-même, d’ordinaire silencieux, semble déstabilisé et, sortant de sa réserve, rompt le silence. Il a notamment transmis une lettre à la chaîne de télévision Canal + dans laquelle il écrit qu’il a tué («faire taire», dit-il) Claude Martinez sur commande («j’ai été chargé»). Ses avocats et ceux de ses victimes, sont à la fois terrifiés par la gravité des faits et satisfaits de la tournure prise par les événements. En effet, selon l’un d’entre eux, «Patrice Alègre est un tueur utilitaire, qui ne tue pas pour assouvir une pulsion sexuelle mais pour supprimer un témoin, rationnellement. L‘évolution de cette affaire ne fait que le confirmer». Ils le clamaient depuis longtemps. Désormais ils sont entendus.
Enfin, aujourd’hui en France il y a une «affaire Alègre» qui remet en cause la confiance des citoyens dans leurs institutions. Les accusateurs font en effet peser les pires soupçons sur le rôle de la police toulousaine dans cette affaire. Des magistrats, chargés d’administrer la justice, passent pour des sadiques, alors que des hommes politiques sont accusés de perversion et de cruauté. Au mépris de la présomption d’innocence et alors que le secret de l’instruction se révèle être, encore une fois, une pure fiction.
par Georges Abou
Article publié le 05/06/2003